Par rapport aux pandémies précédentes, la médecine et les services d'urgence ont beaucoup progressé, mais il nous faut aujourd'hui affronter de nouveaux facteurs.
(cf. OMC, GATT, dérégulation, délocalisation, extension des multinationales qui s'épanouissent dans un contexte de recul des barrières commerciales et de libre échange… La mondialisation n'exclut pas que restent longtemps secrètes des informations d'intérêt général (retour d'expérience / alertes non diffusés), soit pour protéger des intérêts commerciaux, soit pour spéculer sur leur valeur, soit pour ne pas avoir à payer de redevance ou encore par crainte d'être poursuivi…). Or, toutes les activités et résultats de la surveillance devraient être immédiatement rapportés (résultats positifs et négatifs) dans la littérature scientifique et aux agences internationales dont FAO et OIE estiment tous les gestionnaires de risques.
Exemple d'effet de la globalisation de l'élevage : De la même manière que les agriculteurs sont devenus dépendants de quelques semenciers, l'aviculture et tous les accouveurs de la planète deviennent de plus en plus dépendants de quelques grands producteurs de poussins ou canetons d'un jour. Ce système de production centralisée et hyper sélective contribue à gravement affaiblir la biodiversité, augmenter le risque de diffusion/contagion, notamment parce que contribuant à une extraordinaire régression de la diversité génétique qui était l'une des barrières naturelles limitant le risque de zoonoses
Par avion, un virus très contagieux peut aujourd'hui se répandre sur tout ou partie de la planète en quelques semaines, voire en quelques jours ou quelques heures là où il a fallu autrefois plusieurs années à la peste pour ravager l'Europe.
Rappel sur la peste : le front de l'épidémie est parti 31 décembre 1347 de Marseille pour n'arriver que le 31 décembre 1349, soit deux ans après au sud de la Norvège. Il épargnait encore le nord de l'Écosse. Giovanni Villani avant de lui-même en 1348 mourir de la peste en Italie, nous informe, avec des chiffres qu'on a tardivement jugés exagérés que les deux tiers de la population de la Sardaigne et de la Corse en furent victimes. A Majorque, on avance le chiffre de 80 % de morts, 70 % à Pise et 75 % à Venise.
À Florence, des sources contemporaines indiquent un nombre de morts allant de 60 000 à 100 000 (c'est-à-dire de 60 à 100 %)
La peste pulmonaire, avec une mortalité de près de 100 %, fut fréquente au cours de cette épidémie.
Lors de certaines épidémies du XVIIe siècle, la mortalité dépassa encore 50 %. C'est ainsi qu'en 1630-31, 17 000 personnes sur un total de 37 000 sont mortes à Crémone, 25 000 sur 32 000 à Mantoue et 65 000 sur 132 000 à Milan.
Avec le SRAS et la grippe, le dépistage (screening) des voyageurs à leur arrivée dans les aéroports serait sans effet, selon une étude de l'Agence de Protection de la Santé du R-U. (24 septembre 2005).
Des chercheurs ont estimé la part des passagers porteurs d'une infection latente et qui présenteraient les premiers symptômes au cours d'un trajet aérien vers le Royaume-Uni : pour le SRAS, l'incubation était trop longue pour permettre que plus d'une petite proportion des personnes infectées développe les symptômes durant un vol : 0,3 % pour les vols européens et jusqu'à 21 % pour les très longs courriers venant d'Asie du Sud-est. la longue période d'incubation du SRAS, et le fait que la grippe soit contagieuse avant expression des symptômes – font que seul un petit nombre de cas seulement seraient découverts avec le dépistage.
La proportion des personnes infectées qui développerait les symptômes durant un trajet serait inférieure à 10 %, quelle que soit la durée des trajets. On peut envisager la mise en quarantaine systématique des passagers exposés dès la détection d'un cas suspect, mais la sensibilité d'un dépistage à l'aéroport restera faible (BMJ Online First bmj.com) Et un passager peut être contagieux pour la grippe deux jours avant l'expression des symptômes (British Medical Journal).
Depuis 1919 la planète a connu une explosion démographique et un fort regroupement des populations en réseaux de conurbations (d’où une promiscuité urbaine décuplée). La population mondiale (6,8 milliards actuellement) grandit rapidement (environ 76 millions d'individus de plus en 2005).
En 2050, l'ONU prévoit 2,5 milliards d'habitants de plus, soit un chiffre égal à l'ensemble de la population mondiale en 1950. 96 % de cette augmentation se fera dans les pays en développement… Ceux dont la population est jeune (en raison d'une fécondité élevée dans le récent passé) continueront de voir leur population grandir durant des décennies, même si les familles peu nombreuses y sont la norme. Le nombre des adolescents (10 à 19 ans) est de 1,2 milliard, soit le chiffre le plus élevé jamais enregistré.
