La collégiale Saint-Tugal de Laval était située à Laval en Mayenne. Elle était liée à la paroisse Saint-Tugal de Laval. La collégiale fut démolie en 1798. Lors du rétablissement du culte en 1800, il ne pouvait être aucunement question ni du rétablissement du chapitre ni de celui de la paroisse de Saint-Tugal qui se trouva réuni tout naturellement à celle de la Trinité.
En 1170, Guy V de Laval, sire de Laval, avait dans son château deux chapelains nommés Guyomard et Ruello. Il paraît que les offices qu'ils exerçaient étaient dès cette époque des bénéfices en règle. Les chapelains des seigneurs n'étaient pas alors chargés seulement de célébrer la sainte messe ; ils chantaient aussi les heures canonicales auxquelles il était généralement d'usage d'assister. Les chapelains du château de Laval exerçaient même les fonctions curiales à l'égard du seigneur et de sa famille.
Guy V, voulant que le service divin se fit avec plus d'éclat et de régularité, fonda dans sa chapelle une collégiale composée de douze prébendes. L'évêque du Mans, Guillaume de Passavent approuva cette fondation par un décret du 17 juillet 1170. Ce décret énumère les biens donnés par le fondateur, et qui semblent d'une valeur assez minime, même pour le temps de la fondation. Nous verrons plus tard, au XVIIIe siècle, quels développements ces faibles commencements auront pris. Guillaume de Passavant, dans le décret dont nous parlons, réserve pour lui et pour ses successeurs, une des douze prébendes; clause qui a toujours été exécutée et en vertu de laquelle l'évêque du Mans fut toujours considéré comme premier chanoine du chapitre. Il ordonne encore que, parmi les chanoines, il y aura cinq prêtres pour succéder à Guyomard, Ruello, anciens chapelain et à Jean le Roux, (Joannis Rufi), Guy de Raffé et Benoît. Ces trois derniers devaient être déjà en possession de leurs prébendes, comme les deux autres: ce qui fait voir que déjà la fondation était exécutée et le chapitre en exercice, avant le décret d'approbation.
La fondation du chapitre fut confirmée par une bulle du pape Lucius III, du 9 juin 1183. Treize ans s'étaient déjà écoulés depuis l'approbation de l'évêque du Mans, et avaient amené, à ce qu'il paraît, plusieurs modifications. La bulle donne au chapitre le nom de Chapitre de l'Église de Sainte-Marie du château de Laval; elle exprime des revenus déjà plus considérables que ceux mentionnés par le décret de 1170.
Entre autres elle parle de la dîme de toute la Coutume de sel, de celle de tout le minage, de la dîme Exartorii ; etc.. Le chapitre avait en outre le patronage de plusieurs églises et les dîmes qui y étaient attachées. Enfin la bulle lui attribue Donationem regiminis scholarum urbis Lavalli, qui paraît être le droit de nommer les maîtres d'école, plutôt que la direction de l'enseignement. La chapelle du chapitre existe encore au château de Laval.
Dans cette chapelle on conservait avec vénération les reliques de Saint-Tugal, Évêque de Tréguier, qui avaient été apportées à Laval dans le IXe siècle. Les chroniqueurs placent cette translation en l'année 870 ou 878. Une légende de l'office du saint, qui était propre au chapitre de Laval, disait qu'un Évêque de Tréguier nommé Gorennan, fuyant devant une invasion de Normands et emportant avec lui le corps de son saint prédécesseur, était venu se réfugier à Laval, où il avait reçu un si bon accueil, que, pour témoigner aux habitants sa reconnaissance, il leur laissa la plus grande partie de la précieuse relique. Une vieille tradition consignée par Jacques Le Blanc de La Vignolle, dans son Mémoire sur la ville de Laval, rapporte différemment la manière dont Laval s'était enrichie de ces reliques. Ce qui est certain, c'est que la plus forte portion du corps de Saint-Tugal est depuis bien des siècles conservée à Laval.
En 1208, Guy VI de Laval, sire de Laval, approuva et confirma tant pour lui que pour ses successeurs, les donations que son père avait faites au chapitre de Notre-Dame du château. Nous trouvons cette particularité dans plusieurs mémoires qui sont parmi les manuscrits de M. La Bérangerie. Ils ajoutent que vers la même époque, les chanoines sortirent du château et s'établirent dans l'église de Notre-Dame du Bourg-Chevreau. Cette église avait été commencée en 1046 par Guy II de Laval. Les reliques de Saint-Tugal furent laissées dans la chapelle du château, à laquelle un chapelain resta attaché. Des chapelains furent aussi, fort anciennement attachés au chapitre, sans qu'on puisse en indiquer l'époque précise. Ils existaient antérieurement à 1253; au XVe siècle, ils étaient au nombre de cinq. Il y avait des fondations particulières pour eux, et leurs bénéfices n'étaient point comptés parmi les biens du chapitre.
