La première fonction de la motte castrale clairement identifiable est celle du logement. À partir du milieu du Xe siècle, on assiste au passage de la civilisation du palais à celle du château. Au haut Moyen Âge, le palais est une simple résidence, peu ou pas fortifiée, souvent rurale, que les textes appellent « villa ». Les souverains mérovingiens et carolingiens possédaient des villae royales surtout dans le noyau carolingien (Laon-Soissons-Compiègne). Autour de l'an mil, Robert le Pieux fait édifier des mottes aux périphéries de son domaine (Montlhéry), mais le roi n'y loge pas.
Le témoignage du chroniqueur Lambert d'Ardres prouve qu'une construction en bois n’exclut pas un certain confort d’aménagement : plusieurs chambres, logis, celliers, magasins à provisions et chapelle, le tout sur trois niveaux. Pour André Debord, « la motte n’était pas l’habitat caractéristique de la petite chevalerie de village (…) de trop médiocre fortune pour pouvoir fonder une seigneurie châtelaine ». Le chevalier (miles) résidait selon lui « plutôt dans une grosse ferme pourvue de quelques éléments de défense ».
On sait aussi aujourd'hui, grâce à l'archéologie qu'un « château à motte », bâti pour durer, connaissait un certain nombre de phases. En 2004, des archéologues ont découvert une demeure en bois avec tous les vestiges de la vie quotidienne du XIe siècle à Pineuilh (Gironde). Les fouilles ont confirmé une occupation médiévale de la fin du Xe siècle à la fin du XIe siècle. On a déterminé qu'à partir de 978, la première habitation est construite au centre de l'enclos, puis en 981, elle est remplacée par un grand bâtiment assis sur des poteaux de bois, en activité jusque vers 1070. Les fouilles de Doué-la-Fontaine (M. de Boüard), ont révélé aussi le renforcement d'une aula (salle) carolingienne par emmottement de ses murs dont les ouvertures ont été préalablement obstruées et qui ont été surélevés en vue de la transformer en véritable donjon.
La motte castrale, également siège du pouvoir, peut jouer un rôle militaire. Son succès est dû en particulier à son élévation rapide, grâce à des matériaux abondants et peu coûteux, et à sa défense qui nécessite peu d’hommes. C’est un édifice que les seigneurs se transmettent sur plusieurs générations en l'aménageant autant que nécessaire. Sur le bord de la Canche, on peut remarquer l’importance de la petite chevalerie telle que la famille de Rollepot. Mathieu de Rollepot est qualifié de sire (dominus) dans les années 1240 et son pouvoir est établi, tout comme celui de son voisin, seigneur à Ligny, sur une motte castrale qui, du haut de son talus, domine la vallée de la Canche et le chemin qui menait à l'abbaye de Cercamp. Le pouvoir s’organise également sur une aire d’attraction (districtus) qui varie selon les châteaux. Plus le seigneur de la forteresse est puissant, plus le districtus est large. Dans le cas classique, l’autorité de la motte s’exerce uniquement dans les limites de la seigneurie, soit un kilomètre environ à la ronde. Comme partout ailleurs, les petits seigneurs tentent de s’arroger de nouveaux droits ou d'étendre ceux qu’ils possèdent.
Si au IXe siècle les pillages des Vikings ont notablement ralenti l'économie, celle-ci est en expansion soutenue à partir du Xe siècle. Dès cette époque, il devient plus rentable pour les pillards de s'installer sur un territoire, recevoir un tribut contre la tranquillité des populations et commercer que de guerroyer. Les Vikings participent ainsi pleinement au processus de féodalisation et à l'expansion économique qui l'accompagne. Ils doivent écouler leur butin, et ils frappent de la monnaie à partir des métaux précieux qui étaient thésaurisés dans les biens religieux pillés. Ce numéraire, qui est réinjecté dans l'économie, est un catalyseur de premier plan pour la mutation économique en cours. La masse monétaire globale augmente d'autant qu'avec l'affaiblissement du pouvoir central, de plus en plus d'évêques et de princes battent monnaie. Or la monétarisation grandissante de l'économie est un puissant catalyseur : les paysans peuvent tirer profit de leurs surplus agricoles et sont motivés pour accroître leur capacité de production par l'emploi de nouvelles techniques et l'augmentation des surfaces cultivables via le défrichage. L'instauration du droit banal contribue à cette évolution, car le producteur doit dégager suffisamment de bénéfices pour pouvoir verser le cens. Les châtelains réinjectent d'ailleurs ce numéraire dans l'économie, car l'un des principaux critères d'appartenance à la noblesse en plein structuration est d'avoir une conduite large et dispendieuse envers ses pendants (cette conduite étant d'ailleurs nécessaire pour s'assurer la fidélité de ses milites).
De fait, dans certaines régions, les mottes jouent un rôle pionnier dans la conquête agraire sur le saltus. En Thiérache, c'est « à l'essartage de terres revenues à la forêt qu'est lié le premier mouvement castral ». En Cinglais, région située au sud de Caen, les châteaux primitifs s'étaient installés aux confins des ensembles forestiers. Dans tous les cas, l’implantation castrale en périphérie du village est très courante. Ce phénomène s’insère dans un peuplement linéaire très ancré et ancien qui se juxtapose à des défrichements bien antérieurs au phénomène castral (datant probablement de l'époque carolingienne). Néanmoins, les chartes du nord de la France ont confirmé une activité d’essartage intensive encore présente jusqu’au milieu du XIIe siècle et même au-delà.
La motte castrale a pu être le point de départ d’une organisation ou d’une réorganisation villageoise, ou n’avoir entretenu aucun rapport étroit avec celle-ci. Les mottes castrales sont localisées au bout des villages comme si elles avaient servi de point de départ pour une mise en valeur du terroir. Certains systèmes castraux ne seraient, en dehors des résidences châtelaines, en particulier sur les marges des comtés, que des mottes de défrichement suivant les caractéristiques des « châteaux stratégiques » et dont les finalités politiques viseraient à la mise en culture des terres et même dans certains cas à l’établissement d’un village.
D'autre part, la seigneurie comme le clergé ont bien perçu l'intérêt de stimuler et de profiter de cette expansion économique : ils favorisent les défrichages et la construction de nouveaux villages, et ils investissent d'autant plus dans des équipements augmentant les capacités de productions (moulins, pressoirs, fours, charrues...) et de transports (ponts, routes...) que ces infrastructures permettent d'augmenter les revenus banaux, de prélever péages et tonlieu... De fait, l'augmentation des échanges entraîne la multiplication des routes et des marchés (le réseau qui se met en place est immensément plus dense et ramifié que ce qui pouvait exister dans l'Antiquité). Ces ponts, villages et marchés se construisent donc sous la protection d'un seigneur qui est matérialisée par une motte castrale. Le pouvoir châtelain filtre les échanges de toutes sortes qui s'amplifient à partir du XIe siècle. On voit de nombreux castra implantés sur les axes routiers importants, sources d'un apport financier considérable pour le seigneur du lieu. Pour la Picardie, Robert Fossier a remarqué que près de 35 % des sites localisables en terroirs villageois sont situés sur des voies romaines ou à proximité, et que 55 % des nœuds routiers et fluviaux possédaient des points fortifiés. Autrement dit, la motte n'est pas seulement une simple innovation architecturale, elle s'insère complètement dans la « grande révolution du Xe siècle » que connut l'Occident chrétien et en constitue un élément fondamental comme créateur d'un paysage nouveau.