Le diéthylstilbestrol (DISTILBENE, ou STILBESTROL-BORNE), œstrogène de synthèse non-stéroïdien, est synthétisé par E.G. DODDS en 1938.
Il est d'abord prescrit, et ceci de manière tout à fait arbitraire, dans certaines grossesses à risque : Antécédents d'avortement spontané, hémorragies du premier trimestre de la grossesse. Puis chez les patientes diabétiques, dans la toxémie gravidique, et même dans le traitement de certaines stérilités inexpliquées...
En 1948, O.W. SMITH propose un traitement codifié par le DES dans toutes les menaces d'avortement : Il propose des cures répétées à doses progressives de la 6e à la 35e semaine d'aménorrhée (SA), les posologies allant de 5 à 125 milligrammes par jour. Ce traitement est rapidement adopté par beaucoup d'obstétriciens.
En 1953 paraît dans l'American Journal of Obstetrics & Gynecology une étude de W.J. DIECKMANN portant sur 840 patientes traitées par le DES contre un groupe témoin de 800 femmes, et montrant l'inefficacité du DES dans toutes les indications pour lesquelles il est prescrit chez la femme enceinte. Cette étude passera pourtant inaperçue.
Cependant, en 1970 et 1971 paraissent deux publications de A.L. HERBST qui attirent l'attention sur l'incidence nettement accrue de cancers du vagin d'un type particulier (adénocarcinomes à cellules claires) chez les filles de mères ayant pris du DES lors de leur grossesse. Ce type de cancer étant jusque là exceptionnel dans la population générale. Le retentissement est immédiat aux États-Unis, et la Food and Drug Administration (FDA) interdit l'utilisation du produit dans ses indications obstétricales dès 1971.
Depuis, l'intérêt de la communauté scientifique pour les risques du DES chez la femme enceinte s'accroît. Et, mis à part l'adénocarcinome à cellules claires du vagin et les autres anomalies vaginales et cervicales, de multiples études, dont celles de Y. BRACKBILL en 1978 et de A.L. HERBST en 1981, révèlent les autres conséquences de l'exposition in utero au DES : malformations utérines, infertilité, grossesses extra-utérines, avortements spontanés tardifs, accouchements prématurés, et taux augmenté de morts néonatales...le "DES syndrome" était né !
La responsabilité du DES dans la genèse de ces différentes pathologies sera longtemps discutée, et elle le reste; étant donnés les importants biais statistiques qui entachent la plupart des études consacrées à ce sujet; mais certaines pathologies, comme les malformations génitales et l'infertilité, resteront indéniablement rattachées à ce produit.
Le nombre exact de femmes enceintes ayant pris du DES n'est pas connu. Il est estimé à 4 millions aux États-Unis, 300 000 aux Pays-Bas, et 8 000 au Royaume-Uni. En France, on estime ce chiffre à 200 000 femmes environ, sur une période de 25 ans (1951 à 1977, date de suppression des indications obstétricales du DES en France). En tenant compte des avortements et de la mortalité périnatale (20% des grossesses), 160.000 enfants sont nés dont 80.000 filles et 80.000 garçons. L'âge de procréer, pour ces enfants, se situe en majeure partie entre 1975 et 2015. Le problème reste donc d'actualité, ce qui a poussé les ministères de la santé de plusieurs pays à pratiquer des campagnes d'information ciblées sur ces "malades".
Avec un recul d'environ 55 ans, on constate que le DES a été mis sur le marché sans aucune évaluation initiale, et sans être breveté. Le risque tératogène n'a pas été pris en compte, et la mise en place d'un système d'alarme a été trop longue. L'exemple du DES souligne l'attention et la prudence qui doivent être de mise lors des prescriptions médicamenteuses, et plus particulièrement hormonales, chez la femme enceinte.
Interdit dès 1971, ce n'est qu'après que la Cour suprême a jugé incontestable la responsabilité du laboratoire, qu'un fonds d'indemnisation spécialement dédié aux victimes du DES a été créé.
Interdit en 1977, ce n'est qu'après quinze ans d'une longue bataille juridique, que la Cour de cassation a définitivement confirmé en mars 2006 la responsabilité du laboratoire UCB-Pharma pour avoir distribué ce médicament accusé d'avoir provoqué des dizaines de milliers de cas de cancer, de malformations et de stérilité chez des jeunes femmes dont la mère avait reçu ce médicament. La Cour estime que le laboratoire a « manqué à son obligation de vigilance » étant donné qu'il était au courant qu'« existaient, avant 1971 et dès les années 1953-1954 des doutes portant sur l'innocuité du DISTILBENE (...) et qu'en outre de nombreuses études expérimentales et des observations cliniques contre-indiquaient » son utilisation.
Une structure d'indemnisation pourrait prochainement être mise en place pour les 80 000 femmes françaises victimes. Mais selon, Anne Levadou, présidente du réseau DES-France : « Ces femmes s'occupent en priorité de soigner leur cancer et gèrent de surcroît des grossesses difficiles. Le poids d'une bataille devant les tribunaux les dissuade d'agir. » D'autant plus que l'action collective judiciaire est à l'état embryonnaire en France. Cependant, en juin 2005, le tribunal de Nanterre a accordé à huit femmes atteintes de cancers et de malformations de l'appareil génital, des réparations de 9 000 à 265 000 euros en dommages et intérêts.
Plus tard, la Cour de cassation renverse la charge de la preuve au profit de la victime. Dans un arrêt rendu le 24 septembre 2009, la Cour énonce : « après avoir constaté que le DES avait bien été la cause directe de la pathologie tumorale, partant que la victime avait été exposée in utero à la molécule litigieuse, de sorte qu’il appartenait alors à chacun des laboratoires mis en cause de prouver que son produit n’était pas à l’origine du dommage. »
Interdit en 1977, un fond d'indemnisation a été créé [réf. souhaitée].
Une étude néerlandaise parue en 2002 révèle que le DES continuerait à provoquer des malformations sur des petits garçons dont la grand-mère a été traitée.