La loi de Titius-Bode a une exception claire : Neptune/Pluton, et un résultat ambigu : la ceinture d'astéroïde.
Les partisans de la loi de Titius-Bode proposèrent de considérer que la loi avait été vraie par le passé, et qu'une perturbation a modifié l'agencement des planètes. On proposa donc que la ceinture d'astéroïde soit en fait les débris d'une ancienne planète (Phaéton).
De même, pour résoudre le problème posé par Neptune et Pluton, on proposa que Neptune ait anciennement été à la place où se trouve actuellement Pluton, Pluton étant à l'époque sa lune. Différentes hypothèses pouvaient expliquer ce mouvement, par exemple l'action de l'hypothétique étoile Némésis.
Finalement, ces propositions ne tiennent pas. La ceinture d'astéroïde tout entière ne comprend pas assez de matière pour former une planète. Quant à Neptune, les travaux d'analyse sur le passé du système solaire ont montré qu'elle se trouvait autrefois non pas plus loin du Soleil, mais beaucoup plus près, plus proche même qu'Uranus, qui elle-même était plus proche que sa position actuelle.
Il apparaît donc que la loi de Titius-Bode n'est pas un bon instrument pour étudier le passé de notre système. De plus, la principale piste d'explication de cette loi est de montrer qu'elle génère un système stable. Il n'est donc pas cohérent de supposer qu'elle ait été plus respectée par le passé que maintenant.
Il est en revanche impossible d'évaluer à quel point la loi sera vérifiée dans le futur
Lors de sa publication originale, la loi était vérifiée par toutes les planètes connues, de Mercure à Saturne, avec une lacune entre les quatrième (n = 3) et cinquième (n = 5) planètes. Cette loi était alors considérée comme intéressante mais sans grande importance. La découverte d'Uranus dont l'orbite respecte la loi, la validera aux yeux d'une grande partie de la communauté scientifique.
Mettant à profit cette nouvelle crédibilité, Bode poussera à la recherche de la planète intermédiaire manquante (n = 4), ce qui conduira à la découverte de (1) Cérès, astéroïde récemment reclassé en planète naine.
Urbain Le Verrier et John Couch Adams utiliseront ensuite cette loi comme première hypothèse pour la distance de la planète hypothétique Neptune, imaginée pour expliquer les perturbations d'Uranus.
Cette valeur de 38,8 est assez mauvaise et correspond plutôt à l'orbite de (134340) Pluton (qui, depuis 2006 n'est plus considérée comme une planète, mais comme une planète naine).
Planète naine | Demi-grand axe | Périphélie | Aphélie | Excentricité |
---|---|---|---|---|
(134340) Pluton | 39,48 | 29,65 | 49,31 | 0,25 |
(90377) Sedna | 525,86 | 76,25 | 975,47 | 0,86 |
(136199) Éris | 67,67 | 37,83 | 97,51 | 0,44 |
Les objets supplémentaires découverts après Pluton firent l'objet de tentatives d'intégration dans Titius-Bode. Certains partisans de la loi de Titius-Bode s'enthousiasmèrent en soulignant qu'avec une distance de 76,1, Sedna était exactement là où la loi imposait d'être à la dixième planète. L'inconvénient est que cette distance est en fait le périhélie, alors que le demi-grand axe de Sedna vaut 505,7.
De nos jours, les astronomes regardent la loi de Titius-Bode comme une curiosité, sans être un mystère majeur de la physique. Il y a débat entre ceux qui pensent que le nombre trop faible d'objets impliqués et la forme arbitraire de la loi permettent de conclure à une simple coïncidence, et ceux qui pensent qu'il reste une explication à chercher. En effet, le fait que la loi cesse d'être vraie à une certaine distance ne veut pas forcément dire qu'il n'y a pas d'explication à chercher — il faut simplement rendre compte de cette limite.
Les dernières théories expliquent la formation des planètes comme la conséquence de mécanismes de résonance qui créeraient des zones orbitales stables lors de la création des systèmes solaires. Or l'existence de ces configurations stables implique une diminution des axes de liberté du système planétaire. Il est donc alors probable de trouver une loi liant les périhélies. Une loi comme celle de Titius-Bode pour notre système planétaire, mais qui ne s'appliquerait peut être pas dans les autres.
En l'absence d'explication théorique incontestée, le débat demeure. Si le phénomène peut être inexpliqué sans que cela contredise les lois de la physique, c'est parce que le problème à trois corps n'a pas de solution calculable. Donc, même si on connaît les lois qui gouvernent les mouvements des planètes, on ne peut pas prédire pour autant avec certitude l'agencement qu'elles doivent adopter.
C'est pour cela que New Scientist ne considère pas cette loi comme un mystère majeur du système solaire. En comparaison, le fait que la Lune et le Soleil ont le même diamètre apparent depuis la Terre a été classé comme tel.