Château de Lunéville - Définition

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L’œuvre de Germain Boffrand pour le Versailles lorrain

Vue de la façade

Après un siècle de désastres, le règne de Léopold (1697-1729) est une période de prospérité dont bénéficie tout particulièrement Lunéville.

À son arrivée en Lorraine, Léopold, qui s’installe à Nancy, s’intéresse très vite à Lunéville, où il prévoit probablement de séjourner. Ainsi, dès 1698, il fait entreprendre des réparations importantes dans le château construit par Henri II. La plupart des pièces sont refaites et on construit un petit bâtiment pour loger les gardes. Parallèlement, Léopold ordonne la reconstruction partielle du Palais Ducal de Nancy.

Tout cela n’est que le prélude à ce qui va être entrepris à partir de 1702.

À cette date, début de la guerre de succession d'Espagne, les troupes de Louis XIV occupent les possessions ducales pourtant neutres y compris Nancy et y demeurent jusqu’à la fin du conflit en 1714. Léopold, refusant cette occupation de fait, décide de quitter sa capitale. Son choix se porte naturellement sur sa propriété de Lunéville, dans laquelle il a déjà beaucoup investi.

Toutefois, malgré les travaux récents, l’ancien château n’est pas assez vaste pour recevoir la cour nombreuse de Léopold. Sa démolition, alors décidée, va laisser la place à un immense chantier de reconstruction. À travers cette décision se manifestent le désir et la volonté affirmées par Léopold d’affirmer sa légitimité et sa souveraineté comme l'a fait l'occupant avec son château de Versailles.

Raison supplémentaire pour choisir Lunéville : la distance entre cette ville et Nancy coïncide avec les normes de l’époque, soit environ une journée à cheval.

La chronologie des travaux reste difficile à établir. Elle s’échelonne de 1703 à 1723, date d’installation définitive de la cour à Lunéville. Le chantier avance, connaît une grande lenteur avec des périodes d’activité plus ou moins intenses, liées aux ressources financières du duc.

La première période des travaux consiste dans la création d’une avant-cour bordée par deux nouveaux bâtiments, dans le prolongement de l’ancienne construction. Elle est menée de 1703 à 1705 par Pierre Bourdict nommé en 1700 « premier architecte et directeur des ouvrages de sculpture » du duc. En 1708, l’architecte Nicolas Dorbay, qui travaille également au château de Commercy, prend la direction du chantier. S’ouvre alors une seconde campagne qui sera très active jusqu’en 1718. Enfin, une troisième campagne, qui comprend les travaux les plus importants, commence après un incendie en janvier 1719. C’est alors le plus grand chantier de Lorraine, dans lequel de nombreux artisans et artistes sont engagés.

Le nom de l'architecte français Germain Boffrand, qui est associé à la construction du château de Lunéville, n’apparaît en réalité qu’à partir de 1709, année où il présente à l’Académie les « plans et élévations qu’il a faits pour le chasteau de Lunéville, que Monsieur le Duc de Lorraine commence à faire rebastir selon ses desseins ». Boffrand, disciple et collaborateur de Jules Hardouin-Mansart, entre au service du duc et devient en 1711 son « premier architecte ». Les plans préparés par lui sont soumis au duc Léopold Ier qui choisit le projet définitif. Six projets différents sont aujourd’hui connus ; aucun n’étant daté, il est difficile de les classer chronologiquement de façon certaine. Nous savons cependant que plusieurs d’entre eux furent proposés pour la troisième et dernière campagne de travaux, qui commence en 1719, suite à un accident qui vient interrompre brutalement l’achèvement du chantier : un incendie se déclare dans la nuit du 3 janvier et détruit en quelques heures toute la partie sud-est comprenant les appartements ducaux et une partie du corps central. À la faveur de cet accident, Germain Boffrand prépare de nouveaux plans qu’il doit modifier plusieurs fois avant d’obtenir l’accord du duc. Il faut préciser que Léopold Ier, n’ayant pu obtenir les soutiens financiers qu’il espérait, vise à l’économie et souhaite rétablir « l’aile brûlée » telle qu’elle était avant l’incendie, en utilisant les matériaux récupérables.