Dans les pays les plus pauvres, la fécondité et la mortalité restent élevées, avec un accès difficile à planification familiale. La transition vers des familles moins nombreuses ne fait que commencer. Les 49 pays les moins avancés verront leur population grandir de 228 %, passant à 1,7 milliard en 2050 selon l'ONU
Les rassemblements, propices à la contagion, sont considérés comme un des premiers facteurs de risque d'épidémie. A partir de quand faut-il les restreindre préventivement ?
Par exemple, la préparation de la fête du Têt au Viêt Nam a coïncidé avec les 2 pics de cas humains en 2004 et 2005. En 2006, le pic n'a pas été constaté, probablement au moins en partie grâce aux efforts de la population et à la sensibilisation qui a précédé les préparatifs de la fête.
Alors que l'Indonésie peinait à limiter ses foyers et que de nouveaux cas aviaires et humains étaient y signalés en février 2006, une polémique sur les représentations du prophète a conduit des dizaines de milliers de musulmans indonésiens à manifester dans les rues vendredi 10 février 2006. Il en a été de même au Pakistan, au Bangladesh, en Inde, au Sri Lanka qui sont également des zones potentiellement concernées par la grippe aviaire.
Alors qu'en février 2005 l'Italie annonce des cas aviaires suspects, des millions de français se précipitaient sur les routes des sports d'hiver, et de nombreux autres préparent des vacances de printemps en Italie. Que se passerait-il si un début de pandémie coïncidait dans un pays riche avec un jour de départ ou de retour de vacance ? C'est durant les vacances de février que dans l'Ain, en France, le premier canard mort du H5N1, puis le premier élevage (de dinde, à 37 km de Lyon), en pleine préparation du Salon de l'Agriculture (25 février au 5 mars 2006).
Des milliers de pèlerins catholiques et de touristes préparaient leur voyage à Rome à Pâques alors qu'on découvrait les premiers cas aviaires dans le sud de l'Italie et en Grèce… Certains pays (Djibouti par exemple)préparent les pèlerins musulmans en partance pour la Mecque à ce risque. Environ 2 millions de personnes venues des cinq continents font ce pèlerinage chaque année.
En fin de la seconde semaine du mois de mars 2006, alors que la grippe saisonnière fat son plein, et que le virus H5N1 est présent dans plusieurs départements, quarante cinq universités françaises étaient bloquées par les étudiants qui manifestent contre le CPE (contrat premier emploi). ils ont aussi les jours précédents manifesté par milliers dans la rue. Ils se réunissent par centaines ou milliers en assemblées générales dans des amphithéâtre bondés.. et risquent d’être exposés aux gaz lacrymogènes susceptibles de fragiliser leurs poumons face à d’éventuelles infections. Comme en 1968 (année de Pandémie), et pour la 1re fois depuis cette date, la Sorbonne était occupée par des étudiants, et encerclée de CRS.
Les cas de rassemblement autour d'animaux migrateurs jugés à risque se posent (ex : lâchers de pigeons lors d'une fête, ou concours rassemblant des spectateurs) ; mi juillet 2007, la Fédération colombophile française (FCF) menace l’État français d’un « recours auprès des instances juridiques compétentes » et d’organiser des lâchers illégaux délivrés par la fédération, sous contrôle d’un agent « assermenté » avec des "permis de lâchers" illégaux pour protester contre le fait qu’en Allemagne les pigeons voyageurs peuvent encore voler alors que les courses de pigeon sont interdites en France (après la découverte de 3 cygnes morts du H5N1 en Moselle. La fédération estime que le pigeon voyageur ne pose pas de risque et argue du fait que des pigeons d’origine belges ou néerlandaise traversent régulièrement la France.
Les flux de réfugiés diminuent, mais ceux de déplacés a encore augmenté selon le HCR (Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés). Le Nombre de réfugié aurait chuté de 12,1 millions en 2001 à 9,5 millions en 2004, puis à 8,4 millions en 2005, niveau le plus bas depuis 26 ans. mais le nombre de déplacés internes a augmenté, et le chiffre global de personnes assistées par le HCR a augmenté de 1,3 million à la création du HCR, à de 19,5 puis 20,8 millions. À titre d'exemple, au 22 Juin 2006, environ1 300 réfugiés somaliens venaient de fuir au Kenya en raison de la sécheresse et de combats à Mogadiscio (capitale) et à Jowhar (S-W) selon le HCR, contre 64 la semaine précédente. Au même moment, 213.000 réfugiés soudanais du Darfour survivent dans une douzaine de camps administrés par le HCR le long de la frontière avec le Soudan, alors que selon le HCR, « les attaques janjawid contre les Tchadiens semblent devenir plus systématiques ». Environ 50000 déplacées circulent dans l'est du Tchad, fuyant leurs maisons depuis quelques mois après une douzaine d'attaques par les janjawid, les milices arabes qui attaquent les populations africaines du Darfour.
