Son aire de répartition est très étendue, couvrant un peu plus de 13 millions de kilomètres carrés, et sa population est nombreuse, comptant entre 43 000 et 105 000 couples rien qu'en Europe, et une population mondiale de 300 000 à 1 500 000 individus. Sur l'ensemble de son territoire, l'espèce ne connaît pas de déclin numérique supérieur à 30 % en 10 ans ou en trois générations, et est donc classé par l'IUCN en LC (préoccupation mineure).
Pays aux plus grosses populations de craves à bec rouge | |
---|---|
|
|
Néanmoins, l'espèce est localement menacée, comme au niveau européen où elle est considérée « vulnérable ». En effet, bien que les effectifs de France, de Grande-Bretagne et d'Irlande soient maintenant stables et que l'on compte entre 12 265 et 17 370 couples reproducteurs, il n'y a plus qu'en Espagne que l'espèce ait encore une répartition étendue. Les autres aires de nidification d'Europe ont été fragmentées et isolées, principalement en raison de la diminution de l'agriculture traditionnelle pastorale. En France, par exemple, on observe une diminution de l'aire de répartition dans le Massif central et les Alpes occidentales. Plus grave, au cours des XXe et XXIe siècles, l'espèce a complètement disparu d'Autriche, s'est raréfiée au Portugal, en Italie et autour de la Manche (côtes anglaises, écossaises et irlandaises).
En plus de l'enfrichement et de la disparition des pâtures, l'espèce est également menacée, et de manière non négligeable, par d'autres activités humaines. Les craves peuvent être dérangés au nid ou lors de leur alimentation, par les promeneurs ou les grimpeurs. Par exemple, une étude sur l'île d'Ouessant a montré que l'oiseau pouvait être dérangé par les touristes dans 97 % de sa zone d'alimentation, ce qui se répercute également sur le taux de réussite des couvées.
En Espagne, le Crave à bec rouge a récemment étendu sa répartition en utilisant de vieux bâtiments, avec 1 175 couples reproducteurs dans 9 716 km2 étudiés. Ces nouveaux sites de nidification sont habituellement situés à la périphérie de la zone originale de répartition, montagnarde. Cependant, les populations installant leurs nids dans les bâtiments sont menacées par les perturbations et persécutions humaines, et la destruction de ces bâtiments. Des fossiles de craves et de chocards ont été trouvés dans les montagnes des îles Canaries. L'extinction locale du Chocard à bec jaune et la gamme réduite du Crave à bec rouge dans les îles peuvent être dues au changement climatique ou à l'activité humaine.
Le Crave à bec rouge est également emblématique du comté de Cornouailles, si bien que son ancienne appellation anglaise, encore très ancrée, était Cornish Chough, signifiant approximativement Crave de Cornouailles. Il apparaît d'ailleurs sur le blason du duché, et du Cornwall County Council. Il a pourtant temporairement disparu de ce comté au milieu du XXe siècle, après une dernière reproduction en 1947 aux Sorlingues, avant d'y réapparaître en 2001. Le Crave à bec rouge figure aussi sur le blason de la ville canadienne de Cornwall.
Une légende cornique raconte que le Roi Arthur ne serait pas mort mais qu'il aurait été transformé en Crave, et que par conséquent tuer cet oiseau porterait malheur. Les pattes et le bec rouge de l'oiseau rappelleraient la fin sanglante du roi.
Jusqu'au XVIIIe siècle, le Crave à bec rouge a été associé à la pyromanie, et décrit par William Camden comme incendaria avis, « Souvent il apporte en secret des brindilles enflammées, mettant le feu aux maisons ». Daniel Defoe connaissait également cette histoire :
« It is counted little better than a kite, for it is of ravenous quality, and is very mischievous; it will steal and carry away any thing it finds about the house, that is not too heavy, tho' not fit for its food; as knives, forks, spoons and linnen cloths, or whatever it can fly away with, sometimes they say it has stolen bits of firebrands, or lighted candles, and lodged them in the stacks of corn, and the thatch of barns and houses, and set them on fire; but this I only had by oral tradition. » | « Il est à peine mieux considéré qu'un oiseau de proie, car il a un appétit féroce et il est très malicieux ; il volera et emportera tout ce qu'il trouvera ça et là dans les maisons, ce qui n'est pas trop lourd, même non adapté à sa nourriture ; comme les couteaux, les fourchettes, les cuillères et morceaux de tissu, ou tout ce avec quoi il peut s'envoler, parfois on dit qu'il vole des morceaux de charbons ardents, ou des bougies allumées, et les place dans les meules de blé, la chaume des granges et des maisons, et y met le feu ; mais c'est seulement ce que j'ai eu par transmission orale. » |
On retrouve trois craves sur les armoiries de l'archevêque Thomas Becket, et ils sont donc quelquefois appelés « beckits » en héraldique, pour créer un jeu de mots. En raison de sa relation au saint, la ville de Cantorbéry a également des craves à bec rouge sur son blason.
L'oiseau pourrait même se laisser apprivoiser, apprécié de l'homme pour son intelligence. La détention de ces oiseaux est en revanche interdite en France.
L'oiseau figure sur les timbres-poste des pays suivants : Bhoutan (1995 et 1998), Gambie (2000), Île de Man (1978 et trois timbres différents en 2006), Turkménistan (2002) et Yougoslavie (1972).