Psychologie évolutionniste - Définition

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Introduction

La psychologie évolutionniste est un courant de la psychologie cognitive et de la psychologie culturelle, dont l'objectif est d'expliquer les mécanismes de la pensée humaine à partir de la théorie de l'évolution biologique. Elle repose sur l'hypothèse fondamentale que le cerveau, tout comme les autres organes est le produit de l'évolution, et constitue donc une adaptation à des contraintes environnementales précises auxquelles ont dû faire face les ancêtres des hominidés.

Contrairement à la psychologie cognitive classique qui tente de donner des explications évolutionnistes aux résultats expérimentaux, la psychologie évolutionniste tente de valider des hypothèses évolutionnistes par une démarche expérimentale.

Cadre théorique

En 1973, le prix Nobel de physiologie ou médecine remis à Konrad Lorenz, Karl von Frisch et Nikolaas Tinbergen pour «l'organisation et la mise en évidence des modes de comportement individuel et social», seul prix Nobel jamais remis à des spécialistes du comportement, a eu l'effet d'une bombe sur la psychologie mondiale. Désormais, il n'était plus question de négliger la part de l'instinct chez l'homme.

Le modèle de la tabula rasa, promus par le behaviorisme, que Konrad Lorenz combattit violemment toute sa vie, venait de tomber définitivement. La psychologie cognitive naissante ne pouvait plus ignorer la méthode éthologique ; tenter de décortiquer l'imbrication subtile de l'inné et de l'acquis devenait une obligation scientifique que les chercheurs de par le monde abordèrent de front.

La psychologie cognitive étudia donc les fonctions cognitives primitives dont les phylogenèses trouvaient leurs origines au cours de l'évolution des animaux, des mammifères et des primates. La méthode éthologique de comparaison verticale (voir instinct) permettait clairement d'établir les origines phylogénétiques des comportements, ex.: nous héritons des mécanismes de la marche de nos ancêtres reptiles, du comportement de la tétée de nos ancêtres mammifères, celui de la caresse de nos ancêtres primates, etc.

Par contre, la méthode éthologique de comparaison verticale échouait lamentablement en ce qui concerne les fonctions cognitives supérieures humaines ne possédant aucun équivalent véritable chez nos ancêtres simiens. L'inexistence d'autre représentant du genre Homo sur la planète limitait donc de beaucoup cette approche. Cependant, l'apparition de la sociobiologie avec la réforme complète de la sélection naturelle qu'elle provoqua (sélection de parentèle , sélection de groupe et sélection stratégique) de l'écologie comportementale et de la mathématisation de la sélection sexuelle, allait offrir un tout nouveau cadre théorique.

Ces analyses mathématiques complexes permettent d'expliquer l'essence (l'origine phylogénétique) des comportements des animaux et de réaliser des prédictions théoriques sur l'existence de tel ou tel comportement dans la nature. Il est également possible de relier des variables comportementales entre elles comme, par exemple, la durée de la période de séduction et le temps d'élevage de la progéniture. L'évolution des comportements n'est plus simplement la sélection d'accidents historiques mais une sélection dirigée par des contraintes logico-mathématiques ne permettant pas l'existence de n'importe quoi mais seulement de certaines solutions à ces contraintes. Ces théories jouèrent le même rôle en matière comportementale que la physiologie et la biophysique en ce qui concerne les contraintes sur l'existence de telle ou telle structure biologique dans la nature.

La psychologie évolutionniste (PE) est née à la fin des années 1980 des travaux de Gerd Gigerenzer, John Tooby et Leda Cosmides. L'inspiration cognitiviste se retrouve dans le fait que la PE tente d'expliquer les comportements et les phénomènes mentaux à partir de mécanismes qu'il s'agit de décomposer. Par contre, des postulats sur l'existence de tel ou tel mécanismes et leurs fonctionnements réels sont préalablement posés à partir d'hypothèses et de déduction écoéthologique et sociobiologique.

Différences avec la sociobiologie et l'écoéthologie

La PE se distingue de ceux-ci sur deux points :

  1. La PE s'intéresse principalement à l'espèce humaine.
  2. La PE insiste sur le fait que la plus grande partie de l'évolution humaine s'est déroulée dans des circonstances qui n'existent plus aujourd'hui principalement pendant le pléistocène, et que les comportements et états internes qui nous caractérisent aujourd'hui ont, en fait, été sélectionnés pour être adaptés à un monde qui n'existe plus : il y a « mismatch » entre cet environnement de l'adaptation évolutive et l'environnement contemporain de l'espèce humaine.

Nous devons à Konrad Lorenz ce concept ; il fut, par exemple, le premier à postuler que le plaisir à manger du sucre et des graisses est né de la rareté de ces ressources énergétiques dans l'environnement préhistorique. Or, aujourd'hui, ces denrées sont facilement accessibles et ce penchant naturel pour le sucre et les graisses peut avoir des conséquences délétères (anti-adaptatives) dans l'environnement actuel (obésité, diabète).

Différences avec la psychologie cognitive

L'approche PE diffère de l'approche traditionnelle en psychologie cognitive sur différents points :

  1. La PE s'intéresse d'avantage à la phylogénèse des processus cognitifs qu'à leurs fonctionnements neuro-biologiques.
  2. La PE tente de découvrir et de prédire l'existence et le fonctionnement de processus cognitifs en utilisant la psychologie comparée, notamment des primates et l'analyse sociobiologique et écoéthologique.
  3. Les hypothèses, justifiant une expérience, sont toujours basées sur des arguments évolutionnistes.
  4. La PE propose d'expliquer les mécanismes psychologiques selon deux catégories de processus : les processus spécifiques à chaque domaine (domain-specific) et les processus généraux (domain-general). Les mécanismes en œuvre pour traiter un problème récurrent dans l'histoire évolutive seront dits domain-specific. Ainsi, l'importance de détecter un tricheur dans une interaction sociale serait à l'origine d'un processus spécifique qui ne s'appliquerait pas lorsqu'il s'agit de détecter la violation d'une règle non-sociale, comme l'illustre la tâche de Wason.

Par contre, les modèles sont testés en utilisant une démarche expérimentale dans la pure tradition de la psychologie cognitive. Par conséquent, ces différences ne constituent pas une frontière véritable entre ces deux approches en psychologie. En effet, seul le résultat expérimental compte en dernière instance.

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