On connaît depuis longtemps, mais mal le lien entre le voyage et les épidémies.
Concernant la grippe saisonnière humaine, Selon le réseau GROG, la grippe A (H3N2) a été active dans l'hémisphère sud l'été 2003 : plusieurs pays signalent une circulation grippale plus ou moins intense : En Nouvelle-Calédonie, une circulation de grippe B limitée, mais intense était signalée en mai 2005. Début juillet 2005, la Nouvelle-Zélande rapportait une épidémie assez précoce, mais d'ampleur habituelle, touchant tout particulièrement enfants et adolescents. À Maurice, en juin 2005, on recensait au mois 10 000 cas de grippe. Les premiers cas de grippe signalés à l'automne surviennent souvent chez des personnes de retour d'un voyage lointain.
Les cas doivent être repérés, isolés et soignés au plus vite. C'est pourquoi tout migrant, réfugié, sans-papier ou sans domicile fixe présentant des symptômes grippaux - qu'il soit en situation régulière ou non - devrait se voir au moins proposer la possibilité de réaliser immédiatement un bilan de santé, au moins relatif à la grippe ou aux maladies contagieuses (gratuit si la personne n'est pas en état de payer).
Cependant,
Par exemple, la politique de la France à leur égard s'est durcie : les sans-papier ou clandestins ne peuvent plus être pris en charge gratuitement et/ou anonymement. Ils tardent à consulter par peur d'être reconduits à la frontière. Et ceux qui les aident, notamment en les hébergeant sont considérés comme étant dans l'illégalité. Le Pr François Bricaire, expert reconnu de la grippe et du risque pandémique a ainsi vu en 2005 une partie de son service autoritairement fermé, c'était celui qui accueillait notamment les patients pauvres ne pouvant payer leurs soins.
Les vétérinaires ont retenu de l'histoire des zoonoses que l'abattage sanitaire était in fine la mesure la moins coûteuse et la plus efficace pour bloquer une épidémie dans un foyer, s'il est pratiqué précocement dans le foyer et autour. Cela est-il vrai dans les pays pauvres ?. Certains propriétaires de volaille y refusent de soumettre toutes leurs volailles ou coqs de combat à l'abattage sanitaire, soit qu'ils ne croient pas en la réalité du risque, soit qu'ils veulent sauver des lignées parfois rare ou devenue rare, soit en raison d'une indemnisation insuffisante ou nulle.
Par exemple et bien que le virus H5N1 persiste en Indonésie depuis 3 ans et alors que ce pays abrite maintenant le plus grand nombre de malade et de morts, et alors même qu'un nouveau variant semble apparu dans ce pays, en août 2006, des fermiers ou éleveurs s'opposent encore parfois vivement à ce qu'on tue leur volaille dont la perte est insuffisamment compensée ; Un poulet adulte se vend 35 000 roupies à Jakarta, mais il n'est indemnisé que 10 000 à 12 500 par le gouvernement, et avec un certain délai, dans un pays où le mauvais salaire des fonctionnaires incite par ailleurs à la corruption. Le gouvernement dit n'avoir pas reçu les aides internationales promises à la conférence de Pékin. De plus, il ne dispose pas d’assez de vaccins pour vacciner les volailles de toutes les zones touchées. C'est pourquoi les Agences de l'ONU insistent tant sur l'importance d'aider les premiers pays touchés à indemniser les éleveurs.
Un autre risque, pour les petites paysans est que ces derniers remplacent leurs volailles abattues par des souches industrielles productives, mais fragiles et moins diversifiées génétiquement, c’est-à-dire susceptibles de propager plus rapidement une zoonose.
Ne serait-ce que parce que la population mondiale a triplé, et que l'on peut manquer de lieux capables d'héberger correctement, par exemple les passagers de plusieurs avions, le respect des quarantaines pourrait être plus difficile qu'en 1918 (période de guerre).
La coopération volontaire des patients malades est-elle par ailleurs garantie ?
Par exemple, au CHU de Nice en 2003, un patient français suspecté d'être atteint de SRAS, très indiscipliné, déambulait dans l'hôpital malgré les consignes, alors qu'il était hospitalisé pour 4 jours au retour de Hongkong. Il mettait ainsi potentiellement en danger la santé des autres malades et des soignants. Qu'en serait il dans un contexte pandémique ou l'hôpital risque d'être surchargé alors que les malades affluent.
Plus récemment des patients suspectés de grippe se sont simplement enfuis de l'hôpital. Heureusement dans ces 2 cas, il ne s'agissait que de fausses alertes. En Indonésie en Aout 2006, un père est venu retirer de l'Hôpital son fils gravement malade d'une grippe aviaire, pour le soigner à la maison avec des médecines traditionnelles et des prières. Dans ce cas il a guéri et le virus était encore très peu contagieux, mais c'est un risque supplémentaire qui a été pris.