Le projet définitif de plan en H est, dans son ensemble, celui que présente Germain Boffrand en 1745 dans son Livre d’architecture. Il restera toutefois inachevé puisque l’aile qui devait longer la Vezouze au nord n’a jamais été construite. Faut-il évoquer les difficultés financières du duc Léopold dans cette interruption prématurée de la construction ? Il est évident que Germain Boffrand ait souhaité voir son projet achevé : c’est en effet dans sa totalité qu’il le présente une vingtaine d’années après la fin des travaux dans son Livre d’architecture où il explique du reste que « l’aile gauche du côté de la rivière n’est pas faite et étoit destinnée aux logements des Princes Étrangers ».

Outre la contrainte financière, l’architecte doit vaincre les obstacles naturels. Le terrain offre une dénivellation importante d’est en ouest, tout en dominant la rivière du côté nord, où le sol est très marécageux. De plus, l’emplacement de l’ancien château était trop limité pour une construction d’une telle ampleur, d’où l’obligation d’acheter et de démolir des maisons, notamment pour la réalisation du parc.

Celui-ci et les jardins prolongeant à l’est une terrasse sont appelés les « Bosquets » dès le début des travaux. À partir de 1710, ils prennent une extension considérable et sont aménagés par Yves des Hours, un disciple de Le Nôtre. À partir de 1724, Louis de Nesle complète l’œuvre d’Yves des Hours. Pour aménager tout cet espace, il a fallu combler les anciens fossés, canaliser la rivière et raser plusieurs constructions. On fait appel à l’ingénieur Didier Lalance pour les « jets d’eau et cascades », et à Philippe Vayringe qui réalise en 1732 une « machine à élever les eaux de la Vezouze et les conduire dans les jardins ». De nombreux artistes tels que Barthélemy Guibal (entre autres) agrémentent les parterres de sculptures.

Le 27 mars 1729, la mort de Léopold a pour conséquence l’arrêt de tous les travaux. L’héritier de la couronne ducale, François-Étienne, que son père avait envoyé terminer son éducation en Autriche, laisse la régence de ses États à sa mère, Élisabeth Charlotte d’Orléans.

La duchesse vit au château, entourée de ses deux filles et de son troisième fils, le prince Charles-Alexandre. C’est elle qui fait construire en 1733 la « salle de comédie », dans le prolongement des appartements ducaux, au sud-est du château. Elle y fait transporter à partir de 1735 une partie des décors de l’Opéra de Nancy réalisés par l’architecte italien Antonio Bibiena. Avant la construction de ce premier théâtre, les représentations théâtrales, qui étaient l’une des distractions favorites de la cour, avaient lieu sur une scène démontable installée dans les jardins.

La fin de la guerre de succession de Pologne oblige la duchesse régente Élisabeth-Charlotte d’Orléans à quitter à son tour Lunéville pour se retirer à Commercy(6 mars 1737). Son départ, qui symbolise la future cession de la Lorraine à la France et la disparition de l’ancienne dynastie, donne lieu à de véritables scènes d’hystérie de la part d'une foule désespérée et désireuse de montrer son attachement à la famille ducale.

Le 3 avril suivant, Stanislas Leszczyński arrive à Lunéville. Beau-père du roi de France Louis XV, ce roi de Pologne en exil, détrôné deux fois, reçoit, suite au Traité de Vienne (1738), le duché de Lorraine et le duché de Bar qui doivent à sa mort entrer dans le domaine royal français. Il ne sera en réalité qu’un duc nominal, pour ne pas dire un souverain fantoche, ayant renoncé à tout pouvoir effectif au profit du chancelier Antoine-Martin Chaumont de La Galaizière qui prépare sans ménagement les duchés à la perte totale de leur indépendance. À défaut de pouvoir politique, Stanislas se contente de mener une vie princière au milieu d’une cour importante. Il ne garde en effet une grande liberté que dans le domaine intellectuel et artistique, et place ainsi la Lunéville parmi les plus brillantes cours européennes du XVIIIe siècle.

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