Au XVe siècle, les seigneurs de Laval accrurent et enrichirent beaucoup le chapitre par leurs libéralités. En 1402, Guy XII de Laval et Jeanne de Laval son épouse lui donnèrent une rente de 100 livres tournois pour le chant des heures canoniales qui jusqu'alors n'avait pas été complet. Ils établirent que désormais une prébende serait affectée à un maître de psalette.
Peu d'années après, les reliques de Saint-Tugal furent transférées de la chapelle du château à l'église de Notre-Dame du Bourg-Chevreau. Un décret de 1407 ne donne pas au chapitre d'autre nom que celui d'église collégiale de Saint-Tugal ; ce qui indique que les reliques y étaient transférées à cette époque, les chanoines n'ayant pu recevoir ce nom qu'après la translation
On reconstruisit aussi l'église, qui prit dès lors le nom du saint Évêque de Tréguier. Les travaux furent conduits lentement, abandonnés et repris plusieurs fois; car Guy XIV de Laval mort en 1484; donna par son testament une somme annuelle de 2 000 livres tournois pour être employée aux travaux, jusqu'à parfait achèvement. Le Blanc de La Vignolle dit que les voûtes du chœur avaient été terminées en 1470 et que la reine de Sicile, Jeanne de Laval, femme de René Ier d'Anjou, avait fait construire ce bâtiment resté inachevé, nommé vulgairement l'Édifice et dont il existe encore maintenant des portions.
Un mémoire de 1746 qui est parmi les pièces de M. La Bérangerie porte que l'édifice fut construit par les ordres de la comtesse Anne de Laval à qui le Pape Nicolas V, par une bulle du 13 juillet 1447, permit d'employer à cet usage une somme que son grand père maternel Jean de Laval avait laissée pour agrandir l'église de Montsûrs, ce qui était devenu inutile, le chapitre établi en cette église ayant été supprimé. En 1444 le chapitre de Saint-Tugal fut considérablement accru par la réunion qui y fut faite du chapitre des Trois-Maries de Montsûrs, et il prit une grande importance par la création d'un doyen, qui lui fut donné pour chef.
Cette nouvelle organisation fut approuvée par une bulle du Pape Eugène IV, le 13 octobre 1445. La comtesse Anne qui avait opéré la réunion des deux chapitres de Laval et de Montsûrs, et commencé les nouvelles constructions appelées L'édifice, donna pour les reliques de Saint-Tugal une châsse d'argent massif, et fît faire au chevet de l'église une grande vitre, fort admirée autrefois, et dans laquelle on l'avait représentée à genoux.
Si les doyens de Saint-Tugal avaient surtout dans les commencements un revenu bien supérieur à celui des chanoines, leur autorité se réduisait à peu de chose ; ils n'avaient aucune juridiction sur le chapitre et se trouvaient obligés de suivre en tout l'avis de la majorité, n'ayant point voix prépondérante dans les délibérations. Ils ne présidaient point au chœur et n'officiaient pas quand ils le voulaient ; ces droits appartenant au semainier, le doyen n'en jouissait anciennement que quand il faisait sa semaine. Plusieurs doyens la faisaient à leur tour, d'autres ne voulaient pas s'y astreindre. On les invitait à officier aux grandes fêtes ; mais ils n'aimaient pas ces invitations, prétendant avoir droit par eux-mêmes. Dans le XVIIe siècle les chanoines rédigèrent une consultation pour demander quelles étaient les règles générales dont ils pourraient faire l'application à leur chapitre
Pendant plus de deux siècles, les doyens de Saint-Tugal eurent seuls la qualité et les revenus de curés d'Andouillé, et n'y avaient que des vicaires amovibles. Ils n'y exerçaient probablement jamais leurs fonctions, et n'y allaient sans doute même pas. Peut-être affermaient-ils la cure aux vicaires.
