Histoire de la découverte du saturnisme animal - Définition

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Le saturnisme aviaire, liée au grit

Son existence était déjà scientifiquement très bien documentée dans les années 1950 grâce à Bellrose, mais le problème ne semble pas avoir inquiété les chasseurs ni les autorités sanitaires dans les trois décennies suivantes.

Il semblait admis pour ces acteurs que cette forme de saturnisme ne touchait qu'un faible pourcentage de quelques espèces de canards, alors que diverses études, notamment synthétisées par Bellrose en 1959 à partir de l'analyse visuelle de 35.220 gésiers prélevés chez diverses espèces d'oiseaux d'eau (chassés) démontraient déjà l'ampleur du problème : 30 ans avant les interdictions du plomb pour la chasse à la sauvagine aux Etats-Unis, 12 à 28% du grit ingéré par les oiseaux plongeurs d'Amérique du nord, était des grenaille de plomb (une bille ou plus). Et chez certaine espèces comme le plongeon huard ou le cygne, des agrès de pêche en plomb étaient également périodiquement signalés dans les gésiers.
Le phénomène a été ensuite scientifiquement mis en évidence à très grande échelle au Canada et aux États-Unis, grâce aux études menées respectivement par Environnement Canada et par le U.S. Fish and Wildlife Service.

Un tournant raté

Le médecin Louis Tanquerel des Planches a - avant 1850 - été le premier à étudier de manière très scientifique et approfondie le saturnisme chez l'Homme, à partir d'un grand nombre de cas identifié dans les hôpitaux.
Il pense que le plomb est essentiellement toxique par inhalation (de vapeur, poussières ou particules) et par ingestion, mais qu'il ne traverse pas ou mal la peau, ce qu'il tentera de montrer chez l'animal.
Il affirme à partir de ses observations que toutes les formes connues du plomb, dont en alliage avec l'antimoine, et pour toutes les formes chimiques connues de son époque et n'existant pas spontanément dans la nature, sont susceptible de causer des « coliques de plomb » chez l'homme.
Tanquerel semble également être à l'origine des premières expérimentations impliquant le plomb sur l'animal, onze ans après qu'il eut (en 1939) publié le premier grand ouvrage médical sur le saturnisme :
Il a administré de l'acétate de plomb à deux chiens qui - selon ses écrits - ne lui ont pas semblé affectés ce qui ne l'a pas encouragé à continuer à étudier les effets du plomb chez l'animal.
Il ne semble pas avoir pensé à expérimenter les effets du plomb métallique, ionique ou organique ingéré chez l'oiseau. Il faudra ensuite plusieurs décennies pour commencer à convaincre les médecins, chasseurs et pêcheurs que le plomb pose des problèmes sanitaires et environnementaux graves et croissants.

En Europe

Le premier cas scientifiquement décrit d'intoxication aviaire saturnine (suite à ingestion de munitions au plomb) semble être le cas du Faisans Phasianus colchicus au Royaume-Uni, étudié par Calvert en 1876.

Bien plus tard, des études exhaustives porteront sur l'empoisonnement au plomb d'autres espèces européenne, dans les années 1960-70 en France (Hoffmann 1960, Hovette 1971, 1972) et Royaume-Uni (Olney 1960, Bear et Stanley 1965), Italie (del Bono 1970) et les pays scandinaves (Erne et Borg 1969, Danell et Anderson 1975, Holt et al. 1978).

Les premiers cas détectés chez des oiseaux de proie (en fauconnerie et chez les rapaces sauvages) datent des années 1980 (notamment publiés par MacDonald et al. 1983, Lumeij et al. 1985).

Pourquoi le nombre d'oiseau victimes de saturnisme a t il été sous-estimé ?

Le saturnisme aviaire ait été si longtemps méconnu, voire nié, notamment pour les raisons suivantes ;

Le nombre de cadavres ou d'oiseaux agonisants dans l'environnement est systématiquement visuellement fortement sous-évalué (sauf cas de mort violente et immédiate, ou cas d'oiseaux enfermés dans une volière ou un poulailler), et ceci même quand plusieurs dizaines d'oiseaux meurent chaque jour par ha.

  • Les nécrophages éliminent rapidement leurs cadavres (en s'empoisonnant eux-mêmes, et en contaminant le réseau trophique).
  • Les oiseaux blessés (et souvent porteurs de plomb incrustés), ou victime de saturnisme se cachent soigneusement avant de mourir. Les animaux affaiblis risquent plus d'être mangés par un prédateur avant même de mourir naturellement. Les oiseaux ayant survécu à une ingestion de plomb, ou au début d'une phase d'intoxication mortelle risquent également plus que les autres de mourir d'une collision (avec un véhicule (Roadkill), une embarcation, une superstructure...) ou noyé dans un filet de pêche.
  • Les petits oiseaux morts échappent quasiment tous aux observateurs .
    Les estimations par extrapolation à partir d'une zone échantillonnée visuellement sous-estiment donc très fortement la mortalité cumulée des oiseaux. Elles ne reflètent pas du tout le cours de « l'épidémie » simulée par cette expérience. De plus, répéter l'échantillonnage d'un même secteur n'améliorait pas la précision des données recueillies.
  • il en va de même pour les oiseaux de taille moyenne a montré Deborah Pain en 1991 a prouvé que les cadavres de la taille d'un colvert disparaissaient rapidement, emportés, enterrés ou mangés par leurs prédateurs ou des nécrophages.
  • En 2001, Peterson et ses collègues ont montré que 77,8% des cadavres de canards étaient trouvées par les charognards dans les 24 h suivant la mort. Lors de l'étude de Peterson, une seul canard mort attirait en moyenne 16,6 charognards ;

Tous les modèles et simulations, confirmés par les expériences de terrain concluent à une élimination rapide des cadavres de petite taille et de carcasses de taille moyenne, par les charognards et/ou des invertébrés nécrophages. Et aucune étude ne semble avoir évalué le pourcentage de gros oiseaux (grues, cygnes, cigognes, vautours..) susceptibles d'être retrouvés parmi le nombre total de ceux qui meurent de saturnisme, mais il semble qu'un grand nombre des oiseaux qui meurent chaque année de ce type d'intoxications ne soit jamais retrouvé.

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