Prohibition des drogues - Définition

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Alternative à la prohibition

Dépénalisation

Appliquée dans certains pays, la dépénalisation vise à décriminaliser l'usage simple et la possession, tout en sanctionnant la vente et la production.

L'exemple le plus connu de dépénalisation est celui du cannabis aux Pays-Bas mais d'autres pays européens appliquent aussi cette politique.

Longtemps critiquée car supposée aboutir à une augmentation significative de la consommation du produit dépénalisé (suite à la banalisation du produit), son application aux Pays-Bas depuis 1976 n'a pas montré de hausse de la consommation hors de celle générée par le tourisme narcotique.

Cette solution, si elle respecte les conventions de l'ONU, ne résout pas, selon ses détracteurs, les problèmes d'approvisionnement et de mise en contact avec des milieux marginaux qu'implique la consommation du produit dépénalisé. Les détracteurs de cette politique avancent qu'elle ne fait que tolérer juridiquement les usagers socialement insérés.

Légalisation

La légalisation vise à autoriser la consommation et la vente via un contrôle par l'État de la production voire de la distribution.

Cette solution n'est actuellement appliquée dans aucun pays : soit les états n'ont pas légiféré sur la question soit ils ont adhéré aux conventions de l'ONU ; aucun pays n'a prononcé la légalisation de produits prohibés par ces conventions.
Les partisans de cette solution avancent qu'elle permettrait la mise en place de taxes, de normes de qualité et d'une meilleure information (les produits étant vendus avec une notice contenant les précautions d'usage comme pour n'importe quel produit), voire d'une réglementation du produit en termes de limitation d'âge comme c'est par exemple le cas, dans la plupart des pays, pour l'alcool.

Libéralisation

La libéralisation consiste à supprimer toutes les contraintes légales sur ces produits en vertu des droits fondamentaux des individus. C'est une position qui appartient à la philosophie libertaire et qui était défendue par Timothy Leary, par exemple.

Cette solution n'est actuellement appliquée dans aucun pays. Elle est en contradiction avec les conventions de l'ONU.

Controverse

La prohibition pose un débat contradictoire. D'un côté, elle protège le plus grand nombre de la rencontre avec un produit interdit et réduit les éventuelles conséquences néfastes dues à sa consommation. De l'autre côté, elle augmente les risques de décès dus à des produits frelatés et constitue un marché clandestin.

Cohérence

Des produits reconnus comme nocifs et accoutumants sont autorisés à la vente comme le tabac ou l'alcool. Les opposants à la prohibition affirment qu'il n'y a pas à interdire certains produits et pas d'autres sur ce qu'ils estiment être de simples raisons culturelles.

Les partisans de la prohibition considèrent que le tabac ou l'alcool sont déjà responsables de nombreux problèmes sanitaires qui ne plaident pas pour une politique plus libérale qui, selon eux, ne ferait qu'augmenter le nombre d'usagers de produits dangereux.

Selon une étude de l'Université de Zurich, la mise en place d'une politique libérale n'induirait pas une hausse de la consommation mais bien une baisse du nombre de nouveaux cas de toxicomanie.

Délinquance

Le sentiment d'enfreindre un interdit est un facteur poussant à la consommation de drogues, ce qui constituerait selon certains l'attrait des narcotiques.

Les sanctions légales généralement encourues pour l'usage ou la possession du produit ainsi que le contact avec des milieux délinquants pour se fournir le produit faciliterait les passages à l'acte en termes de délinquance.

Comme au temps de la prohibition de l'alcool aux États-Unis, trafiquants et usagers ont recours à la violence pour régler les litiges, puisqu'ils ne le peuvent au tribunal. Les populations non-usagers et non impliquées dans le commerce de drogues peuvent être victimes de règlements de comptes entre trafiquants.

L'aspect illégal du commerce de ces produits en augmenterait le prix car chacun des intervenants de la chaîne reliant le producteur au consommateur final intègre dans son prix de vente le risque d'être pris, ce qui pousserait à la délinquance les consommateurs cherchant à financer l'acquisition de stupéfiants.

Les populations non-usagers et non impliquées dans le commerce de drogues peuvent être victimes d'une agression ou d'un cambriolage perpétré par un toxicomane en manque.

Information

Selon certains auteurs et de nombreux acteurs de la réduction des risques, la prohibition nuit à la qualité, à la disponibilité et à l'objectivité des informations sur ces substances. Cette méconnaissance induirait des conduites à risques et ne permet pas une responsabilisation de l'usager.

À l'inverse, certains partisans de la prohibition avancent qu'une information sur un produit interdit est inutile voire incitatrice.

