Hôtel d'Escoville - Définition

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Architecture

Le plan

Au Moyen Âge, le tissu urbain se densifiant toujours davantage à l'intérieur des remparts de la cité, les édifices, construits sur des parcelles longues et étroites, s'élevaient sur trois à quatre étages avec pignon sur rue ; les 52-54 rue Saint-Pierre en sont un bon exemple. À partir du XVIe siècle, l'élite caennaise, enrichie par l'embellie économie qui suit la fin de la guerre de Cent ans, se fait construire des hôtels particuliers d'un type nouveau comme l'hôtel de Mondrainville ou l'hôtel de Than. Mais l'hôtel d'Escoville en reste le meilleur exemple. Le secteur dans lequel a été construit l'ensemble des bâtiments était à l'époque de sa construction beaucoup plus dense ; ce n'est que dans les années 1630 que les habitations faisant face à l'hôtel furent abattues pour aménager la place Saint-Pierre. La vaste emprise nécessaire pour l'édification de ces bâtiments de seulement deux niveaux, ainsi que leur disposition autour d'une cour marquant clairement la limite entre espace public et privé, étaient donc totalement en opposition avec l'architecture traditionnelle de la ville médiévale.

La cour intérieure

La façade nord

Mais c'est la riche décoration de la cour intérieure qui frappe aujourd'hui le visiteur et qui fait de l'hôtel d'Escoville l'un des plus beaux exemples de l'architecture Renaissance en Normandie. Sa décoration savante témoigne de l'esprit de la Renaissance en mêlant des thèmes traditionnels d'inspiration biblique à des références à l'Antiquité. Plus curieusement, certains éléments d'ornementation gardent un sens plus mystérieux et semblent se rapporter à l'autre passion de Nicolas le Valois d'Escoville : l'alchimie.

Le pavillon occidentale est divisé en trois parties égales. Au centre, l'édifice est surmonté d'un toit très pentu caractéristique de la Renaissance française et que l'on trouve couramment en Normandie (ex : château de Fontaine-Henry, château d'Ô, château de Lion). Les combles sont éclairés par une lucarne richement décorée. À droite, un hall ouvert par deux arcades avec voûte en berceau et accessibles par quelques marches tient lieu d'accès principal ; il permet d'accéder au rez-de-chaussée, surélevé par rapport à la rue, et aux étages grâce à un escalier en colimaçon. À l'étage, une loggia reprend la composition du hall. L'escalier est surmonté de deux lanternons en forme de tempietto (petit temple de forme circulaire hérité du tholos grec) couronnés :

– l'un par une statue d'Apollon ;
– l'autre par une statue de Marsyas.

La façade septentrionale, la plus remarquable, est divisée en cinq parties. Entre les trois séries de fenêtres à meneaux, les trumeaux sont creusés par des niches ornées au rez-de-chaussée :

– à gauche, par une statue de Judith tenant la tête d'Holopherne ;
– à droite, par une statue de David tenant la tête de Goliath.

La facture de ces statues est si fine que l'on a longtemps cru qu'elles étaient l'œuvre de sculpteurs florentins. Dans la partie supérieure, des écussons armoriés étaient soutenus par des nymphes et des génies.

Les armes des Valois d'Escoville étaient :

D'azur au chevron d'or accompagné de trois croissants d'argent au chef du même chargé de trois roses de gueules.

La façade sur la place Saint-Pierre

La façade sur la place Saint-Pierre par Georges Bouet (1844)

À l'origine, la façade donnant sur la place Saint-Pierre était ornée d'une statue équestre en ronde-bosse qui valut à l'édifice d'être appelé l'hôtel du Grand Cheval. Après le Soulèvement de Caen contre la Convention nationale, ce bas-relief a été détruit en 1793 et remplacé un temps par un tableau représentant la Liberté coiffée d'un bonnet phrygien et foulant aux pieds l'hydre, symbole de la défaite du Fédéralisme. Il n'existe plus de traces architecturales de ces représentations, mais il nous reste une description faite par le médecin Dubourg dans une lettre adressée à Pierre-Daniel Huet en 1699 :