Ceci concerne les animaux de rente agricole, mais aussi les animaux d'élevage, de compagnie, gibier, et issus du braconnage ou du trafic…) et aussi les matières à risque spécifique d'origine animale. Les modes de transport sont surtout l'avion, la route, le train, le bateau mais aussi la bicyclette dans certains pays…).
Aujourd'hui, les animaux d'élevages vivent moins longtemps, mais sont souvent déplacés d'une unité spécialisée dans les naissances (l'éclosion des œufs/couveuses artificielles pour vente de poussins ou canetons d’un jour), à une autre, consacrée à l'engraissement. Les transferts se font parfois d'une région à l'autre voire d'un pays à l'autre, augmentant le risque de circulation brutale de nouveaux pathogènes, éventuellement déjà résistants aux antibiotiques ou médicaments disponibles.
Joseph Domenech (Vétérinaire en chef à la FAO) exhorte l'UE à "se préparer à affronter de nouvelles vagues de foyers de grippe aviaire, très probablement de l'est vers l'ouest, si le virus réussit à se maintenir tout au long de l'année chez les oiseaux aquatiques en élevages. La FAO estime qu'il faut revoir les stratégies d'évaluation et de gestion du risque, de surveillance et de recherche du virus, selon M. Domenech. La surveillance du H5N1 ne doit pas être limitée aux seuls poulets.
Certains pays comme l'Allemagne ont estimé dès 2005 que si l'hypothèse d'un ou plusieurs réservoirs animaux s'avère exacte pour le virus A H5N1 HP, les chasseurs pourraient être des sujets plus exposés (surtout les chasseurs de gibier d'eau), mais on a vu que les félins et beaucoup d'autres espèces pourraient être touchés par le H5N1).
Les chasseurs sont de moins en moins nombreux dans les pays occidentaux, mais nombre d'entre eux chassent de plus en plus loin de leur domicile et de plus en plus hors des frontières de leurs pays, voire de leur continent (1 465 000 chasseurs en France répartis en 70 000 associations selon leur fédération nationale). Idem pour les pêcheurs qui même s'ils ont moins de risques de contacts directs avec le virus fréquentent des zones à risques.
La vitesse de régression de la biodiversité et des habitats naturels n'a pas d'équivalents dans le passé de l'humanité ni depuis plusieurs dizaines de millions d'années. Il est devenu évident que l'empreinte des activités humaines transforme rapidement la répartition et les caractéristiques génétiques des hôtes et vecteurs sauvages, facilitant ainsi la transmission d'agents infectieux.
La fragmentation anthropique des habitats naturels induit des déséquilibres écologiques et sanitaires croissants et graves. Ainsi a-t-on récemment montré en Amérique du Nord que la fréquence des tiques et leur degré d'infestation par la maladie de Lyme étaient liés au degré de fragmentation des forêts et à la taille des fragments. La souris à patte blanche est favorisée, ainsi que les tiques et le spirochète dans une parcelle petite et isolée, alors que le renard, dernier prédateur des souris est lui, défavorisé. Il a besoin de grandes parcelles interconnectées. La Fragmentation et la pénétration des forêts semble avoir déclenché ou favorisé la diffusion de virus de type Ebola, SIDA et d'autres virus ou pathogènes dits « émergents ».
La viande et les abats d'un oiseau infecté par le virus peut contenir le virus (Swayne and Beck Av Dis 2005). Les œufs non cuits à cœur peuvent aussi véhiculer des virus grippaux. Le virus résiste à la congélation et au froid.
Les pays riches consomment beaucoup plus de viande qu'au siècle dernier. La mondialisation a fait exploser les flux de viandes, de plus l'élevage s'est spécialisé, des industriels produisent des poussins en couveuse en Chine et dans quelques pays et les diffusent quotidiennement dans le monde entier.
Un échantillon d'un gramme de muscle ou d'œuf suffit à faire des analyses rapides (qui ne détectent que la présence d'un virus H5), mais celles-ci nécessitent des moyens techniques et financiers, et un délai incompressible (comprenant le temps de transport des échantillons). Ces contraintes sont jugées incompatibles par exemple avec le transport aérien des poussins d'un jour, qui sont commandés jusqu'à trois mois avant leur livraison, et qui bénéficient de dérogation pour des contrôles vétérinaires adaptés (les poussins envoyés par dizaines de milliers chaque jour sont fragiles et ne peuvent attendre) …
À cause de la congélation, les virus, toxines ou germes qui résistent au froid peuvent persister et se manifester des mois, voire années après, à grande distance de leur point d'origine parfois.