Libertés individuelles

Selon les opposants de la prohibition, ce n'est pas à l'État de décider de ce que les gens ont le droit de faire chez eux. Pour beaucoup, ils doivent être libres de faire ce qu'ils souhaitent de leur corps, à condition qu'ils ne fassent de tort à personne d'autre, en vertu des articles 4, 5 et 8 de la déclaration des droits de l'homme de 1789. L'usage de drogues est considéré comme un crime sans victime, par conséquent, l'État n'aurait aucunement le droit de l'interdire, ni de punir les consommateurs.

Cet argument est contesté par les défenseurs de la prohibition qui avancent qu'au-delà du choix personnel d'usage, il existe bien une conséquence sociale de ce choix en cas d'accident, notamment, via la prise en charge des soins et de leur remboursement par un système de sécurité sociale.

Résultat contesté de la politique de lutte anti-drogue

Les opposants de la prohibition s'appuient sur des exemples reconnus de liens étroits entre instabilité politique, corruption, criminalité, pauvreté, exploitation et production de drogue (mafia italienne, cartel colombien, triades chinoises, marché noir, financement du terrorisme, etc.) pour dénoncer les effets pervers de l'actuelle politique de lutte anti-drogue.

Ils dénoncent notamment le peu de résultats de cette politique comparé à son coût : à titre d'exemples, quatre milliards de dollars donnés par les États-Unis pour aider la Colombie à lutter contre la production de cocaïne sur la période 2000-2005 ; 25 milliards sur 25 ans selon l'organisation non gouvernementale Washington Office on Latin America dans son rapport de 2004 ; plus de 500 millions d'euros investis dans projets de développement alternatif dans des pays producteurs de drogue par l'Union européenne en 2005.

Aux États-Unis, selon l'organisation non gouvernementale Washington Office on Latin America dans son rapport de 2004, le nombre de consommateurs est resté plutôt stable voire en augmentation après 25 ans de lutte anti-drogue et les prix des produits auraient diminué augmentant la facilité d'accès à ces produits.

Certains auteurs avancent que les chiffres de saisie de stupéfiants sont volontairement annoncés à partir du prix à la revente à l'unité afin de démontrer les résultats de la lutte anti-drogue alors que le coût réel pour le trafiquant est bien moindre : il ne perd pas le rapport supposé de la revente à l'unité mais l'investissement en gros de départ.

Suite à ces constats de nouvelles politiques de lutte anti-drogue voient le jour comme en Bolivie où le gouvernement d'Evo Morales lance en juin 2006 un vaste programme sur cinq ans luttant contre la pauvreté et visant notamment à réhabiliter l'image traditionnelle de la coca afin de détourner les producteurs du marché de la drogue.

Théorie de l'escalade (« Stepping-stone theory »)

La « théorie de l'escalade » avance que la consommation d'un produit psychotrope entraînerait une consommation vers des produits de plus en plus nocifs selon le schéma : alcool > tabac > cannabis > cocaïne > héroïne.

Elle apparut suite à la publication d'un sondage réalisé aux États-Unis en 1975 où 26% des usagers de cannabis en venaient à consommer de l'héroïne, chiffre largement contredit depuis ; par exemple, l'OFDT dans ces chiffres de 2002 estime que seulement 3% à 5% des usagers chroniques de cannabis passeront à un produit induisant une dépendance majeure. Cette théorie a été mise à mal d'abord par le rapport Le Dain paru en 1972 au Canada puis par la réalité des chiffres de terrain des pays ayant assoupli leur loi (Pays-Bas) et où, malgré une dépénalisation de l'usage, aucune statistique n'a pu confirmer cette théorie.

Cette théorie a été réactualisée et depuis le début des années 2000, c'est le tabac qui est pointé comme une première étape menant à l'addiction du fait du mélange tabac/cannabis fumé par la grande majorité des usagers.

Cette théorie est défendue par les défenseurs de la prohibition qui prônent une interdiction ferme et une répression plus stricte afin d'enrayer cette escalade.

Théorie de la porte d'entrée (« Gateway theory »)

La « théorie de la porte d'entrée » avance que le fait de rechercher un produit interdit pousserait à fréquenter des milieux marginaux (délinquance, banditisme) constituant ainsi une « porte d'entrée » dans ces milieux.

Cette théorie est défendue autant par les défenseurs de la prohibition qui prônent une interdiction ferme et une répression plus stricte afin de fermer cette porte que par les opposants à la prohibition qui prônent une dépénalisation permettant de contrôler la vente du produit et de faire cesser le marché noir.

Certains défenseurs de la prohibition estiment qu'un assouplissement des législations en vue de contrôler la vente conduirait à une augmentation de la délinquance par la nécessaire reconversion des dealers.

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