Andreï Sakharov - Définition

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Père de la bombe H

Comparatif des champignons atomiques des différentes bombes employées lors de tests d'armes nucléaires, la Tsar Bomba en tête. Andreï Sakharov était contre un tel essai et n'a accepté de concevoir la réduction de 100 à 57 mégatonnes sur la demande de Khrouchtchev que dans la perspective de contribuer à l'obtention d'un moratoire international sur les essais nucléaires par la suite.

Il termine sa thèse en 1948 et est intégré à un groupe de recherche dont la tâche est de développer les armes nucléaires sous la direction de Tamm. Il est contraint par ordre de délaisser la recherche fondamentale au profit du programme de recherche appliquée destiné à rattraper le retard sur les Américains par Béria, le chef des services secrets, à qui Staline a confié cet objectif : Joseph Staline sait, de la part du président américain Truman, que ces derniers détiennent l'arme suprême depuis la conférence de Potsdam, et ont procédé à des tests.

La première bombe A soviétique, la RDS-1, est testée avec succès en 1949. Elle est conçue par Iouli Khariton. Sakharov confesse dans ses mémoires qu'elle a été conçue avec les moyens du bord, l'Union soviétique ne disposant pas, au sortir de la guerre contre les nazis, de l'infrastructure industrielle engagée par les américains pour le projet Manhattan. Ces recherches stratégiques sont engagées dans un site militaire secret au périmètre ultra-sécurisé, dans lequel Sakharov va évoluer une vingtaine d'années.

Dès 1950, Sakharov et Tamm sont les initiateurs du travail soviétique sur la réaction thermonucléaire commandée (la réaction thermonucléaire des isotopes d'hydrogène pour la production d'énergie électrique ou pour la production du carburant pour les réacteurs nucléaires). En 1953, ils inventent la bombe à hydrogène soviétique. Jusqu'en 1962, leurs travaux seront utilisés pour la conception et la réalisation des futures armes nucléaires soviétiques.

En 1960, il travaille dans l'équipe d’Igor Kourtchatov à la conception de la Tsar Bomba, une bombe H de 57 mégatonnes qui est à ce jour la plus importante bombe ayant explosé, l'équipe l'a conçu à la demande de Nikita Khrouchtchev en 4 mois. Son champignon s'éleva à 64 km d'altitude dans l'atmosphère, au dessus du site C de l'île de Nouvelle-Zemble située au delà du cercle polaire arctique, et l'onde de choc produite se propagea trois fois à la surface du globe terrestre.

Il développe également les idées de base et teste le premier générateur magnéto-cumulatif à explosif.

En 1962, Andreï Sakharov prend conscience que le complexe militaro-industriel est devenu un pouvoir autonome en URSS, et s'en inquiète : il en a la preuve lorsque deux instituts de recherche atomiques veulent faire exploser la même bombe, strictement identique sur le plan technique, pour des raisons liées à la concurrence interne (et non pas l'émulation) et l'attribution des crédits de fonctionnement ; Sakharov a eu de plus connaissance du discours de fin de mandat du président Eisenhower, prononcé un an auparavant, et avertissant des dangers que peut représenter le complexe militaro-industriel, émergeant dans l'histoire des États-Unis.

Cette prise de conscience est considérée comme l'amorce de la posture critique et humaniste de Sakharov en URSS.

Esprit libre de la Glasnost

La nouvelle politique de Glasnost amène le nouveau pouvoir soviétique à décider de la fin de son exil en 1986. L'anecdote concernant l'annonce de la fin de son exil est révélatrice : en pleine nuit, deux agents du KGB sonnent à sa porte accompagnés de deux employés du téléphone réveillés dans l'urgence, pour installer un poste chez lui. En guise de test de raccordement, l'appareil sonne et c'est Mikhaïl Gorbatchev à l'autre bout du fil qui lui annonce qu'il peut revenir à Moscou, et « Bonner » aussi. Andreï Sakharov lui répond qu'il s'agit de son épouse.

Réhabilité, il est élu en 1988 au présidium de l'Académie des sciences. En mars 1989, il est élu à la nouvelle Chambre de l'Union soviétique, le Congrès des députés du peuple.

Ce nouveau cénacle est le lieu d'un affrontement politique entre les partisans d'un conservatisme et les progressistes réclamant des réformes. Les conservateurs tentent de le déstabiliser, dénonçant ses allégations selon lesquelles des officiers de l'Armée rouge auraient reçu des directives d'achever les soldats russes tombés des hélicoptères de combat en Afghanistan, afin d'éviter leur capture par les Moudjahidin. Ces déclarations seraient indignes de la charge d'un député.

Sakharov répartit que cette guerre lancée contre une population voisine, décidée par un système politique sans responsable blâmable, est une honte pour la nation et qu'elle a déjà causé la mort d'un million d'Afghans.

Une scène extraordinaire a alors lieu au parlement soviétique, peu avant la disparition de Sakharov, qui semble faire trembler le promoteur de la Glasnost qu'est Michael Gorbatchev : il réclame l'abrogation de l'article 6 de la constitution de l'URSS, sur la base duquel est instauré le régime de parti unique. Gorbatchev répond que cela n'est pas envisageable et qu'il ne saurait pas lui-même comment on peut faire cela. S'ensuit un échange où le maître du Kremlin, effaré, tente d'éteindre la polémique, les sessions du parlement étant retransmises à la télévision nationale.

Graffiti hommage à Andreï Sakharov, sur le mur de Berlin ; photo prise le 25 juillet 1991 ; la constitution de l'URSS n'aura pas survécu plus de deux ans après son départ.
Image : Bundesarchiv.

Il décède à Moscou le 14 décembre 1989. Sa popularité était devenue immense, en raison de la liberté d'expression dont il avait pu bénéficier à partir de 1988 et de sa notoriété publique. Il emporte avec lui un projet de constitution pour l'URSS basé sur les Droits de l'homme, document qu'il aura rédigé, annoté et révisé jusqu'aux derniers jours.

Les cortèges accompagnant ses funérailles illustrent non seulement cette popularité mais aussi l'espoir de réformes attendues par la population de l'Union soviétique, touchée par le trublion politique qui, non content d'avoir résisté à la brutalité des méthodes des services secrets, a usé de toute sa liberté d'opinion à compter de son retour d'exil face à la phraséologie de langue de bois des tenants du régime. Andreï Sakharov ne s'est jamais laissé intimider et ses surenchères laissaient apparaître un vif esprit dénué de toute affiliation partisane, singularité en regard de la Nomenklatura que la population de l'URSS ne manqua pas de relever.

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