Le rapport anharmonique ou birapport est un outil puissant dans la géométrie, en particulier la géométrie projective. Le nom de rapport anharmonique a été créé par Michel Chasles mais la notion lui est bien antérieure.
Si A, B, C et D sont quatre points distincts d'une droite (d) on appelle birapport ou rapport anharmonique de (A,B) et (C,D) le rapport des mesures algébriques suivant :
Les divisions sont supposées régulières. Le birapport de C, D par rapport à A, B est
Les divisions sont supposées régulières. Le birapport de C, D par rapport à A, B est -1/3
Un résultat important en géométrie projective stipule qu'une projection centrale conserve le rapport anharmonique . Il permet de dire dans la figure ci-jointe que les rapports anharmoniques de (A, B ; C, D) et (A', B' ; C' D') sont égaux quelles que soient les droites qui portent la série des quatre points. (Une démonstration est réalisable en utilisant plusieurs fois le théorème de Thalès).
Puisque ce rapport est indépendant de la sécante aux quatre droites, ce rapport ne dépend que de la position relative des quatre droites. Il est alors appelé rapport anharmonique des droites
Voir Faisceau harmonique
Ce rapport est indépendant du repère choisi sur la droite (d) et de l'unité de longueur choisie.
Il est facile de voir que si l'on permute, en même temps A/B et C/D, on ne modifie pas le rapport anharmonique.
Ce rapport reste invariant pour de nombreuses transformations géométriques : isométrie, similitudes, transformation affine. La dualité par pôles et polaires réciproques conserve aussi le rapport anharmonique de quatre éléments d'une structure unidimensionnelle.
Il reste aussi invariant pour des homographies comme la projection centrale...
Si C est le barycentre de (A, a) et (B, b) et si D est celui de (A, a') et (B, b') alors le rapport anharmonique est
Ce qui explique d'ailleurs qu'une transformation conservant les barycentres conserve aussi les rapports anharmoniques
Outre sa signification en termes de birapport de longueurs orientées, le rapport anharmonique concerne aussi les angles et les aires orientés. En effet l'aire des divers triangles tels que OAB peut s'exprimer de deux manières
Lorsque le rapport anharmonique est égal à -1, on dit que les quatre points sont en division harmonique. Le point D est alors appelé le conjugué de C par rapport à A et B. On peut prouver que C est aussi le conjugué de D par rapport à ces même points.
Exemple 1: la suite harmonique
Le point d'abscisse est le conjugué du point d'abscisse 1 par rapport aux points d'abscisse 0 et .
le point d'abscisse est le conjugué de celui d'abscisse par rapport aux points d'abscisse 0 et .
De manière générale, le point d'abscisse est le conjugué du point d'abscisse par rapport aux points d'abscisse et 0
On définit ainsi la suite de nombres ... appelée suite harmonique que l'on retrouve en musique pour définir la gamme harmonique
Exemple 2 : moyenne harmonique
Le conjugué de 0 par rapport à x et y est la moyenne harmonique de x et de y :
Exemple 3 : barycentre
Si C est le barycentre de (A, a) et (B, b) alors son conjugué par rapport à A et B est le barycentre de (A, -a) et (B, b)
Pour d'autres exemples :
Le Théorème de Ceva et le Théorème de Ménélaüs sont reliés par un rapport harmonique.
Les deux théorèmes impliquent deux relations :
qui, après simplification, mènent à : , ce qui exprime une division harmonique.
En passant cette propriété donne une construction du conjugué de D par rapport à BC, en prenant un point arbitraire A hors de (BC) et un point arbitraire M sur (AD).
Voir quadrilatère complet