La question de la propagation des ondes élastiques dans les milieux piézoélectriques est particulièrement importante dans la mesure où un très grand nombre d'applications de la piézoélectricité en tirent parti.
Dans un piézoélectrique, les propriétés électriques et élastiques étant couplées, il est en principe nécessaire de résoudre le problème en considérant conjointement les équations de l'élasticité et les équations de Maxwell. Le traitement de problème complet est parfois appelé « piézoélectromagnétisme ».
Dans la pratique, les ondes acoustiques que l'on considère ont des fréquences inférieures de plusieurs ordres de grandeurs à celles des ondes électromagnétiques. On se contente donc d'une approximation quasi-statique en complétant les équations classiques de l'élasticité par les équations de l'électrostatique. On néglige ainsi le rôle du champ magnétique.
Dans un solide piézoélectrique, la propagation d'une onde élastique de vecteur d'onde n est régie par une équation aux valeurs propres appelée équation de Christoffel :
où les ui sont les composantes du déplacement, ρ est la masse volumique du solide et Γik est la matrice de Christoffel
Afin de retrouver une forme analogue au cas purement élastique, on peut l'écrire :
où les constantes
La résolution de l'équation de Christoffel conduit à trois valeurs propres réelles et positives correspondant aux vitesses de propagation de trois ondes. On les obtient en résolvant
Les vecteurs propres correspondants donnent la polarisation des ondes. Celle des trois ondes dont la polarisation est la plus proche de la direction de propagation est dite quasi-longitudinale et les deux autres quasi-transverse. Dans certains cas particuliers, en général le long de directions de haute symétrie, on peut avoir des ondes purement longitudinale (onde de compression) ou purement transverse (onde de cisaillement).
L'existence de la piézoélectricité dans un cristal est liée aux symétries de la structure cristalline. En particulier, un cristal ne peut pas être piézoélectrique si sa structure possède un centre de symétrie (structure dite centrosymétrique).
De manière générale, on classe les cristaux suivant leurs symétries en 230 groupes d'espace regroupés en 32 classes cristallines. Il existe 21 classes non centrosymétriques, dont 20 sont piézoélectriques. Parmi ces classes piézoélectriques, 10 possèdent une polarisation électrique spontanée et sont dites polaires. Leur polarisation spontanée varie avec la température, ces cristaux sont donc pyroélectriques. Parmi les cristaux pyroélectriques enfin, certains sont dits ferroélectriques et se caractérisent par le fait qu'il est possible de renverser leur polarisation électrique permanente en appliquant un fort champ électrique dans le sens opposé.
32 classes cristallines | |||
---|---|---|---|
20 classes piézoélectriques | non piézoélectriques | ||
10 classes polaires pyroélectriques | non pyroélectriques | ||
ferroélectriques | non ferroélectriques | ||
ex : BaTiO3, PbTiO3 | ex : Tourmaline | ex : Quartz |
L'absence de centre de symétrie dans une structure s'explique parfois de manière naturelle par la géométrie. Dans le quartz par exemple, la disposition des ions positifs et négatifs conduit naturellement à la création d'un dipôle électrique lorsque la structure est déformée par une contrainte non hydrostatique. De même, dans les polymères PVDF, la symétrie est naturellement rompue par la substitution de deux atomes d'hydrogène par deux atomes de fluor, beaucoup plus électronégatifs, qui attirent à eux les charges électroniques négatives.
Dans d'autres cas, notamment les ferroélectriques, la brisure de symétrie met en jeu des phénomènes plus complexes. C'est notamment le cas des ferroélectriques modèles qui possèdent à hautes températures une structure cristalline centrosymétrique, non piézoélectrique. À basses températures, la structure de haute symétrie devient instable et le cristal bascule dans une phase de plus basse. L'énergie d'interaction entre dipôles devient prépondérante et favorise le décalage des ions en dehors de leur position de haute symétrie, et l'apparition d'un ordre ferroélectrique à longue portée.
Certains éléments purs cristallisent également dans des structures non centrosymétriques ; c'est le cas du tellure et du sélénium. La brisure de symétrie s'explique dans ce cas par une distorsion de Peierls : les électrons sont localisés en liaisons covalentes de manière dissymétrique autour des atomes.
La symétrie peut également être brisée en moyenne seulement à une échelle de longueur plus grande que celle de la maille cristalline. Ainsi, le silicium n'est pas piézoélectrique, mais un effet piézoélectrique a été mis en évidence dans le silicium poreux. De même, un effet piézoélectrique peut être provoqué par un couplage entre la polarisation et un gradient de déformation (flexoélectricité).
De manière générale, les méthodes ab initio visent à calculer les propriétés d'un matériau à partir de la seule connaissance de sa composition chimique.
Dans le cas des piézoélectriques, la plupart de ces calculs sont réalisés dans le cadre de la théorie de la fonctionnelle densité (DFT) dans l'approximation de la densité locale (LDA). Ces calculs ont longtemps buté sur plusieurs difficultés spécifiques aux matériaux ferroélectriques. En effet, les approximations classiquement utilisées dans les calculs ab initio sont connues pour introduire des biais qui peuvent fausser l'estimation des volumes. Dans la plupart des matériaux, ces erreurs de quelques pourcents sont insignifiantes, mais pas dans les ferroélectriques, extrêmement sensibles aux variations de volume (ou aux effets de la pression).
Les premiers calculs ab initio de coefficients piézoélectriques ont été publiés en 1989 et ont montré que ces théories permettaient de prédire l'apparition de la ferroélectricité.
Dans la pratique, les matériaux piézoélectriques sont bien souvent des matériaux hétérogènes (céramiques, composites, monocristaux ferroélectriques polydomaines). La compréhension des propriétés macroscopiques effectives passe par la compréhension du rôle exact de ces multiples interfaces présentes dans le matériau. On introduit alors une distinction entre les contributions intrinsèque et extrinsèque à l'effet piézoélectrique. La contribution intrinsèque désigne l'effet piézoélectrique du matériau considéré comme homogène ; les contributions extrinsèques sont toutes les contributions dues aux interfaces présentes dans la microstructure.
Les contributions extrinsèques sont particulièrement importantes pour les applications : elles sont à l'origine de non-linéarités, de dispersion, de vieillissement qui peuvent être autant de problèmes pour la conception et l'utilisation de dispositifs piézoélectriques.
Le problème général est rendu particulièrement ardu par la multiplicité des échelles de longueurs à prendre en compte. Sa résolution nécessite l'adoption d'un certain nombre d'hypothèses simplificatrices. En mécanique, pour les matériaux purement élastiques (non piézoélectrique), ce problème est du domaine de la théorie des milieux effectifs pour laquelle plusieurs méthodes d'homogénéisation ont été développées. Les méthodes classiques (problème d'Eshelby, approximations de Voigt et Reuss) peuvent être étendues aux cas piézoélectriques, mais ne peuvent pas prendre en compte certains effets aux interfaces, notamment la mobilité des parois de domaines.
Les méthodes de calcul par éléments finis, utilisées couramment par ailleurs dans la conception des dispositifs piézoélectriques, peinent à prendre en compte toutes les échelles de longueurs nécessaires dans le cas de matériaux hétérogènes désordonnés. Des méthodes par éléments finis multi-échelles ont cependant été proposées.
On utilise également des méthodes inspirées des méthodes utilisées pour les matériaux composites. Il est ainsi possible de trouver des solutions exactes au problème des structures lamellaires, particulièrement pertinentes dans le cas des ferroélectriques.