Fraction de neutrons retardés - Définition

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Introduction

La fraction de neutrons retardés issus d'une fission nucléaire, notée β est le pourcentage de neutrons ne résultant pas immédiatement de la fission du noyau, parmi l'ensemble des neutrons produits par cette seule fission. C'est un paramètre physique intrinsèque à l'isotope du noyau fissile, qui détermine une grandeur de premier intérêt pour l'étude de la cinétique des réacteurs : la fraction effective de neutrons retardés, notée βeff.

Ces neutrons représentent moins d'un pourcent des neutrons émis par une fission nucléaire, mais leur présence est indispensable à la possibilité de la conduite d'un réacteur nucléaire.

Phénomène physique

Lors de la fission nucléaire d'un isotope lourd, le noyau initial se sépare en deux noyaux plus légers, dits fragments de fission, et émet simultanément 2 ou 3 neutrons, dits neutrons prompts. Les fragments de fission sont excédentaires en neutrons, et ne sont donc pas stables. Leur mode de décroissance préférentiel est la transformation interne de neutrons en protons (radioactivité "beta moins"). Cette décroissance par émission beta moins doit avoir lieu plusieurs fois avant d'aboutir à un isotope stable. Dans certains cas, la situation énergétique du fragment de fission fait qu'il est possible pour ce fragment d'évaporer un neutron hors du noyau : le neutron émis est alors dit retardé, car il n'a pas été émis lors de la fission, mais après une ou plusieurs décroissances beta d'un fragment de fission. On appelle précurseur le noyau qui va émettre le neutron retardé.

Ordres de grandeur

Ce paragraphe donne l'exemple de la fission d'un noyau d'uranium 235, fission actuellement prépondérante dans le fonctionnement du parc électro-nucléaire mondial. Pour la fission thermique de cet isotope, la fraction de neutrons retardés est de 0,65%. On note β = 650pcm, l'unité pcm (pour cent mille) étant celle utilisée en neutronique.

Un noyau précurseur issu de cette fission est l'isotope 87 du brome, issu directement de la fission de l'uranium 235 (avec une abondance statistique de 2,5%). Cet isotope est fortement excédentaire en neutrons (il en possède 87-35=52) puisque le brome stable en possède 45.

  • Pour se rapprocher de la vallée de stabilité, le noyau précurseur 87Br se transforme par radioactivité beta moins en 87Kr sous forme excitée (dans 70% des cas). La période radioactive de cette émission est de 55 secondes. Le temps moyen qu'il faut attendre jusqu'à la désintégration est donc de 55 / ln(2) = 80s.
  • Dans la plupart des cas (97,1%), le krypton se désexcite immédiatement par émission gamma, puis se désintègre par radioactivité beta moins deux fois, pour donner du 87Rb puis du 87Sr, stable. Aucun neutron n'a été émis.
  • Dans 2,9% des cas, le krypton se désexcite immédiatement en émettant un neutron de 250 keV, pour aboutir au 86Kr, stable.


Plusieurs ordres de grandeurs et conclusions sont à tirer de cet exemple :

  • L'émission de neutrons par l'intermédiaire de noyaux précurseurs est très rare. Pour le couple 87Br-87Kr décrit ci-dessus, il y a seulement 0,7*0,029 neutrons retardés par apparition de ce précurseur (apparition ayant elle-même une abondance limitée).
  • Le temps au bout duquel un neutron retardé est émis par un précurseur est grand devant la durée de vie moyenne d'un neutron dans un réacteur nucléaire (temps nécessaire au neutron pour se thermaliser, puis diffuser jusqu'à faire fissionner un noyau), qui est de l'ordre de 50 μs. C'est cette caractéristique fondamentale qui permet de contrôler la réaction en chaîne dans les réacteurs nucléaires
  • Les neutrons retardés sont émis à des énergies plus faibles que les neutrons de fission (de l'ordre de 2 MeV). C'est ce qui explique l'utilisation de la proportion de neutrons retardés effective βeff dans l'étude des réacteurs.

Groupes de neutrons retardés

L'exemple donné ci-dessus n'en est qu'un parmi d'autres. Dans le cas de la fission de l'uranium 235, plusieurs précurseurs existent et émettent des neutrons retardés. Tous n'ont pas la même période de désintégration, ni la même énergie d'émission des neutrons. Cependant, pour simplifier l'étude de la cinétique des réacteurs, on regroupe les précurseurs aux périodes comparables dans des groupes de périodes arbitraires. Ainsi, pour la fission de l'uranium-235, on retient généralement 6 groupes de neutrons retardés définis comme suit :

Groupes de neutrons retardés pour l'235U
Groupe Période (s) βi (pcm) Energie moyenne
1 55,7 21 250 keV
2 22,7 142 460 keV
3 6,22 123 405 keV
4 2,30 257 450 keV
5 0,610 75  ?
6 0,230 26  ?

La somme des fractions relatives βi vaut alors 650 pcm, proportion statistique de l'ensemble des neutrons retardés de fission.

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