Il a été nommé en l'honneur de Joseph Wedderburn pour son article de 1905 proposant trois démonstrations de ce théorème.
Remarque sur la terminologie : la définition anglo-saxonne des corps (fields) demande en fait que la multiplication soit commutative, nos corps (non nécessairement commutatifs) s'appelant des skew-fields (corps gauches) ou parfois des division algebras (algèbres avec division). La convention la plus usitée en France, et qui sera utilisée dans cet article, était de préciser si le corps est commutatif ou non, même si elle tend désormais à s'aligner sur le modèle anglo-saxon.
En fait, le théorème se généralise aux anneaux finis sans diviseurs de zéro, et montre que ceux-ci sont également des corps commutatifs, mais ce résultat n'apporte rien de plus, car il est facile de montrer que dans un monoïde fini, tout élément régulier est inversible, en remarquant que la multiplication par cet élément est injective, donc surjective.
Démonstration
La démonstration proposée ici est due à Ernst Witt en 1931. Elle peut se découper en quatre temps.
K est un corps fini. Il est donc de caractéristique p ≠ 0 et contient une copie de Fp comme corps premier. Fp est commutatif. Soit Z le centre du corps K et q=|Z| son cardinal. Z est le plus grand sous-corps commutatif de K.
K est un Z-espace vectoriel de dimension finie d= dimZ(K). On appelle aussi d le degré de K sur Z, noté [K : Z]. Le cardinal de K est alors |K|=qd.
Si d=1, K=Z est commutatif et ce n'est plus le cas si d>1.
Pour tout corps intermédiaire
, la dimension de K' sur Z divise celle de K sur Z. Pour voir cela, notons d' = dimZ(K' ). Le groupe
des inversibles de
est un sous-groupe de
éléments inversibles de
donc
divise
. Il existe donc une racine primitive d'-ième
tel que
. En faisant la division euclidienne de d par d' on montre que d' divise d. CQFD
Soit x un élément de K et Zx l'ensemble des éléments de K commutant avec x. Zx est un sous-corps de K contenant Z. D'après le point précédent, dx=dimZ(Zx) divise d.
Formule des classes pour l'action de K× sur lui-même par conjugaison.
Notons K× le groupe multiplicatif de K, constitué des éléments inversibles de K. K×agit sur lui-même par conjugaison par
pour
.
Le cardinal de l'orbite
d'un élément
de K× est
où, rappelons,
. La conjugaison est triviale sur Z ; les éléments de
ont une classe réduite à un élément.
Si (xi) est une suite de représentants des k orbites non ponctuelles, la formule des classes s'écrit :
soit :
En notant
on vient de voir que
Φd(X) divise F(X) dans Z[X]
La théorie des polynômes cyclotomiques à coefficients dans les nombres rationnels démontre l'égalité suivante, si Φe(X) désigne le polynôme cyclotomique d'indice e.
En particulier Φn(X) divise Xn - 1 mais pour tout e divisant n, en(X) ne divise pas Xe - 1
Φd(X) divise F(X) dans
. En effet pour tout
dont l'orbite n'est pas ponctuelle
est un diviseur strict de
donc
pour un certain C(X) à coefficients rationnels, d'où
Comme Φd(X) est unitaire, on sait trouver Q(X) et R(X) à coefficients entiers tels que F(X) = Φd(X).Q(X) + R(X) avec d°(R)d) ou R=0. R est nécessairement nul, sinon, en regardant cette division dans
, on contredirait le point précédent. Donc F(X)=Φd(X)Q(X) où Q(X) est à coefficients entiers.
Dans l'égalité F(q) = q - 1 =Φd(q)Q(q), Q(q) est un entier non nul donc |Q(q)| est au moins 1 et
Comme l'illustre la figure ci-contre, si u est une racine primitive n_ième de l'unité avec n>1, on a
.
, où zi décrit l'ensemble des racines primitives d-ièmes de l'unité. Les deux inégalités précédentes entraînent d=1 ; ainsi K est commutatif. Le théorème est démontré.