Port-Royal-des-Champs - Définition

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Le site de Port-Royal au XVIIIe siècle

Le pigeonnier du XIIIe siècle, un des rares vestiges du monastère

Dès sa destruction, le site de Port-Royal devient un lieu de pèlerinage et de mémoire. Les habitants des villages alentour viennent sauver de la destruction ce qui peut l’être. De nombreux éléments architecturaux sont ainsi réutilisés dans les alentours. Le transport des ossements des religieuses et des proches de Port-Royal, lors de la destruction, a été tellement rapide qu’il reste aux fidèles du monastère de nombreuses « reliques » à collecter. Ainsi, dans son Manuel des pélerins de Port-Royal publié en 1767, l’abbé Gazaignes décrit la scène : « Les cahots que firent ces sortes de voitures, furent cause que plusieurs parties de ces précieux restes tombèrent le long du chemin, et que des Passants les ayant trouvés, les ont enterrés sur le chemin même ». Cela permet donc au site de garder un caractère sacré qui lui amène des pèlerins de façon régulière.

Le site connaît une constante dégradation. Augustin Gazier écrit que « les ruines de l’abbaye furent longtemps une sorte de carrière où l’on venait chercher des pierres à bâtir ; les buissons et les ronces finirent par les envahir, si bien qu’au début du XIXe siècle il était impossible de retrouver la place exacte de l’église et du sanctuaire ».

Alors que la présence physique (par ses habitants et ses pierres) de Port-Royal a cessé, le souvenir prend le relais. Ainsi commence la seconde histoire de Port-Royal, celle de son inscription dans la mémoire collective.

Dès avant la destruction du monastère, Madeleine Boullogne, peintre morte en 1710, a représenté les différentes parties du monastère en une quinzaine de tableaux, d’un style réaliste et assez naïf. Magdeleine Horthemels a reproduit ses gouaches en gravures, qui après la destruction du monastère ont eu un grand succès. D’abord saisi par la police, l’album est rendu par le lieutenant de police d’Argenson, et peut ainsi être vendu.

Une grande partie des manuscrits de Port-Royal a été récupérée, juste avant l’expulsion des religieuses, par Marguerite de Joncoux, une laïque amie de la mère du Mesnil. Elle put les faire sortir du monastère et les conserver. Grâce à son action, ces manuscrits ont ensuite été remis à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, puis à la Bibliothèque nationale.

Les tableaux, eux, sont pour la plupart emmenés au monastère de Port-Royal de Paris. Le grand tableau de la Cène de Philippe de Champaigne est replacé sur l’autel de la chapelle parisienne, pour laquelle il avait été conçu. Le tableau appelé les Religieuses est placé dans le chapitre des religieuses. Mais la plupart des portraits sont entreposés dans les greniers parce qu’ils n’intéressent personne, ce qui permet de les sauvegarder. Un fidèle de Port-Royal, Jean-Philippe Gaspard Camet de La Bonnardière (un des fondateurs de la Société de Port-Royal au début du XIXe siècle), peut ainsi les acheter pour un prix très modique pendant la Révolution, lors de la vente des biens de l’abbaye parisienne comme « biens nationaux ».

Durant tout le XVIIIe siècle, les fidèles du jansénisme, qu’ils soient convulsionnaires ou non, viennent en pèlerinage sur les ruines. Le domaine appartient en droit au monastère de Port-Royal-de-Paris mais les religieuses ont abandonné les ruines. Elles ne font que tirer les ressources des terres agricoles. Les pèlerinages ont donné lieu à de nombreux écrits déplorant la ruine du monastère. Les titres en sont évocateurs : Gémissements sur les ruines de Port-Royal, par exemple. Les nombreux « manuels de pèlerinage », édités du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle, témoignent également de cette vivacité du souvenir à Port-Royal.

Dès 1710 en fait, la littérature s’empare de la mémoire de Port-Royal et donne des textes qui ont pour but de continuer le souvenir du monastère, même si celui-ci n’existe plus physiquement. C’est avec les quatre livres attribués à l’abbé Jean-Baptiste Le Sesne d’Étemare, et intitulés Gémissements d’une âme vivement touchée de la destruction du saint monastère de Port-Royal des Champs que commence vraiment l’histoire littéraire de Port-Royal. La publication de ces ouvrages suit les derniers soubresauts de l’histoire de Port-Royal, et sont donc nourris de l’indignation du témoin. Mais ils sont ensuite plusieurs fois réédités, et remaniés au gré de l’évolution du jansénisme au XVIIIe siècle. Le souvenir de Port-Royal est donc nourri et mélangé avec la vision convulsionnaire du monde.

Dans le sillage de l’abbé d’Étemare, de nombreux opuscules sont diffusés, afin d’entretenir le souvenir et d’aider au pèlerinage à Port-Royal.

Le site, bien que déserté par les religieuses, n’en reste pas moins habité. Les Granges (en haut du plateau) sont habitées par un agriculteur qui travaille pour le compte du monastère de Port-Royal de Paris, qui tire une grande part de ses revenus des terres de Port-Royal des Champs.

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