Deux types de facteurs de risques
Facteurs de risque immédiat
Ils sont liés :
- à des facteurs directement associés aux propriétés intrinsèques du pathotype ou des sous-types concernés. Il faut se rappeler que le virus pandémique pourra être un variant du H5N1 ou un tout autre sous-type émergeant d'une recombinaison génétique, voire le résultat d'une mutation d'un autre sous-type grippal (ce qui depuis 2005 semble de moins en moins probable étant donné que les souches de H5N1 en Asie tendent à remplacer celles d'autres sous-types sur son aire de répartition.
Un calcul de risque fait par l'épidémiologiste britannique Ferguson (revue Science, 14 mai 2004), estimait en 2004 qu’il faudrait 600 cas humains pour que la probabilité d'apparition d'un H5N1 adapté à l'homme atteigne 50 %, mais outre qu'il ne s'agit que d'une probabilité mathématique, un certain nombre de morts ou de malades de grippe aviaire à H5N1 HP n'ont probablement pas été identifiés en Asie (Indonésie en particulier) ; soit qu'il s'agisse de cas asymptomatiques soit qu'ils aient échappé aux épidémiologistes parce que confondus avec des morts par autres maladies. De plus cette évaluation théorique du risque n'intègre pas le risque de recombinaison génétique entre deux sous-types viraux dans un creuset animal, qui pourrait même maintenant être le chat puis qu'il s'est expérimentalement montré sensible à un virus de la grippe saisonnière, et qu'expérimentalement et dans la nature il s'est montré sensible au H5N1, avec capacité de guérison spontanée (voir Le chat et la grippe, la grippe du chien). Il faut reconnaitre que l'évaluation mathématique du risque est aujourd'hui impossible faute de connaissances écoépidémiologiques suffisantes et étant donné le nombre des variables, humaines notamment ; - à des prédispositions génétique des malades. Il semble que certains gènes humains prédisposent à l'infection par le H5N1 HP, et peut-être à une réaction plus violente au virus ; Une étude a porté sur les 261 premiers cas humains confirmés à partir de décembre 2003. L'OMS a reconnu parmi eux 36 clusters (cas goupés) familiaux documentés(1,2). Chaque cluster réunissait de 2 à 8 personnes infectées. Seul 4 clusters étaient composés de 2 personnes non génétiquement apparentées (mari et femme).
- à la stratégie de détection et de lutte contre une pandémie / manque de vaccin, faible réactivité, préparation insuffisante, manque d'antiviraux et monothérapie (un seul médicament, pour un virus qui a la réputation de muter facilement)
- aux réactions locales et globales, individuelles et collectives de l'humanité face à la zoonose et au début d'épidémie humaine s'il se développe.
- et à de probables facteurs inconnus ou mal compris (ex : réservoir ou vecteur animal non repéré ou sous-estimé chez d'autres espèces que l'oiseau, sous-estimation du risque lié aux transports..)
Facteurs contextuels de long et moyen terme
Ce sont des facteurs politiques, psycho-religieux, humains et socio-environnementaux sur lesquels on ne peut agir immédiatement ni facilement, mais à prendre en compte dans les stratégies de lutte et de modélisation.
- Certains sont liés à l'environnement naturel (aléas pas, peu, difficilement ou coûteusement prévisibles, dont météorologiques) ou à l'environnement artificialisé, et aux modes de gestion et d'aménagement du territoire et de l'économie. Le facteur météo est cité depuis longtemps (comme on a voulu voir des conjonctions avec la lune ou la position des étoiles). Il est scientifiquement relaté dès 1890 pour l'aspect saisonnier, maintenant relié au « pic d'incidence saisonnier » d'ailleurs assez variable dans ses dates de début et de fin. L'influence des conditions météorologiques reste mal comprise.
- D'autres seront liés aux comportements humains des décideurs, des entreprises, des industries pharmaceutiques, des gestionnaires de crise, des services publics, des entreprises, du public ou encore de la Bourse ou de la finance, qui sont relativement imprévisibles, mais décisifs. La corruption, la volonté de cacher un problème pour ne pas faire peur ou pour préserver l'image en sont des exemples.
La transmission interhumaine reste la règle et ce n'est que récemment qu'on a pris conscience du rôle fréquent du personnel soignant comme vecteur du virus. Or, ce personnel reste paradoxalement très peu vacciné et plusieurs études ont montré que les règles élémentaires d'hygiène, telles que le lavage des mains ne sont pas toujours respectées. (La grippe est déjà contagieuse un à deux jours avant l'apparition des symptômes, à la différence du SRAS qui ne l'est qu'après) - D'autres facteurs enfin sont liés à l'état général de développement des pays où le virus risque d'émerger, en particulier pour l'Afrique qui cumule : pauvreté et mal-développement, inégalités d'accès aux soins et à la culture sanitaire, conflits militaires ou interethnique, déficit d'infrastructures sanitaires et vétérinaires, déficit d'expertises, et poids de la dette. L'OMS, la FAO et l'OIE sont depuis l'apparition du H5N1 particulièrement préoccupées par le manque criant d'infrastructures vétérinaires ou d'abattage, de veille et contrôle sanitaire et vétérinaire.
De plus comme la Grande-Bretagne à l'époque de l'ESB, certains pays pauvres (Nigeria, Sierra Leone…) sont passés à un système de privatisation de toute leur filière agro-vétérinaire. Un tel système freine fortement le contrôle, la recherche proactive, le travail sur des objets « non rentables » et le partage gratuit des données (quand il y en a).
Risques immédiats (non exhaustif)
Le premier risque est celui du contact avec le virus et de l'infection. Dans le cas de la grippe, la contamination d'homme à l'homme est réputée se faire essentiellement par voie aérienne (et éventuelle par voie fécale et orale, potentiellement si le variant pandémique infecte l'intestin).
Le risque induit par la présence de H5N1 dans les selles humaines ne semble pas clairement mesuré début 2006, mais le modèle animal incite à ne pas le sous-estimer.
Face aux gouttelettes respiratoires émises lors des accès de toux, la distance de sécurité de 2 mètres est habituellement jugée suffisante.
Le virus peut être transmis par les mains des malades et des fomites (surfaces lisses, objets, mobiliers, vêtements,…).
Selon le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF), les critères de risque majeur d'exposition sont :
- proximité de moins de 2 m d'une personne malade ;
- densité de personnes dans ce rayon de proximité ;
- proportion de personnes infectées ou d'agents infectieux dans ce rayon de proximité ;
- confinement ;
- absence de remplacement (turn-over) des personnes dans ce rayon.
Les facteurs réputés favorisants seraient :
- atmosphère humide ;
- température basse (En Asie et en Afrique, le virus a pourtant sévi en zone très chaude).