Paulo Freire | |
Naissance | 19 septembre 1921 Recife |
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Décès | 2 mai 1997 São Paulo |
Profession(s) | pédagogue |
Paulo Freire (19 septembre 1921 à Recife, Brésil - 2 mai 1997 à São Paulo) est un pédagogue brésilien. Il est surtout connu pour ses efforts d'alphabétisation visant les personnes adultes de milieux pauvres, une alphabétisation militante, conçue comme un moyen de lutter contre l'oppression.
Ses parents lui inculquent très tôt l'importance du dialogue et du respect du choix des autres, ce qu'il applique dans son approche pédagogique. Malgré leur aisance financière initiale, ses parents bourgeois subissent les conséquences de la Grande dépression et le jeune Freire souffre de la faim. C'est alors qu'il décide de dédier sa vie à la lutte contre la famine.
Lorsque la situation familiale se rétablit, il s'inscrit à l'Université de Recife pour y étudier le droit, la philosophie et la psychologie du langage, tout comme il travaille à temps partiel comme enseignant du portugais. Il lit également les écrits du philosophe Karl Marx et d'intellectuels catholiques, tels que Jacques Maritain et Georges Bernanos, lesquels l'influenceront dans sa philosophie pédagogique.
En 1944, il épouse Elza Oliveira, une enseignante au primaire. Ils ont cinq enfants, ce qui l'incite à porter son attention sur les théories éducatives. Malgré sa formation en droit, il lit des ouvrages sur la pédagogie, la philosophie et la sociologie de l'éducation. Dès son entrée au barreau, il se met à travailler comme agent d'aide sociale et, plus tard, comme directeur du département d'éducation, de culture et de travail social de l'État du Pernambouc. Ce poste l'amène à être en contact avec les plus pauvres des centres urbains. Il développe de nouveaux moyens d'échange avec les défavorisés, ce qui lui permet de jeter les bases de sa dialectique pédagogique de l'éducation des adultes. Il anime des séminaires et donne des cours à l'Université de Recife, dont il obtient un doctorat en 1959.
Pendant les années 1960, le Brésil est agité. Différents mouvements socialistes, étudiants, populistes, syndicalistes et chrétiens cherchent à atteindre leurs buts sociopolitiques. Freire devient directeur d'un service à l'Université de Recife et élabore un programme d'alphabétisation des adultes pour des milliers de paysans du nord-est du pays. Des volontaires appliquent ce programme dans tout le pays.
L'engagement social et éducatif de Freire augmente avec les années. En 1958, il présente un rapport, l'Éducation des adultes et les populations marginales : les problèmes des Mocambos qui innove en ce qui a trait à l'éducation permanente des adultes. Selon lui, cette éducation doit se fonder sur l'apprentissage de la lecture et de l'écriture vécu au quotidien par les adultes. Elle ne doit plus simplement se fonder sur le développement de la lecture et de l'écriture. Il insiste pour éliminer la structure hiérarchique de l'éducation, laquelle favorise la domination du professeur sur ses élèves tant par le pouvoir que par le savoir. Dans une perspective démocratique, l'éducation doit se réaliser avec la personne. Pour obtenir un tel fonctionnement, il faut que les apprenants et les enseignants s'engagent, collaborent, participent, prennent des décisions et soient, en ce qui a trait à l'éducation, responsables tant socialement et politiquement. Écrit dans une forme inhabituelle, le rapport contribue à le cataloguer comme éducateur progressiste.
Freire et ses collaborateurs présentent la vie politique quotidienne à travers la lecture et l'écriture, se détachant ainsi de la façon traditionnelle d'enseigner la lecture et l'écriture, c'est-à-dire décontextualisée et instrumentale. Ils pensent que chaque citoyen doit prendre part aux décisions politiques. Ils gagnent ainsi l'attention des pauvres et éveillent l'espoir d'améliorer leur vie. Les paysans commencent à éliminer l'indifférence et le fatalisme qui les habitent, mais les grands propriétaires fonciers et les militaires ne voient pas cette réforme d'un bon œil.
En avril 1964, un coup d'État renverse le gouvernement et tous les mouvements progressistes sont éliminés. Paulo Freire se retrouve derrière les barreaux pour activités « subversives ». Pendant 70 jours, il est interrogé sans relâche. C'est l'événement déclencheur qui l'incite à entreprendre la rédaction de l'ouvrage l'Éducation comme pratique de la liberté. Il y analyse les raisons de son échec de changement politique au Brésil. Par après, le pouvoir l'expulse au Chili, où il travaille pendant cinq ans à un programme d'alphabétisation. À cette époque, l'UNESCO reconnaît les efforts du Chili pour enrayer l'analphabétisme.
À la fin des années 1960, Freire entre en contact avec une autre culture : celle des révoltes étudiantes, de la lutte pour l'intégration des Noirs et de l'opposition à la guerre du Viêt Nam aux États-Unis. Il est professeur invité au Centre d'études en éducation et développement de l'Université d'Harvard. Ces agitations sont une révélation pour Freire : il se rend compte que la répression et l'exclusion des défavorisés de la vie politique et économique ne sont pas limitées aux pays du Tiers-Monde. Cela l'amène à élargir sa définition du Tiers-Monde, lequel n'est plus géographique, mais bien politique.
C'est à la fin de sa visite aux États-Unis, en 1974, qu'il écrit son ouvrage le plus célèbre : Pédagogie des opprimés. L'éducation se présente comme un chemin qui mène à la liberté en deux étapes. La première survient lorsque les gens deviennent conscients de leur oppression et qu'ils transforment leur état. La deuxième amène un processus permanent d'action culturelle qui favorise l'émancipation.
Après les États-Unis, Freire visite la Suisse, puis voyage un peu partout sur la planète. Il diffuse ses idées et soutient des programmes pédagogiques dans différents pays nouvellement indépendants d'Asie et d'Afrique.
En 1980, à l'invitation de son pays, il rentre d'exil. À cause des agitations sociales, il ne peut réintégrer l'Université de Recife. En conséquence, il enseigne à l'Université pontificale de São Paulo. Cette période est un point tournant dans sa carrière. Le pays reconnaît ses idées et Freire effectue une intense intervention socio-éducative, tout comme il participe activement à la vie politique.
En 1989, il devient secrétaire de l'éducation à la mairie de São Paulo. Il dirige la réforme scolaire dans la plus grande ville du pays, laquelle compte les deux-tiers des écoles du pays. En deux années et demie, il tente de transformer en profondeur le système scolaire de la municipalité. Par exemple, il cherche à améliorer les écoles et leurs infrastructures scolaires et pédagogiques. Il cherche également à améliorer le salaire des enseignants et à renouveler les programmes d'études. Pour effectuer la gestion et l'administration, il travaille en collégialité, tout en demandant de fonctionner sur des bases de responsabilité réciproque et de participation démocratique.
Après avoir laissé son poste, il retourne à l'Université pontificale et se concentre sur l'écriture et la lecture. Pour fêter ses 70 ans, il se rend à New York à l'invitation d'un groupe de recherche en éducation. Il décède quelques jours après la publication de son dernier livre, la Pédagogie de l'autonomie.