Ce mode vicieux d'administration si opposé aux canons de l'église, ne fut changé que par un décret de M. De Lavardin, évêque du Mans, au 3 juillet 1666, qui établit à Andouillé un curé, vicaire perpétuel, en conservant au doyen de Saint-Tugal la qualité et les prérogatives de curé primitif, ainsi que les droits de patronage et de présentation de la cure. Il est certain qu'il s'éleva entre eux de graves contestations, et qu'en 1718 il y avait un procès pendant en parlement entre Jean Desmares, doyen de Saint-Tugal, et Charles Heaulmé, curé d'Andouillé. Quelques années après, un nouveau procès s'éleva entre M. Gaultier de la Ville Audray, doyen de Saint-Tugal et M. Benoît, curé d'Andouillé.
Guy XV de Laval, voulant donner plus d'éclat au chapitre de Saint-Tugal, obtint du cardinal de la Balue, légat en France, une bulle datée de Tours, du 13 février 1484, qui unissait à la prébende dont jouissait alors Mathieu Sauquet, les deux bénéfices connus sous le nom de chapelles des château de Laval et de La Gravelle, le premier chargé de quatre messes à célébrer par semaine au château de Laval, le deuxième de trois messes par semaine qui devaient être dites à la prison. L'union de ces trois bénéfices devait faire la dotation d'une dignité de chantre, semblable à celle de la cathédrale du Mans.
La bulle fut fulminée par l'official du Mans, le 22 août 1485, et présentée le 28 novembre suivant au chapitre qui fit difficulté de la recevoir, parce qu'il avait éprouvé, à son grand dommage combien la dignité de doyen lui avait causé de discussions et de procès. Mathieu Sauquet ayant accepté ces conditions, le comte de Laval approuva et confirma le tout le 3 décembre, en présence de Nicolas de Laval, seigneur de la Roche-Bernard son neveu, futur Guy XVI de Laval, et aussi en présence de l'abbé de Clermont, des prieurs de Sainte-Catherine et d'Olivet, de René, seigneur de Feschal, d'Ambroise Cornilleau et de plusieurs autres. Mathieu Sauquet fut installé le 28 décembre 1484. Le chapitre fit faire un bâton d'argent duré pour marque de sa dignité aux fêtes solennelles ; Mathieu Sauquet paya dix livres et obligea tons ses successeurs à payer la même somme au chapitre pour l'indemniser de cette dépense.
En 1607, une prébende fut unie à la principauté du collège par transaction avec la duchesse de la Trémoille, mère et tutrice du seigneur de Laval. Jean-Baptiste Frin, chanoine reçu en 1754, étant mort le 9 octobre 1786, sa prébende qui était celle à laquelle nommait le chapitre fut réunie, à dater du 15 janvier 1787, à la sacristie. Ce qui ne veut pas dire que le revenu en fut donné au chapelain sacristain ; mais qu'il fut consacré aux frais du culte et du service divin.
À dater de cette époque, voici quelle était la composition du chapitre, dans lequel, comme nous l'avons vu ci-dessus il y avait 18 prébendes. En conséquence le chœur se composait de deux dignitaires, le doyen et le chantre, et de douze simples chanoines, total quatorze membres. Le bas chœur se composait de cinq chapelains prêtres, dont le premier était curé de la paroisse de Saint-Tugal, le second était le sacristain du chapitre, les trois autres portaient les titres de chapelains du Clos-Doucet, des Gennettais et des Lignardières. Il paraît qu'ils remplissaient diverses fonctions, comme celles de diacre et de sous-diacre, et devaient assister à tous les offices.
Le seigneur de Laval avait la collation pleine et entière de la dignité de chantre et des douze prébendes de simples chanoines. Il présentait à la dignité de doyen, mais l'évêque s'en était réservé la collation. Le chapitre avait la nomination du principal du collège, sur la présentation de trois candidats que lui faisaient les habitants ; il nommait aussi son maître de chapelle; avant 1787 il nommait à une prébende réunie alors à la sacristie ; il était donc censé avoir la nomination à trois prébendes. Il avait la présentation de la cure de Saint-Tugal, mais la collation en appartenait à l'Évêque. Enfin il conférait de plein droit les quatre autres chapelles du bas chœur
Saint-Tugal n'était point un chapitre royal; il n'était pas très riche, et ses prébendes étaient moins productives que celles de Saint-Michel de Laval ; cependant c'était un corps distingué et dont on tenait, à honneur de faire partie. Il jouissait du titre de chapitre de l'insigne église de Saint-Tugal. Le doyen et le chantre partaient la soutane rouge dans les cérémonies ; ce qui ne se voyait guère que dans les chapitres de fondation royale.