Le Japon, l'Europe de l'Ouest, l'Est des États-Unis ont des réseaux de transports denses et maillés. La France et sa région nord ont un des réseaux routiers et connecté avec un réseau ferré et de canaux parmi les plus dense, rapide, maillé et interconnecté au monde, alors que le contrôle aux frontières intérieures de l'Europe est devenu difficile voire impossible.
Et Paris est la ville aéroportuaire la plus interconnectée au monde ! Une étude conduite par Luis AMARAL s'est inspirée des systèmes d'interactions génétique et des méthodes d'analyse de réseaux complexes (type Internet) pour étudier le réseau topologique aérien mondial à partir de l'analyse de 531 574 vols de 800 compagnies aériennes effectués avant le 7 novembre 2000 (depuis l'augmentation annuel des voyage approche souvent les 10 % par an). Ces vols ont concernés 3663 villes aéroportuaires.
En raison du passé colonial de la France, de nombreux vols joignent Paris, Londres et Bruxelles à des zones à risque pandémique : Afrique et Asie du sud-est, dont le Viêt Nam à partir de Paris [un des pays le plus touché par la grippe aviaire.
À ceci, il faut ajouter un contexte de recul accéléré de la biodiversité et de modifications climatiques qui facilitent un développement presque exponentiel des flux d'espèces dont une partie deviennent invasives. On estime généralement qu'environ 1 % des espèces introduites qui s'adaptent aux conditions locales ont un potentiel invasif susceptible de poser de graves problèmes écologiques ou sanitaire (via la perturbation d'équilibres écologiques, la disparition d'espèces clefs, l'extension de zoonoses ou de maladies émergentes humaines (grippe aviaire via le poulet, le canard et autres volailles d'élevage.
Elles rendent très vulnérables certaines régions (par exemple en France, les Régions Bretagne et Pays de Loire concentrent les 2/3 de la production française avicole, suivi par le Nord de la France, et certaines régions belges ou néerlandaises où l'élevage industriel du porc et de la volaille posent aussi des problèmes environnementaux, notamment pour la gestion des excréments animaux.
L'UE produit onze millions de tonnes par an de viande de volaille, et en exporte un million de tonnes par an.
Rem : avec 61,7 millions d'habitants au 1er janvier 2004, la France est aussi avec 16 % de la population européenne au 2e rang des pays européens les plus peuplés, derrière l'Allemagne (82,5 millions) et devant le Royaume-Uni (59,5 millions). C'est un facteur de risque supplémentaire pour une possible pandémie. La filière dinde (la dinde est l'animal le plus sensible à la grippe aviaire) s'est développée en France depuis les années 70 pour atteindre un tiers de la production de la filière volaille, et finalement régresser en 2004 (cf. baisse des commandes allemandes notamment). En 2004, 64 abattoirs abattaient 80 % de la production.
En septembre 1998, les douzièmes rencontres européennes sur la grippe et sa prévention concluaient déjà : « Avec ses 12 millions de porcs, ses 500 millions de poulets, ses 10 millions de canards - et ses 3 millions d'habitants », la Bretagne française réunit toutes les conditions pour donner naissance à un nouveau virus grippal, qui pourrait être aussi dangereux que celui de la grippe espagnole La Bretagne a joué la carte de l'élevage le plus intensif sur un sol relativement pauvre et restreint (27 000 km²), « ce qui en fait une niche écologique idéale pour l'émergence d'un tel virus » (comme elle l'a été pour la diffusion du prion pathogène).
Les DSV (Directions des Services Vétérinaires) en France ont-elles les moyens de surveiller 8 000 élevages industriels de porcs et 5 000 grandes exploitations avicoles ? À titre d'exemple concernant le gigantisme de certains projets : ce sont un million de pondeuses, qu'un seul éleveur voulait élever en Belgique près de la frontière franco-belge dans une unité qui doit produire plusieurs dizaines de milliers de tonnes de fientes par an, nécessitant 3.294 hectares (32,94 km²) de prairies pour épandage. http://www.gaia.be/fr/rapport/chapelle.html
En Bretagne, ce sont six incinérateurs qui étaient prévus pour brûler 60 000 t/an de fientes de poules. Or, en France en 2005, il n'y avait que 300 vétérinaires spécialisés dans les productions alimentaires (sur 14 000) et la désertification rurale peut rendre plus difficile le suivi des cheptels par les vétérinaires. Ce problème a été jugé « extrêmement inquiétant » par le rapport public sur les épidémies de Marie-Christine Blandin et J. P. Door. En plus des élevages fermés, en 2005, de 8 000 à 10 000 éleveurs français élevaient des volailles en plein air.
L'autosurveillance seule n'est pas suffisante pour se préserver de risques de ce type.
