Cette approche n’exclut pas la scolarisation des enfants porteurs d’autisme : « En Caroline du Nord, les parents peuvent choisir parmi plusieurs formes de programmes scolaires. La première et la plus populaire est constituée par des classes spéciales pour enfants autistes, situées au sein d’école classiques au milieu d’enfants non handicapés du même âge. Il existe plus de 100 classes de ce type disséminées dans l’État. Elles accueillent cinq à sept élèves, un enseignant et des assistants de manière à ce que le rapport élèves /adultes soit au maximum de 3/1 ; par exemple, les classes de six élèves ont un enseignant et un assistant. Les classes de sept élèves ont un assistant supplémentaire ». (Mesibov, op. cit.)
Si l’enfant bénéficie d’une intégration scolaire en milieu ordinaire, un suivi est organisé pour évaluer ses progrès et s’assurer qu’il tire effectivement profit de cette pratique normalisatrice.
Le programme TEACCH est un programme éducatif structuré spécialisé.
« Le recours à l’enseignement structuré dans le cadre d’une stratégie d’intervention est au centre du programme TEACCH depuis sa création au milieu des années 60. », « L’organisation physique, les emplois du temps, les systèmes de travail individuels, le repérage visuel, et d’autres procédures sont les éléments de l’enseignement structuré qui se sont montrés utiles dans les classes des élèves autistes de tous âges et de toutes aptitudes fonctionnelles. »
L’organisation physique permet de faciliter la compréhension de l’environnement : des zones spatiales sont dévolues à des activités spécifiques :
Toutes ces zones sont limitées clairement au moyen de matériel et de mobilier adéquats (paravents, tapis, étagères écrans, adhésifs de couleur sur le sol etc.) : la lecture et la compréhension de l’espace sont immédiates et aisées (un des points forts des personnes porteuses d’autisme est l’intégration de l’information visuelle).
Et comme les instructions verbales sont difficilement compréhensibles pour l’enfant porteur d’autisme, l’élément essentiel de l’organisation de la vie dans la classe consiste à visualiser la succession des activités de l’enfant sur un support visuel, l’aidant à se repérer, se situer dans le déroulement du temps, les événements distincts qui le jalonnent et les liens entre eux.
Les systèmes de travail individuels comportent obligatoirement quatre types d’information :
La structuration de l’activité ou de la tâche à accomplir est par conséquent conditionnée par :
Les expériences et les observations de Schopler ont montré que les enfants atteints d’autisme travaillent mieux lorsqu’ils ont à disposition permanente des repères visuels qui présentent une division lisible du temps, un découpage fractionné de la façon dont on va occuper ce temps, une indication sur ce qui suit l’activité, dans le but de rendre toute action prévisible.
Il s’agit pour l’enseignant de la classe TEACCH de tracer en contours nets ce qui fait le quotidien d’un être humain, dans ses rapports à l’espace, au temps, à l’apprentissage, au jeu, au souci de soi, aux autres, bref à ce qui compose l’existence d’un être en perpétuel développement et enrichissement personnel. Car les personnes atteintes d’autisme sont submergées par les informations sensorielles et n’ont pas la capacité de traiter les informations parvenues au cerveau en vue d’en appréhender le sens ou de les organiser en les maîtrisant. Les repères visuels les aident à traiter l’information plus efficacement.
Acquérir une habitude d’agir de façon appropriée dans des circonstances ou des contextes destinés à se répéter est aussi un objectif dans l’organisation de la classe TEACCH. En effet, l’enseignant s’ingénie à créer des routines car « des routines productives peuvent constituer des manières systématiques d’accomplir des missions. Contraints à lutter pour comprendre ce que la situation nécessite et incapables de s’organiser facilement et efficacement ou efficacement, les élèves autistes tirent bénéfice des comportements systématiques (Mesibov).
La routine enseignée est celle qui doit avoir des conséquences durables, dans la mesure où elle est commune à de nombreux types de travaux. Par exemple, note Mesibov : « appréhender systématiquement toutes les tâches de gauche à droite et de haut en bas est une méthode applicable à une multitude de tâches, comme ranger, laver la vaisselle, nettoyer le sol, trier, lire ou écrire ».
Par ce terme anglo-saxon, on désigne le processus d’intégration des enfants porteurs d’autisme dans des classes pour enfants non handicapé. Bien que conscients des difficultés inhérentes à la pratique du « mainstreaming » (hostilité de certains enseignants à l’égard de l’enfant porteur d’autisme, mauvaise acceptation sociale de l’enfant handicapé et risque d’interactions négatives entre lui et les enfants non handicapés du même âge), les concepteurs du programme TEACCH posent en principe que l’insertion des enfants atteints d’autisme dans les écoles pour non handicapés leur permet d’accroître leur possibilités d’acquérir des comportements sociaux appropriés.
Toutefois, Mesibov observe que la simple exposition de l’enfant porteur d’autisme parmi les enfants dont les comportements sont normaux ne suffit pas à générer l’imitation de ces mêmes comportements par l’enfant handicapé.
Après les premières expériences de mainstreaming, il notait : « le problème que pose le mainstreaming n’est pas que les enfants non handicapés ont peu à offrir, mais plutôt que nous n’avons pas encore trouvé les meilleures méthodes pour utiliser ce potentiel ».
