Théorème d'impossibilité d'Arrow - Définition

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Énoncé simplifié

Le théorème d'Arrow est connu sous la forme suivante.

Pour au moins trois options de choix et deux individus, il n'existe pas de fonction de choix social satisfaisant les propriétés suivantes :

  1. Universalité : la fonction de choix social doit être définie pour tout profil de préférences logiquement possible. Cela signifie qu'on ne peut éliminer le choix de certains individus du groupe des individus qui déterminent le choix collectif.
  2. Non-dictature : il n'existe aucun individu pour lequel la liste de ses choix personnels coïncide avec la fonction de choix social, indépendamment des préférences des autres ;
  3. Unanimité : lorsque tous les individus ont les mêmes préférences, la fonction de choix social doit associer ces mêmes préférences à la société.
  4. Indifférence des Options Non-Pertinentes : le classement relatif de deux options ne doit dépendre que de leur position relative pour les individus et non du classement d'options tierces ; si l'on ne considère qu'un sous-ensemble d'options, la fonction ne doit pas aboutir à un autre classement de ce sous-ensemble.

Dans une autre version du théorème, l'unanimité peut être remplacée par les deux hypothèses suivantes :

  1. Monotonie : un individu ne doit pas pouvoir faire diminuer le classement global d'une option en la classant plus haut.
  2. Souveraineté : aucun choix social ne doit être impossible a priori.

Variante : le théorème de Gibbard-Satterthwaite

Alors que le théorème d'Arrow s'intéresse à la question de déterminer une fonction de choix social visant à dresser une liste de préférences collectives à partir des listes des préférences individuelles, une question plus fréquente consiste à choisir collectivement un unique élu à partir des préférences individuelles entre plusieurs candidats. Tel est l'objet du théorème de Gibbard-Satterthwaite. Celui-ci énonce le résultat suivant relatif à une procédure de désignation du gagnant à une élection :

  • Chaque individu de la population classe des candidats à une élection selon un ordre de préférence personnelle.
  • On suppose que chaque candidat peut se trouver élu si la population choisit de façon adéquate son ordre de préférence. Autrement dit, la procédure de désignation n'élimine aucun candidat
  • On suppose qu'il y a au moins trois candidats.
  • La procédure de désignation est dite manipulable s'il existe un votant i dont la liste de préférence est R et telle que, s'il décide de changer son choix en R' qui ne correspond pas à ses préférences, alors l'élu choisi après son nouveau choix sera mieux placé dans ses préférences que l'élu choisi avec ses préférences initiales.

Alors la procédure de désignation est non manipulable si et seulement si elle est dictatoriale.

Dans la pratique, les procédures de désignation sont manipulables, et il est fréquent qu'un votant ayant les préférences A > B > C vote pour B afin être sûr de ne pas voir C élu.

Relaxation des conditions

Si ce théorème ne gêne pas les partisans de régimes dictatoriaux (qui sont prêts à faire confiance à un « homme fort » pour mener raisonnablement le peuple), et gène peu les libéraux (qui récusent l'idée de transformer des préférences individuelles en préférence collective), il est en revanche une épine dans le pied des partisans de la démocratie.

Le théorème a suscité en conséquence une abondante réflexion sur les procédures envisageables et les conditions moins fortes qui restent compatibles entre elles.

En travaillant par élimination, on conçoit ne pas pouvoir admettre qu'une procédure de vote puisse

  • rester indéfiniment indécise,
  • être dictatoriale,
  • être non monotone,
  • avoir un résultat prédéterminé (IONP)

Les propriétés d'universalité et d'IONP sont-elles raisonnables? Oui, au sens qu'il serait raisonnable de les accepter. Non, au sens qu'il serait déraisonnable de les exiger : Ces deux propriétés ne sont ni basiques, ni élémentaires. En ce qui concerne le fait d'avoir un résultat prédéterminé, on peut concevoir que le résultat soit partiellement prédéterminé : par exemple, on peut ne pas admettre l'élimination d'un parti politique même si un vote en décidait. On fait alors intervenir des choix d'un niveau différent de celui du choix d'un système de vote : le théorème n'envisage pas le côté moral ou admissible des options; il traite juste de la procédure transformant les options de départ en décision finale. Il reste donc non admissible qu'une procédure de vote puisse exclure a priori des options.

Seule l'indifférence aux options non pertinentes (IONP) pouvait raisonnablement être affaiblie. Nous ne la pratiquons d'ailleurs en général pas nous-mêmes dans nos choix individuels, faiblesse connue des vendeurs et exploitée par eux (méthodes dite du bait and switch - on appâte le chaland avec des produits à bas prix... puis on propose un autre article de 'meilleure' qualité à marge plus importante)

Elle revient à dire, dans le cas du choix d'un projet selon plusieurs critères, que proposer un projet nouveau ne doit pas intervenir dans le classement existant des autres projets. Dans le cas d'une élection, elle revient à dire que l'apparition ou le désistement d'un candidat ne doit pas intervenir sur ce que nous pensons des autres. Nous sommes habitués à des systèmes électoraux qui violent cette condition, sans que cela choque trop. L'électeur est parfois poussé au « vote utile », ce qui implique qu'il doit lui-même deviner quelles sont les options pertinentes, et éliminer celles qui ne le sont pas.

En fait, cette condition IONP se traduit par le fait que, seule, l'option finalement retenue est pertinente, l'introduction ou la suppression de toutes les autres étant sans effet sur le résultat final. Cela parait un peu fort.

Il est apparu qu'on pouvait envisager de remplacer cette condition par une condition moins forte : l'indifférence aux options les moins pertinentes (IOMP). On retient comme options pertinentes les membres du plus petit ensemble qui battent, dans les matchs deux à deux, toutes les options hors de l'ensemble (ensemble de Smith). Ainsi et par exemple, Si A bat B, B bat C et C bat A, mais que A, B et C battent toutes les autres options, l'ensemble de Smith est constitué de A, B et C, et représente les options qui ont une chance de l'emporter. Les autres options constituent les options les moins pertinentes.

Avec cette définition plus lâche, certaines méthodes de Condorcet vérifient le critère.

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