La Confédération française d'aviculture (CFA) se voulait rassurante en 2005, se déclarant sereine sur les risques de contamination des volailles d'élevage par les oiseaux migrateurs, estimant qu'il n'y avait pas de raison pour le moment d'enfermer les volailles, bien qu'admettant les recommandations des pouvoirs publics qui par exemple grâce à une surveillance performante avait permis de juguler la maladie de Newcastle déclarée dans un élevage de faisans et de perdrix de Loire-Atlantique fin juillet 2005. Pourtant en février 2006, c'est presque simultanément que deux canards sauvages et un élevage de dindes étaient touchés par le H5N1 dans l'Ain (Centre-Est de la France).
En France, l'un des pays où la chasse est la plus pratiquée, les éleveurs de « gibier à plume » sont nombreux et ont la particularité concernant les canards de souvent pratiquer une fin d'élevage en semi-liberté sur des plans d'eau. Plus d'un million de ces canards sont annuellement relâchés pour que les chasseurs puissent les tirer, pratiquement sans contrôle sanitaires alertait la LPO (Ligue pour la protection des oiseaux) en 2005, alors qu'il était déjà admis que le canard peut être porteur asymptomatique, y compris dans les élevages européens, comme cela a été confirmé en octobre 2007 par la FAO. L'utilisation importante d'appelants pour la chasse est également une spécificité française.
En 2005, dans son évaluation du risque pandémique, l'OMS reconnaît que sachant que les canards (domestiques notamment) peuvent excréter de grandes quantités de virus létaux sans manifester de signes apparents de maladie susceptible d'attirer l'attention, il devient difficile de conseiller les ruraux sur la façon d'éviter l'exposition pour eux ou leurs volailles.
Quand les excréments ne sont pas compostés ou n'ont pas été préalablement méthanisés, ils conservent un certain temps de nombreux pathogènes. Or des fientes de poules ou des lisiers de porc et parfois des excréments humains, non traités pour les désinfecter, sont souvent et efficacement utilisés comme engrais.
Et depuis l’industrialisation de l’aviculture, des matières fécales sont parfois massivement exportées d'une région à l'autre, voire d'un pays à l'autre. Par exemple : Des poulaillers industriels belges achètent des terres dans d'autres pays car il ne reste plus de terre disponibles pour les plans d'épandage en Belgique).
Or, le virus actif est encore potentiellement présent dans les écoulements des fientes d'un fumier de poulailler après plus de cent jours selon l'OIE (qui s'appuie sur une étude américaine). Par ailleurs, à cause du temps d'incubation et du délai nécessaire à la détection et confirmation du virus, des fientes ou lisiers déjà contaminées peuvent être exportées avant l'expression et confirmation des symptômes chez l'animal qui les a produit, et avant la confirmation de la maladie.
Dans certains pays il est encore courant de volontairement massivement jeter des fientes de volailles ou pigeons ou du lisier dans les bassin et étangs piscicoles pour engraisser le poisson.
Ces pratiques décrites en Chine dès 473 av. J.-C. seraient nées Asie du sud où elles sont encore pratiquées, notamment en Asie du Sud-Est, dans les régions où le H5N1 HP a massivement émergé. Des pisciculteurs d’Europe orientale utilisent aussi ce type d’engrais.
Des ornithologues et vétérinaires craignent que ce type de pratiques d’enrichissement des piscicultures soient vectrices du H5N1 dans les régions infectées ou dans les régions qui auraient importé des matières à risque.
Samuel Jutzi (Directeur de la santé et de la production animale à la FAO) n’exclut pas "une voie de transmission du virus à la faune sauvage par ce biais » mais sans certitude, faute d’étude. (Le Monde, 29 mars 2006)
Pour Jérôme Lazard, chef de l'unité de recherche sur l'aquaculture du CIRAD (Centre international de recherche pour l'agronomie et le développement), avec les précautions qui s’imposent, cela reste "le moyen le moins coûteux de production de protéines animales" et peut constituer "un élément essentiel de sécurité alimentaire". (Le Monde, 29 mars 2006)
Dans un avis public daté de 2005, pour prévenir le risque d'extension de la zoonose à l'Union Européenne, l'EFSA a écrit : « Les matières fécales de la volaille et la litière sont désignées comme étant des causes importantes de propagation des formes LPAI (faiblement pathogènes) et HPAI (hautement pathogènes) du virus ». Son groupe scientifique recommande que le commerce des matières fécales aviaires et de la litière comme fumier soit limité à des fumiers correctement traités pour y éliminer tout virus de grippe aviaire. (Idem pour les plumes et duvets qui entreraient ou circuleraient dans l'UE, susceptibles d’avoir été contaminés par les matières fécales ou lors du toilettage des oiseaux.