« Il y a deux représentations en bas relief, l'une en haut où est représenté ce grand cheval en l'air, ayant des nuées sur ses pieds de devant. L'homme qui est dessus avait une épée devant lui, mais elle n'y est plus. Il tient dans sa main une longue verge en fer, et derrière lui il y avait en l'air des cavaliers qui le suivent, et devant lui et au-dessus un ange dans le soleil.
Au-dessus du rond de la porte, il y a encore une représentation d'un homme à cheval, en petit sur un tas de corps morts et de chevaux que les oiseaux mangent. Il est tourné du côté de l'Orient, à l'opposite de l'autre, et au-devant de lui le faux prophète y est représenté et le dragon à plusieurs têtes, et des cavaliers contre lesquels le cavalier semble aller. Il tourne la tête en derrière, comme pour voir la représentation du faux prophète et du dragon qui entre dans un vieux château d'où il sort des flammes dans lesquels ce faux prophète est déjà à moitié corps.
Il y a de l'écriture sur la cuisse du grand cavalier et à plusieurs endroits, comme le "Roi des rois, le Seigneur des seigneurs" et d'autres tirées du XIXe chapitre de l'Apocalypse. Comme ces lettres ne sont pas gravées, je crois qu'elles sont écrites il n'y a pas longtemps ; mais il y a un marbre tout en haut où il est écrit : "Et c'était mon nom, la parole de Dieu." »

La première représentation qu'on est de la façade date de 1844 ; elle est l'œuvre de Georges Bouet. À cette époque, la façade a déjà été mutilée et les devantures des boutiques au rez-de-chaussée cachaient les dispositions d'origine. Une autre photo datant de 1929 nous permet de voir que la façade a peu changé en un siècle. La façade était divisée en sept travées délimitées par des ordres de colonnes superposées. Chaque travée est surmontée d'une lucarne en pierre formée d'une arcade flanquée de pilastres ; seul la lucarne couronnant la travée d'entrée était en bois. Les travées n'avaient pas une largeur identique ; les deux travées à gauche correspondant à l'aile sud, ainsi que la travée percée par la porte cochère donnant accès à la cour étaient plus étroites.

La façade en 1889

Jusqu'en 1944, ces trois travées étaient divisées en deux niveaux, alors que les autres travées était divisées en trois niveaux. Jusqu'au début du XXe siècle, les travées de droite ont conservé des éléments de la décoration du XVIe siècle : une partie des chambranles et des décorations en losange au-dessus des fenêtres. Ces dispositions ont permis d'avancée l'hypothèse selon laquelle le bâtiment était autrefois divisé en deux niveaux avec un rez-de-chaussée surélevé et un étage, divisé par un plancher par la suite.

Presque entièrement détruite lors des bombardements, la façade n'a pas été reconstruite à l'identique. En 1948, le comité consultatif pour la Reconstruction de Caen a en effet décidé, après de longs débats, de refaire une façade qui respecte le volume du nombre d’étages et, dans une certaine mesure, le régime des pleins et des jours de l’ancienne façade, mais sans en être une réplique à l’identique. La façade est divisée horizontalement par huit séries de fenêtres à égale distance, contre sept à l'origine, s'étageant sur trois niveaux et les lucarnes ne sont plus qu'au nombre de cinq. De plus, la façade a été déplacée d’un mètre par rapport à son ancien alignement pour élargir le corps de logis sur rue et les reconstructeurs ont dû pour cela déplacer ce qui restait du porche d’entrée.

La reconstruction

Vue d'ensemble en 2008

Très endommagé lors de la bataille de Caen, l'hôtel a été en grande partie reconstruit. En 1960, le gros œuvre est terminé. A l’hôtel d’Escoville, comme à l’hôtel de Than, les murs en pierre de Caen d'origine ont été repris par une structure en béton armé et ne sont plus porteurs. Structurellement, ils s’apparentent désormais aux immeubles de la Reconstruction. Les travaux « à l’ancienne » ont en effet été strictement réservés aux parties visibles ; les techniques mises en œuvre pour la consolidation ou la restitution du gros-œuvre n’ont rien à voir avec la technique constructive ancienne, comme nous le montre d’ailleurs le déplacement de la façade.

Lors de la restauration, une cheminée, située depuis 1855 au rez-de-chaussée du musée de la Société des antiquaires de Normandie, a été remontée en 1963 au premier étage de l’hôtel d’Escoville. Elle a ensuite été déplacée en 1994 dans la salle Moisant de Brieux. Datant de 1568, cette cheminée se trouvait à l'origine dans un hôtel particulier au n°28 de la rue Saint-Jean. Son trumeau richement sculpté montre une scène de la vie de saint Georges. Le linteau est frappé des armes de la famille de Villy.

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