À la différence de beaucoup d’autres mathématiciens, Laplace ne donne pas aux mathématiques un statut particulier, il y voit plutôt un instrument utile pour la recherche scientifique et pour les problèmes pratiques. Par exemple, Laplace a considéré l’analyse comme un outil pour affronter les problèmes physiques, tout en se montrant extrêmement habile pour inventer les concepts dont il a besoin pour atteindre cet objectif. Tant que ses résultats ne sont pas avérés, il ne se préoccupe pas d’expliquer les phases démonstratives ; il ne soigne pas l’élégance ; pour lui, n'importe quel moyen est bon s'il permet de résoudre le problème qui le préoccupe.
Il croit fermement au déterminisme causal comme il l'écrit dans l'introduction de son ouvrage sur les probabilités:
« Nous pouvons considérer l’état actuel de l’univers comme l’effet de son passé et la cause de son futur. Une intelligence qui à un instant déterminé devrait connaître toutes les forces qui mettent en mouvement la nature, et toutes les positions de tous les objets dont la nature est composée, si cette intelligence fut en outre suffisamment ample pour soumettre ces données à analyse, celle-ci renfermerait dans une unique formule les mouvements des corps plus grands de l’univers et des atomes les plus petits ; pour une telle intelligence nul serait incertain et le propre futur comme le passé serait évident à ses yeux »
— Essai philosophique sur les probabilités, Pierre-Simon Laplace
Il est souvent fait référence à cette intelligence comme au « démon de Laplace » (de manière analogue au démon de Maxwell). La description de l’hypothétique intelligence décrite au sujet de Laplace comme un petit diable ne vient pas pourtant de Laplace, mais de biographies excessives : Laplace espérait que l’humanité aurait amélioré sa compréhension scientifique du monde et croyait que, si elle fut complétée, elle aurait encore eu besoin d’une extraordinaire capacité de calcul pour la déterminer complètement en tout instant particulier. Cette question de la possibilité d'atteindre par le calcul des prévisions fiables dans les domaines complexes ne sera mise en doute qu'avec les travaux de Henri Poincaré, et ne touchera le grand public qu'avec la théorie du chaos. Entretemps, l'opposition à ce sujet entre Von Neumann et Wiener est restée célèbre.
Il a été récemment proposé une limite sur l’efficacité du calcul de l’univers, c’est-à-dire sur l’habileté du petit diable de Laplace à traiter une quantité infinie d’informations. La limite fait référence à l'entropie maximale de l’univers, à la vitesse de la lumière et à la quantité minimum de temps nécessaire pour transporter l’information sur une longueur égale à la longueur de Planck ; celle-ci étant égale à 2130 bit. En conséquence, n’importe quelle chose demandant plus que cette quantité de données ne peut être calculée dans la quantité de temps qui est passée jusqu’à présent dans l’univers.
Laplace est aussi connu pour une anecdote reléguant Dieu au rang de supposition :
Laplace vint un jour faire hommage à Napoléon d’un exemplaire de son ouvrage, et le récit suivant de l’entrevue peint d’une façon caractéristique les caractères des deux hommes. On avait dit à Napoléon que l’ouvrage ne faisait nulle part mention du nom de Dieu et, comme Napoléon aimait à poser des questions embarrassantes, il fit, en acceptant l’ouvrage, cette remarque : « M. Laplace, on me dit que vous avez écrit ce volumineux ouvrage sur le système de l’Univers sans faire une seule fois mention de son Créateur ». Laplace, bien que souple courtisan, avait sur tous les points qui touchaient à sa philosophie, l’obstination du martyr ; il se redressa aussitôt et répondit brusquement : « Sire, je n’ai pas eu besoin de cette hypothèse. » Napoléon, grandement amusé, fit part de cette réponse à Lagrange, qui s’écria : « Ah ! c’est une belle hypothèse ; elle explique beaucoup de choses. » Napoléon répéta cette réponse à Laplace, qui répondit habilement que si cette hypothèse explique tout, elle ne permet de prédire rien et n'entrait donc pas dans son domaine d'étude (cité par Richard Dawkins).