Le polonium 210, noté 210Po, est l'isotope du polonium dont le nombre de masse est égal à 210 : son noyau atomique compte 84 protons et 126 neutrons avec un spin 0+ pour une masse atomique de 209,9828737 g/mol. Il est caractérisé par un défaut de masse de 15 968 230 ± 2 909 eV/c2 et une énergie de liaison nucléaire de 1 645 228 334 ± 2 922 eV. Il est présent à l'état de traces dans le milieu naturel, où il provient de la désintégration du radon 222.
Un gramme de polonium 210 présente une radioactivité de 166,5 TBq.
Il donne du plomb 206 par désintégration α avec une énergie de désintégration de 5 304 330 eV, une puissance spécifique de 140 kW/kg, et une période radioactive de 138,376 jours.
C'est donc un émetteur de rayonnement α particulièrement puissant : un milligramme de polonium 210 émet autant de particules α que 4,5 grammes de radium 226.
Les particules α sont rapidement absorbées par la matière environnant la source qui les émet, leur énergie étant convertie en chaleur, ce qui a fait utiliser le polonium 210 par le passé comme source d'énergie dans les générateurs de chaleur et les générateurs électriques à radioisotopes de sondes spatiales et de robots d'exploration planétaires tels que les Lunokhod soviétiques, où il a servi pour maintenir les instruments à température suffisante pendant la nuit lunaire. Néanmoins, la relative brièveté de sa décroissance le rend surtout adapté aux applications nécessitant de libérer beaucoup d'énergie en peu de temps, de sorte qu'un radioisotope à plus longue période radioactive comme le plutonium 238 (près de 88 ans) répond bien mieux aux besoins d'une mission spatiale à destination de planètes lointaines.
Le polonium 210 se désintègre en n'émettant que des particules α de 5 304 330 eV, sauf statistiquement dans un cas sur cent mille environ où il libère une particule α de 4 516 530 eV suivie d'un photon γ de 803 100 eV résultant de la désexcitation du noyau 206Pb produit transitoirement dans un état métastable. La faible différence d'énergie entre les deux types de particules α émises ainsi que la très faible quantité de rayons γ rend la détection du polonium 210 par spectroscopie γ plutôt délicate ; la spectroscopie α reste le plus sûr moyen pour caractériser le 210Po.
Outre le domaine spatial, le polonium 210 est également utilisé dans les applications antistatiques, telles que les certaines brosses pour matériels sensibles à l'électricité statique, bien que les sources β soient généralement préférées car nettement moins dangereuses. Il est en effet très volatil — il perd 50 % de sa masse en 45 heures en n'étant chauffé qu'à 55 °C (son point de fusion est de 254 °C), peut-être par désagrégation à l'échelle atomique induite par sa très forte activité α, laquelle a d'ailleurs pour effet de le maintenir à température élevée — et assimilé par les organismes vivants en raison de sa chimie similaire à celles du tellure et du bismuth : on a montré que certains micro-organismes sont capables de méthyler le polonium à l'aide de méthylcobalamine, de la même façon qu'elles peuvent méthyler le mercure, le sélénium et le tellure.
Le polonium 210 est connu du grand public pour avoir été utilisé par des agents russes afin d'éliminer Alexandre Litvinenko en 2006.