La FAO recommande en mars 2006 recommande de ne plus se servir du guano et des fumiers animaux dans l‘alimentation animale dans les pays touchés « ou risquant de l'être » par le H5N1. « Dans tous les cas, les déjections et le fumier de volaille doivent être soumis à un contrôle rigoureux » (...) « Il faut empêcher toute fuite vers les cours d'eau »
Remarque : la nouvelle décision de la commission européenne du 11 août 2006 interdit dans les « zones de contrôle » (autour des nouveaux foyers, dans un rayon de 3 km au moins) « le transport ou l’épandage de lisier non transformé provenant d’exploitations de volailles ou d’autres oiseaux captifs situées dans la zone de contrôle, à l’exclusion du transport en vue d’un traitement conformément au règlement (CE) n° 1774/2002 »; de même pour « l’expédition vers d’autres États membres et des pays tiers de sous-produits animaux d’origine aviaire issus de volailles ou autres oiseaux captifs ou de gibier à plumes sauvage provenant de la zone de contrôle »
80 % de la population vit dans les conurbations des vallées et sur les littoraux ! (donc souvent sur les axes de migration des oiseaux).
Pigeons et étourneaux, mouettes ou goélands, rats et souris sont souvent nombreux en ville. Et selon des données récentes, les égouts et les mouches semblent pouvoir contribuer à la dispersion du virus, notamment selon une étude Indonésienne de 2005.
La Chine, les pays riches ou de l'Est-européen connaissent aussi un vieillissement provisoire mais important de leur population (Les personnes âgées ont mieux résisté que leurs enfants à la grippe de 1919, mais ce ne sera peut-être pas le cas avec un nouveau virus). Dans les pays riches, les retraités n'ont jamais été si riches et disposant d'autant de temps. Ils voyagent de plus en plus (dans leur famille, à l'étranger, pour le tourisme, la culture…)
La Chine et plus généralement l'Asie du Sud-est bouleversent leur environnement déjà malmené à échelle continentale et mondiale à un rythme jamais vu.
Les transports motorisés s'y développent très vite, et elles accueillent de nouvelles activités (dont production de poussins ou canetons d'un jour exportés dans de nombreux pays)
Or, les analyses phylogénétiques des virus grippaux laissent penser que l'Asie pourrait être la zone d'origine probable de toutes ou presque toutes les pandémies de grippe (à vérifier).
Le tourisme est souvent massif sur les axes de migration des oiseaux, littoraux, lacs, fleuves…
Le 11 septembre n'a pas comme certains le craignaient freiné le transport aérien : 800 millions d'arrivées internationales ont été enregistrées dans le monde en 2005 selon L'OMT (Organisation mondiale du tourisme) et les prospectivistes annoncent une hausse continue, hormis si la grippe aviaire se transformait en pandémie. Par exemple, le Canada a connu quelques zoonoses grippales, et le SRAS. On y est coutumier de l'avion, pour les vols intérieurs, mais aussi extérieurs : Avec au 3e trimestre 2005 1,46 million de voyages vers des pays hors États-Unis, les Canadiens ont augmenté de 8,2 % le nombre de voyages par rapport à 2004. Neuf des dix principales destinations étaient en Europe. Les voyages vers l'Asie ont décru de 20 % (cf. grippe aviaire). Les voyages du Canada vers les États-Unis ont connu une hausse de 9 % (4,80 millions de visites) en 2005 et 1,72 million de voyageurs sont venus d'outre-mer au Canada (soit + 5,8 % en écart annuel). (Source : Statistique Canada).
L'autosubsistance diminue au profit d'une dépendance croissante aux réseaux mondiaux agroalimentaires-supermarchés et aux réseaux de transports et d'énergie (favorisé par la non-internalisation des coûts socio-environnementaux des transports, la moindre taxation des carburants, etc.). Dans son livre La Peste, Albert Camus décrit une vie quotidienne bouleversée par l'épidémie, mais à cette époque les moyens d'autosubsistance et de solidarité ville-campagne étaient plus nombreux, de même qu'en 1918. Les urbains d'aujourd'hui sont souvent dépendant du frigo, du congélateur et n'ont que rarement accès à un puits ou potager s'il leur fallait subsister sans les commerces.
La volaille reste une base essentielle (et intéressante) de l'autosubsistance et ce, dans de nombreuses régions touchées, selon l'OMS, 50 à 80 % des élevages de volailles sont modestes et familiaux, d'autosubsistance. Ils apportent 30 % de l'apport protéique. La poule pond abondamment. C'est l'animal qui a le meilleur taux de conversion végétal-viande. Le poulailler du pauvre est aussi une « assurance » permettant d'obtenir un peu d'argent en cas de problème.
En Asie en 2005, plus de 120 millions d'oiseaux sont morts ou ont été abattus en 3 mois (plus que pour toutes les flambées dans le monde depuis 40 ans). Des millions de volailles ont été sacrifiées dans l'urgence, sans précaution quant à la conservation d'une diversité génétique essentielle pour que le cheptel mondial de volaille résiste justement aux pathogènes nombreux qui le menacent. A cet égard, les basses-cours familiales sont souvent plus riches que les élevages industriels.
