Adolphe d'Espie - Définition

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Introduction

Adolphe d'Espie, connu sous le nom de plume de Jean de La Hire, né le 28 janvier 1878 à Banyuls-sur-Mer et mort en 1956 à Nice, est d'abord écrivain et ensuite éditeur français. Il signe Jean de La Hire ses romans de littérature classique comme L'enfer du soldat (1903) ou Les Vipères (1905), mais aussi les Grandes aventures du Nyctalope et les romans de science fiction. Il utilise plusieurs autres pseudonymes, comme la plupart des romanciers populaires de l'époque : 'Edmond Cazal pour les romans historiques comme Mirabeau et Sainte Thérèse d'Avila, celui de Commandant Cazal pour ses romans de guerre ; Alexandre Zorka, John Vinegrower et André Laumière pour ses romans d'amour, et Arsène Lefort pour ses romans de cape et d'épée comme Le Roi des catacombes (1929) , La fille de Duguesclin (1938).

Adolphe d'Espie s'essaye à de nombreux genres qui font sa popularité : romans policiers, roman sentimental, science fiction et aventures scouts dans la littérature de jeunesse. Après une étude biographique sur Colette en 1905 et avoir été le secrétaire de Willy, il écrit La Roue fulgurante en 1906. Il y décrit une roue qui aspire les maisons « comme les feuilles mortes sur le passage d'un train rapide ». Ce roman d'anticipation et de science-fiction fait de lui un des pionniers français du space opera.

En 1908, Jean de La Hire crée le personnage de Léo Saint-Clair, dit le Nyctalope, avec la publication de L'homme qui peut vivre dans l'eau. Après une tentative d'assassinat, ce personnage reçoit un cœur artificiel, et devient un héros vengeur dotés de super-pouvoirs et capable de voir la nuit. La trentaine d'ouvrages de la série du Nyctalope connait un grand succès populaire. Moins connu que Rocambole, Arsène Lupin ou Fantômas, le Nyctalope a pourtant été le premier super-héros à part entière dans l'histoire de la littérature populaire.

Biographie

Le Comte Adolphe d'Espie est le fils unique du comte Celestin d'Espie, viticulteur, et de Marie Maillol, sœur du sculpteur et peintre Aristide Maillol. Il passe une partie de sa jeunesse dans une pension jésuite où il reçoit une solide éducation religieuse et en lettres classiques. Jeune homme, il décide de rejoindre Paris pour chercher gloire littéraire et fortune. À l'âge de 20 ans, il choisit de prendre pour nom de plume Jean de La Hire, en signe d'admiration pour les fameuses paroles d'Étienne de Vignolles, dit La Hire, compagnon de Jeanne d'Arc : « Seigneur fait pour La Hire ce que tu voudrais que La Hire fît pour toi, si tu étais La Hire et si La Hire était Dieu. »

En 1898, il publie chez Edmond Girard son premier roman, la Chair et l'esprit, grâce à Pierre Louÿs, l'auteur d'Aphrodite. Jusqu'en 1908, il publie plus d'une vingtaine de romans, comme Le Tombeau des vierges (1900), La Torera (1902), L'Enfer du soldat (1903), et ceux qu'il publie à la maison d'édition Offenstadt. Il se tourne également vers les métiers de l'édition et fonde la Bibliothèque indépendante, le 15 novembre 1904, sous son vrai nom, Adolphe-Ferdinand Célestin d’Espie. Il revend cette maison d'édition moins d'un an plus tard, et prend alors la direction de la Librairie Universelle, de juillet 1905 à juin 1906.

Il rencontre un grand succès populaire avec la publication en 1908 d'un récit de science-fiction, La Roue fulgurante dans le journal Le Matin, dont il prend plus tard la direction littéraire. Dès lors, cet écrivain prolifique se consacre au roman populaire et à la science fiction. Il écrit pas moins de 300 ouvrages, dont certains dépassent les 100 000 exemplaires, tirage considérable pour l'époque. Certains romans, tant sentimentaux que policiers, d'aventures, de cape et d'épée ou de science-fiction, sont parus d'abord en feuilletons dans des journaux et en fascicules, forme de publication qui se développe fortement à cette époque.

Participant aux combats de la Première Guerre mondiale, il est victime des gaz de combat qui lui laissent des problèmes pulmonaires récurrents. Il publie plusieurs séries de romans d'aventures ayant pour cadre le scoutisme, sous forme de récits à épisodes en plusieurs livraisons : Les Trois boy-scouts (édition Ferenczy, publication débutée en 1913), Grandes aventures d’un boy-scout (édition Ferenczi, 1926), L’as des boy-scouts (Ferenczi, 1932), etc. C'est en particulier dans ce genre qu'il développe pleinement sa production littéraire sérielle, recourant à la dictée sténographique pour maintenir le rythme de ses publications. Chaque épisode s'articule autour d'une aventure cohérente pouvant être lu indépendamment de la série, au contraire d'autres auteurs dont les épisodes correspondent à la découpe normale en chapitre de l'œuvre finale. Ces mini-récits s'inspirent de situations typiques de divers genres littéraires transposés (policier, espionnage, naufrage sur une île déserte, etc.).