Alors Mesibov aura recours au concept de « mainstreaming inversé » pour la scolarisation des élèves autistes. Il renonce à placer des élèves porteurs d’autisme dans les classes ordinaires, mais prévoit d’envoyer des élèves non handicapés dans la classe des enfants autistes, dans le but de travailler avec eux pour leur apprendre de nouveaux comportements.
Mesibov élabore un modèle de mainstreaming après sept années d’expérimentation : certains groupes de jeu mis en place pour favoriser les échanges et les interactions entre enfants handicapés et non handicapés avaient pour conséquence de renforcer l’aptitude des enfants porteurs d’autisme à éviter les neurotypiques.
Mesibov opte donc pour une organisation plus approfondie du groupe concerné par l’intégration d’un élève autiste : il individualise la préparation de l’enseignant, la préparation des autres enfants, il étudie la taille du groupe, les activités, les règles de comportement : il ne laisse rien au hasard et se donne pour objectif d’assurer des bénéfices de ce travail à chacun des partenaires concernés : enseignants, enfants non handicapés et élève atteint d’autisme. Son principe réside dans le fait que tout le monde doit apprendre quelque chose, soit explicitement, soit implicitement : « Comme il en va de tous les objectifs appropriés, ceux de ce groupe doivent être spécifiques et simples à observer. Ceci est particulièrement important pour les élèves non handicapés, qui ont besoin d’un renforcement positif et d’avoir le sentiment de vraiment réaliser quelque chose. C’est ce sentiment d’aider et d’éduquer les autres enfants qui les fait revenir. Il est tout à fait stimulant d’entendre les enfants non handicapés se vanter dans les couloirs d’avoir appris à un enfant autiste à jouer à saute-mouton sur le terrain de basket ou d’avoir terminer toute une réussite avec un jeu de cartes. »
Les élèves non handicapés accomplissent leur désir d’aider l’autre et renforcent ainsi leur estime de soi. À la division TEACCH, les élèves non handicapés adorent d’ailleurs devenir l’ami que l’enfant porteur d’autisme reconnaît.
Dans cette optique, le travail initial de préparation à l’intégration est crucial. Dans le cadre du programme TEACCH, ce n’est pas une, mais plusieurs journées de travail qui sont dévolues, en début d’année scolaire, à la présentation du handicap aux enseignants et aux enfants non handicapés. Au cours des séances de préparation, l’accent est mis sur une description complète du handicap, et sur les objectifs du mainstreaming ou mainstreaming inversé, pour chaque enfant devant bénéficier de l’intégration.
Le but est aussi de dissiper les éventuelles craintes que pourraient ressentir les enseignants et les élèves qui intègrent.
« Au cours de ces réunions, nous espérons développer la compréhension de l’autisme et de la manière dont on peut éduquer les enfants autistes. En décrivant les déficits des enfants autistes, nous insistons principalement sur les déficits de langage, le retrait social, et les comportements inappropriés parce que ce sont ceux que les enfants non handicapés sont le plus susceptibles de rencontrer. Nous essayons de les aider à comprendre les relations entre les déficits et les comportements qu’ils observeront dans l’école ou dans la classe spécialisée. Nous décrivons également l’importance de l’apprentissage de comportements appropriés et la manière dont cela influera sur l’avenir des enfants autistes. Nous insistons sur le rôle que les enfants non handicapés peuvent jouer dans ce processus. Cette discussion initiale est suivie par des séances de milieu et de fin d’année pour parler de ce que les élèves ont observé et répondre à leur question. » (Mesibov).
Dans les années 90, le programme TEACCH était devenu le premier programme de renommée internationale ayant un mandat juridiquement valable à l’échelle d’un État : il englobait alors un réseau de sept centres régionaux (neuf en 2005), plus de 200 salles de classes à l’école publique (1 000 en 2006, à tous les niveaux scolaires : maternelle, primaire et secondaire) et de nombreux foyers à travers la Caroline du Nord. Depuis le lancement du programme, les formules d’aide extrascolaire incluant par exemple des camps de vacances se sont développées. Des services pour adultes comportant des structures résidentielles et différentes formes d’intégration sociales incluant des activités de loisir et de travail ont été mis en place progressivement.
Depuis ses débuts en 1972, la division TEACCH a réalisé plus de six mille évaluations.
Il est aussi prévu un modèle spécifique d’intervention dans trois domaines complémentaires :
En 2006 le congrès annuel de TEACCH a rendu un hommage aux quarante ans de carrière d’Eric Schopler.
La position de TEACCH sur le « mainstreaming » reste sensiblement la même : trouver un équilibre entre l’environnement le moins restrictif possible (exigence de la Loi Américaine) et la réponse aux besoins éducatifs de l’enfant.
Les enfants sont tous dans l’école ordinaire, même en lycée, soit dans des classes spéciales (les classes TEACCH – l’intégration totale n’étant pas toujours la meilleure réponse à ces besoins à un moment donné, mais restant toujours un but), soit en intégration individuelle totale ou partielle.
Ce qu’ils ont le plus tenté de développer ces dernières années, c’est le « mainstreaming » à l’âge adulte via le « job coaching » (accompagnement au travail en milieu ouvert). »