Que se serait il passé si une pandémie grippale avait émergé au même moment ?
Les moyens sont organisationnels, humains (compétence, formation continue, disponibilité), techniques, et financiers. Ils peuvent être plus ou moins partagés. Ils concernent tant les infrastructures pérennes ou provisoires que les consommables (gants, tenues, masques, médicaments, vaccins..)
Dans de nombreux pays, les infrastructures vétérinaires et/ou sanitaires sont sous-dimensionnées, défaillantes ou absentes. Dans les pays riches, le nombre de lits et d'hôpitaux s'est parfois réduit ou a été réduit au minimum pour des raisons économiques alors même que la population vieillit et que les cancers, maladies cardiovasculaires et autres maladies liées à l'âge où à l'environnement augmentent.
Pour mieux répondre à un afflux de malades en gestion de crise (dont canicule), des experts, dont le Dr. Patrick Pelloux de l'AMUHF estiment qu'il faudrait créer des unités mobiles plutôt que de recréer en urgence des lits hospitaliers fixes. (http://www.assemblee-nationale.fr/12/rap-info/i1091-t1-4.asp)
Plusieurs experts s'étonnaient que dans la plupart des pays européens, en novembre 2005, alors que le niveau de risque augmentait depuis 2003, il ne semblait toujours pas y avoir de préparation effective des étudiants du secteur médical et paramédical qui pourraient être appelés en renfort en cas de pandémie.
En cas de pandémie, certains matériels d'importance vitale - d'assistance respiratoire notamment - pourraient manquer.
On a vu en 2005 et 2006 la difficulté qu'il y a à se procurer des stocks importants de masques, gants..
La notion d'urgence absolue sanitaire devrait être préparée et précisée par exemple pour que des actions puissent être immédiatement lancées par les pouvoirs publics et collectivités en dérogation aux longues procédure d'appel d'offre, voire aux règles de l'OMC sur les brevets, comme cela est permis par les textes.
Ces aspects sont évoqués - mais non précisés - dans les références juridiques du plan français mis à jour le 6 janvier 2006.
Des pays ont aussi été freinés dans leurs envois postaux d'échantillons à analyser, dont l'Irak en février 2006 pour deux échantillons qui ont concerné des humains morts du H5N1. Des situations locales de guerre, guerre civile, et le classement international particulier du virus au regard du risque terroriste ont plusieurs fois posé problème. Un vrai réseau spécial de prise en charge d'échantillons est-il prêt dans les pays pauvres notamment ?
De même que la censure militaire a bloqué puis freiné l'information sur la pandémie naissante en 1918, il a été reproché à plusieurs pays en 2003 d'avoir voulu cacher les faits qui suggéraient ou démontraient un début de zoonose puis de possibles cas humains, pour notamment protéger leur image, le tourisme ou leur économie avicole.
Les dispositifs sanitaires médicaux et vétérinaires doivent de plus en plus faire face aux :
Ceci dans un contexte où comme le rappellent en France M. C. Blandin et J. P. Door dans leur rapport public sur le risque épidémique : « Les microbes ne connaissent pas les frontières, ils voyagent avec les avions, de façon extrêmement rapide. Ils ne sont d'ailleurs pas les seuls à voyager puisque la résistance aux antibiotiques voyage également à grande vitesse et, lorsqu'un nouvel antibiotique est créé, nous voyons la résistance apparaître en un lieu et se propager en quelques semaines dans d'autres pays de la planète ».
Malgré les progrès médicaux, le HIV progresse, avec un variant résistant à la trithérapie, alertait l'Onusida mi 2005. Or le virus HIV, par la baisse de l'immunité qu'il produit pourrait faciliter pandémie grippale. Le nombre de morts par SIDA dans les 25 prochaines années dépassera celui de la peste noire au XIVe siècle (34 millions de morts), et peut-être celui de la grippe espagnole de 1918 (30 à 100 millions de morts).
Les jeunes filles de 15 à 24 ans sont deux fois plus souvent contaminées par le VIH que les jeunes hommes, notamment suite aux viols dont la fréquence et l’impunité relative sont préoccupante dans certains pays. En Afrique subsaharienne, très affectée, seule 1 femme sur 5 sait comment prévenir la maladie. 6 millions de personnes vivent avec le VIH sans accès à aucun traitement. 20 milliards USD devraient être consacrés par an à ce problème, en luttant aussi contre les inégalités entre sexes, le statut inférieur des femmes, l’homophobie et la stigmatisation et la discrimination liées au Sida, qui contribuent à propager l’épidémie rappelle l’ONU