Jean de La Hire ne renonce pas à la littérature classique avec Sainte Thérèse d'Avila (Ollendorf 1921) qu'il considère comme son meilleur livre. Il y propose une reconstruction des extases de la Sainte éponyme en termes de délire mystique à forte connotation sexuelle. Traduit en espagnol, ce livre est très attaqué dans le monde catholique. Il est mis à l'Index Librorum Prohibitorum, et brûlé solennellement à Madrid dans une cour du palais royal en présence de nombreux invités, d'un légat du pape et du roi Alphonse XIII d'Espagne. Une nouvelle mise à l'Index a lieu avec L'Inquisition d'Espagne, publié en 1924 sous le pseudonyme d'Edmond Cazal, dans la collection L'histoire Romanesque de la maison d'édition Paris Bibliothèque des curieux.

Il se positionne en ardent promoteur des valeurs démocratiques avec son roman visionnaire, La Guerre... La Guerre, publié en 1939 sous le pseudonyme d'Edmond Cazal. À partir du 1er février 1939, il entreprend une série de cinq ouvrages qu'il termine le 10 août de la même année : La guerre ! La guerre !, Maginot-Siegfreid, Batailles pour la mer, L'Afrique en Flammes et puis La fin... par le Pétrole, soit au total plus de 1200 pages. Le premier tome est sorti en mars, donc quelques mois avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Dans son analyse critique de cette suite, J. Van Herp écrit : « Succès allemands initiaux, revers italiens dans les Balkans, défaite navale en méditerranée, volte-face-italienne, perte de confiance des généraux allemands dans le Führer, celui-ci glissant dans le délire, et volonté d'Hitler d'écraser les généraux... et si le 25 juillet est bien la date de la chute de Mussolini, faire du 20 Juillet réel, date du complot contre Hitler, un 27 juillet n'est pas si grave[réf. souhaitée]. »

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se rapproche de l'idéologie pétainiste et soutient la collaboration à travers ses écrits. Il adhère au Rassemblement national populaire (RNP), le parti collaborationniste de Marcel Déat, et au Groupe Collaboration. Le 28 janvier 1941, l'administration allemande de la zone occupée le nomme commissaire-gérant de la maison d'édition Ferenczi, afin de contrer le Commissariat général aux questions juives qui tentait de mettre sous sa compétence l'aryanisation des maisons d'éditions françaises qui appartenaient à des juifs, en application de l'ordonnance allemande du 18 octobre 1940. Adolphe d'Espie remplace ainsi Raymond Durand-Auzias qui avait été brièvement nommé par le tribunal de commerce de la Seine pour administrer la maison d'édition Ferenczi, qui est rebaptisée Éditions du Livre moderne. Ce poste lui est retiré le 29 décembre de la même année. Ses écrits politiques sont ouvertement pro-allemands : Le Travail, les travailleurs et la nouvelle Europe (1941) et Hitler, que nous veut-il donc ? (1942), tous deux aux éditions du Livre Moderne, et Mort aux Anglais! Vive la France (1942), tous publiés à L'Imprimerie Moderne.

Après la guerre, il doit faire face à l'épuration à la Libération : il est exclu du Syndicat des Éditeurs le 9 septembre 1944, et mit en détention préventive le 21 mars 1945. Il s'échappe de l'hôpital de Château-la-Vallière où il avait été transféré, et il est condamné par contumace à dix ans de réclusion. Le 30 avril 1948, il est condamné à la dégradation nationale. Il se rend le 3 décembre 1951. Il entreprend ensuite une nouvelle série d'ouvrages et romans policiers.

Il meurt en 1956 à Nice, suite à ses problèmes chroniques des poumons dus aux gaz de la Première Guerre mondiale, croient savoir certain. D'autres évoquent également son âge.

Son roman Les mystères de Lyon est republié pour la dernière fois en 1979, aux éditions Marabout avec une préface d'Hubert Juin. Ce roman narrant une aventure du Nyctalope, « l'homme qui voyait la nuit », rencontre à nouveau un certain succès. Van Herp et A. Leborgne considèrent la trilogie Lucifer (publié une nouvelle fois en feuilleton à la Dépêche quotidienne d'Algérie en 1953), Zattan et Belzébuth comme l'un des sommets de l'œuvre de Jean de La Hire. René Brantonne a réalisé les illustrations de ses livres édités aux éditions Jaeger d'Hauteville.

Une anthologie récente, Chasseurs de chimères, L'âge d'or de la science-fiction française, de Serge Lehman, paru en 2006, inclut le texte intégral de La Roue fulgurante (1908). S. Lehman rappelle par ailleurs que le personnage de Léo Saint-Clair, alias le Nyctalope, a une existence romanesque qui commence en 1908 et se termine en 1944. Même réprouvé, Jean de La Hire demeure, selon S. Lehman, « l’une des grandes figures de l’imaginaire français, chaînon manquant entre les « Gentilhommes-justiciers » de la fin du XIXème siècle et les aventuriers modernes dont Bob Morane est l’emblème. Il est le héros superscientifique par excellence. »

George Fronval écrit dans un numéro spécial du Chasseur d'illustrés consacré à Jean de La Hire : « Quel est le garçon qui n'a pas lu, au moins une fois dans sa vie, une de ses livraisons des Trois boys-Scouts ? Il ne doit pas en exister. »

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