Science et Méthode est un livre d'Henri Poincaré dans lequel l'auteur réfléchit au rôle de la science et développe ses conceptions de la physique et des mathématiques. Cet ouvrage reprend et développe certains thèmes déjà présents dans la Science et l'Hypothèse, et dans la Valeur de la Science.
Poincaré définit quel doit être le rôle du savant, et quel sens il faut donner à l'utilité de la science. Il récuse l'utilité immédiate de l'industriel qui ne voit dans la science qu'une application pratique. Il récuse également une science qui ne serait guidée que par des considérations morales. Le savant doit également agir pour la science elle-même, guidé par son propre intérêt, et par les questions qu'il se pose. Le choix des faits qu'il étudie ne doit pas cependant être dicté par un simple caprice. Il doit sélectionner ceux qui lui permettront de dégager les lois les plus générales possibles. C'est en ce sens seulement que la science sera utile. L'étude portera d'abord sur des faits simples permettant de dégager une règle adaptée à ces faits. Après cela, son attention se portera sur les exceptions à la règle. Ces exceptions jugées marginales en premier lieu, prennent alors toute leur importance. De nouvelles questions se posent, appelant de nouvelles réponses. Les considérations précédentes doivent s'appliquer également aux mathématiques, qui, au-delà du rôle qu'elles peuvent apporter au physicien ou à l'ingénieur, doivent également réfléchir sur elles-mêmes sous peine de se stériliser.
En mathématiques, la fin du XIXème est caractérisée par une recherche de la rigueur conduisant au formalisme axiomatique. Tout en reconnaissant cette démarche, Poincaré la juge néanmoins d'un intérêt limité et il considère le travail des logiciens comme secondaire. Il estime plus importantes les découvertes mathématiques, guidées par l'intuition, et adopte une position qu'on peut considérer proche du constructivisme. En géométrie, il a conscience du développement que va prendre la topologie, dénommée alors sous le nom d'Analysis situs et dont Riemann est un précurseur.
Il décrit le processus de l'invention en mathématiques. Un long et ardu travail peut sembler se révéler stérile, mais être suivi par une découverte survenant fortuitement au cours d'une illumination soudaine. C'est à cette occasion que Poincaré cite l'épisode célèbre relatif aux fonctions fuchsiennes. Selon Poincaré, il y a un travail inconscient, formant à notre insu, des combinaisons diverses et parmi elles, émergent à notre conscience celles qui affecteront le plus notre sensibilité par leur beauté et leur harmonie.
Poincaré s'intéresse également au hasard, et poursuit les réflexions qu'il a déjà menées sur la question dans La Science et l'Hypothèse. A cette occasion, il évoque les phénomènes de sensibilité aux conditions initiales, connus dans la deuxième moitié du XXème sous le nom d'effet papillon, sujet sur lequel il a travaillé dans le domaine astronomique.
Les années 1900 sont en physique des années de profondes remises en cause. Poincaré dresse une liste des divers sujets posant problème : étude de la radioactivité, question de la validité de la conservation de l'énergie qui en découle, identification de la nature des rayonnements radioactifs, difficulté de mesurer la masse des particules émises lors de la désintégration radioactive, dépendance éventuelle de la masse avec la vitesse, comparaison entre la masse inertielle et la masse gravitationnelle, étude du résultat négatif de l'expérience de Michelson et Morley, considérations sur les rayons cathodiques ou les rayons X, difficulté de synchroniser deux horloges, réflexions sur la notion de contraction des longueurs proposée par Lorentz dans le sens du mouvement pour concilier mécanique et électromagnétisme, validité ou non du principe d'action et de réaction et du principe de relativité, limitation de la vitesse d'un corps par celle de la lumière, question du mouvement du périhélie de Mercure, nature de la force de gravitation. Le texte de Poincaré est un témoignage intéressant de l'état de la physique et des questions que se posaient les physiciens de l'époque.