En algèbre linéaire, le théorème de la base incomplète affirme que, dans un espace vectoriel E sur un corps K,
Toute famille libre de vecteurs peut être complétée en une famille libre et génératrice de E (c'est-à-dire une base de E) ;
De toute famille génératrice de E peut être extraite une sous-famille libre et génératrice.
En particulier, ce théorème affirme que toutespace vectorielE admet une base. En effet, la famille vide est libre et peut être complétée en une base de E. Ce résultat d'existence conduit à la définition de la dimension en algèbre linéaire. L'énoncé du théorème est le suivant :
Théorème de la base incomplète. Soit E un espace vectoriel,
une famille génératrice de E et
une famille libre, avec
. Alors il existe I'' tel que
et que
soit une base de E.
Démonstration
La démonstration dans le cas fini repose sur l'algorithme suivant :
Soit une sous-famille libre initiale
.
Si cette famille n'est pas génératrice (n'est pas une base), il existe un indice i tel que ui n'est pas une combinaison linéaire de
. Nécessairement, i n'appartient pas à I'.
On remplace I' par
. La famille
est une sous-famille libre de
. On réitère 2.
La boucle se termine en un nombre fini d'étapes lorsque
est une famille génératrice, donc une base de E.
Preuve de la correction.
Premier invariant à démontrer : en 2, si
est bien une famille libre non génératrice, on peut lui adjoindre un élément de
qui n'est pas combinaison linéaire de
.
En effet, s'il n'existait pas d'élément de
qui ne soit pas combinaison linéaire de
, cela voudrait dire que
peut générer tout
, et donc tout E, puisque cette dernière famille est génératrice de E. Donc
serait déjà génératrice de E.
Deuxième invariant à démontrer : lorsque l'on ajoute un tel élément à
, la nouvelle famille obtenue est toujours libre.
En effet, le nouvel élément n'est pas une combinaison linéaire des précédents.
Preuve de la terminaison.
À chaque itération, on augmente
d'un élément de
à chaque fois différent (en effet, on ne peut pas prendre deux fois un élément car il est combinaison linéaire de lui-même). Or
est fini, donc l'algorithme doit s'arrêter au bout d'un nombre fini d'étapes.
Il découle de cela que l'algorithme s'arrêtera dans un temps fini et que lorsqu'il s'arrête, il a forcément exhibé une famille génératrice et libre de E, c'est-à-dire une base.
Dans le cas général la première démonstration est due au mathématicien Georg Hamel, et repose nécessairement sur l'axiome du choix. La démonstration qui suit utilise le lemme de Zorn, qui lui est équivalent. Elle consiste à construire la base recherchée comme une famille libre maximale (ou une famille génératrice minimale).
Soit
l'ensemble des parties J de I, contenant I' et telles que la sous-famille
soit libre.
L'ensemble
est non vide, car il contient par hypothèses I'.
Cette partie de
est inductive pour l'inclusion. Autrement dit, elle est close pour les limites croissantes.
Le lemme de Zorn s'applique et donne l'existence d'une sous-famille libre maximale
avec
. Montrons que cette famille est une base :
Tout vecteurui s'exprime comme une combinaison linéaire des vecteurs de la famille
. Sinon ui complète B en une sous-famille libre, ce qui contredit la maximalité.
Tout vecteur u de E s'exprime comme combinaison linéaire des vecteurs ui, et donc comme combinaison linéaire des vecteurs de la base
.