L'aménagement du territoire regroupe les actions menées par les pouvoirs publics français afin de favoriser le développement des régions formant le territoire national. Agissant sur une échelle plus vaste que la politique de la ville, l'aménagement du territoire porte sur la disposition spatiale des hommes et des activités. Il conjugue donc développement économique, habitat, transports et communications.
L'aménagement du territoire à la française demeure attaché à des processus dans lesquels l'État joue un rôle moteur. Toutefois, si cette politique se fonde sur des lois, des règlements et un budget décidés au niveau national, sa mise en œuvre met en jeu des dispositifs contractuels conclus avec les collectivités territoriales. Quant à l'Union européenne, elle intervient de plus en plus dans le développement des régions par le biais de sa politique régionale. Ce double mouvement de décentralisation et de construction européenne conduit aujourd'hui à faire intervenir tous les niveaux de l'organisation territoriale à la politique d'aménagement du territoire.
L'aménagement du territoire est avant tout une politique, et spécialement en France, la notion étant même peu commune dans la plupart des pays européens, où les pouvoirs régionaux et locaux disposent généralement de plus grandes latitudes d'organisation de leur territoire. Ainsi, en Allemagne on ne parle pas d'aménagement du territoire mais plutôt de « développement spatial ».
En France, le territoire fait son entrée sur la scène de l’action publique depuis la mise en place d’une action d’État en faveur de l’aménagement du territoire en 1950. Retenons la définition que donne Eugène Claudius-Petit de cette nouvelle politique :
« L’aménagement du territoire, c’est la recherche dans le cadre géographique de la France d’une meilleure répartition des hommes en fonction des ressources naturelles et de l’activité économique. »
— Pour un plan national d'aménagement du territoire, 1950
Trois idées sont contenues dans cette définition :
Le territoire est ici placé au cœur d’une vision fordiste : à la division sociale du travail doit correspondre une division spatiale des activités.
Cette vision trouve une concrétisation opérationnelle dans l’appareil d’État, notamment dans le système politico-administratif, avec la coexistence de deux ministères chargés des questions spatiales : l’aménagement du territoire et l’équipement (qui remplacera le MRU : ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme). Pour l'État, l'aménagement du territoire peut être considéré comme le volet spatial de la planification.
Le territoire doit être organisé de manière à ce que l’on trouve une fonctionnalité à l’enchâssement socioéconomique. Le territoire est alors un support de la croissance. Le territoire est un système en poupées russes facilitant la division spatiale du territoire : il y a des territoires de commandement et des territoires de production (logique de la déconcentration industrielle à partir de 1954 : sortir les industries de Paris).
L'aménagement du territoire à la française se caractérise par l'aspect incitatif des politiques. Ainsi à la différence des politiques soviétiques, les plans nationaux ont toujours étés indicatifs et non contraignant.
« Aménager le territoire, c'est prendre conscience de l'espace français comme richesse et comme devoir. »
— Edgard Pisani, Administration de gestion, administration de mission, Revue française de sciences politiques, n°2, avril-juin 1956, p. 315-330
« L'aménagement du territoire est l'instrument d'une démocratie moderne (…) Une démocratie moderne doit être une démocratie virile. L'aménagement du territoire lui offre le champ d'action et la possibilité de son épanouissement. Ce n'est pas la politique d'un groupe, d'un gouvernement ou d'un régime. C'est l'œuvre de la nation, une œuvre permanente qui déborde les soucis immédiats. C'est la croisade de tous les Français pour la conquête et la construction de leur avenir. C'est l'expression nouvelle de l'esprit civique. »
— Philippe Lamour, 60 millions de français, Buchet/Chastel, Paris, 1967, p. 287-288
« Par définition, le point de vue de la médiance réprouve tout aménagement allant à contre sens du milieu où il s'effectue ; c’est-à-dire tout aménagement qui négligerait :
- a) La tendance historico-écologique de ce milieu.
- b) Les sentiments éprouvés à l'égard de ce milieu par la société qui l'habite.
- c) Les significations attachées à ce milieu par cette même société.
- "La bête noire du point de vue de la médiance, c'est donc, évidemment, l'expert plus ou moins international aux convictions blindées, avec son harnachement de recettes passe-partout donc déplacées où qu'il les applique [...] Cela n'est pas de l'aménagement, c'est du déménagement de territoire [...] Ces déménageurs ne sont pas seulement sourds et aveugles, irresponsables au sens où ils jouent, naïvement ou cyniquement, les apprentis sorciers sur le dos des populations et des écosystèmes ; ils déménagent au sens où ils déraisonnent. »
— A. Berque, Médiance de milieux en paysages, Montpellier, GIP-Reclus, 1990, 163 p.