Friedrich Fröbel - Définition

Source: Wikipédia sous licence CC-BY-SA 3.0.
La liste des auteurs de cet article est disponible ici.

L’influence de Fröbel

A la mort de Fröbel en juin 1852, on pouvait penser que l’œuvre de sa vie se soldait par un échec. L’interdiction des jardins d’enfants en Prusse eut d’abord pour conséquence d’empêcher la diffusion des jeux éducatifs de Fröbel dans le reste de l’Allemagne. Si ces méthodes pédagogiques ont fini par s’imposer dans le monde entier, on le doit dans une large mesure à l’action de Bertha von Marenholtz-Bülov (1810-1893) qui - tout comme Diesterweg - se lia d’amitié avec Fröbel dans les dernières années de sa vie et se fit après sa mort la propagandiste de ses théories sur les jardins d’enfants sous forme de conférences et d’expositions dans les principaux pays d’Europe : Grande-Bretagne, France, Suisse, Belgique, Pays-Bas et Italie. Aux Pays-Bas et en Suisse notamment, on assiste à la formation d’un mouvement Fröbel qui détermine l’essor des jardins d’enfants fröbéliens.

En Angleterre naît un mouvement fröbélien national autonome, la « Fröbel Society », qui allait devenir par la suite la « National Fröbel Union », animée par Johann et Bertha Ronge, Adele von Portugall, Emilie Michaelis et Eleonore Heewart ; la société publiait des manuels scolaires sur les jeux de Fröbel et créait des centres de formation de jardinières d’enfants. Aux Etats-Unis la diffusion des idées de Fröbel fut assurée par Elisabeth Peabody, Mathilde Kriege et Maria Kraus-Boelte. Dans les années 80 et 90 le mouvement Fröbel d’Amérique du Nord contribuera à l’introduction des jardins d’enfants au Japon.

Principale élève de Marenholtz-Bülow, Henriette Schrader-Breymann (1827-1899) fonda en 1873 la Maison Pestalozzi-Fröbel de Berlin où, s’inspirant des théories de ces deux pédagogues, elle mit au point sa propre pédagogie du jardin d’enfants : elle a joué un rôle important dans la diffusion des jardins d’enfants dans les pays scandinaves. De même, le mouvement Fröbel allemand a largement contribué dans la deuxième moitié du XIXe siècle au développement institutionnel de l’éducation préscolaire en Pologne, en Bulgarie, en Bohême, en Hongrie et en Russie, mais aussi en Espagne et au Portugal, comme le montrent de récentes études historiques. Le succès international rencontré par le programme pédagogique des jardins d’enfants de Fröbel s’explique par la nécessité de plus en plus fortement ressentie d’une prise en charge pédagogique des enfants d’âge préscolaire résultant de l’industrialisation : les concepts de garde d’enfants ou d’enseignement sur le modèle scolaire ne correspondaient plus à l’esprit du temps.

L’« éducation humaine » élémentaire par le jeu que proposait Fröbel, mettant en œuvre des fonctions qui mobilisaient manifestement toutes les forces de l’enfant, répondait mieux aux besoins de la société. Sa pédagogie du jardin d’enfants associait l’aspect socio-pédagogique de l’accueil et l’éducation élémentaire par le jeu, préparant ainsi l’enfant à l’étape ultérieure de la scolarisation sans lui imposer d’efforts intellectuels excessifs. Mais le programme des jardins d’enfants de Fröbel n’en reste pas moins redevable aux théories néo-humanistes : son idéal d’éducateur est de former des êtres humains plutôt que de fabriquer des citoyens « utiles ». Cette conception de la première éducation fondée sur la philosophie de la sphère devait connaître des transformations profondes au sein même du mouvement fröbélien dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Car si Marenholtz-Bülow a contribué par son action à sauver les jardins d’enfants de Fröbel de l’oubli, elle les a aussi interprétés en termes polytechnico-fonctionnels et philosophico-culturels pour les adapter à l’esprit de l’ère industrielle. C’est ainsi que le jardin d’enfants est devenu en fait partie intégrante du système scolaire, fondé sur la reproduction et la légitimation socio-économiques.

Marenholtz-Bülow était pourtant parfaitement au fait des fondements de la pédagogie de Fröbel (la philosophie de la sphère) mais elle n’en a pas suffisamment tenu compte. La nouvelle conception de l’éveil par le jeu élaborée par Schrader-Breymann dans les années 1880 à partir des théories de Fröbel et le mouvement fröbélien du début de ce siècle orienté vers la psychologie du développement et la réforme pédagogique ont fait complètement abstraction de ces fondements théoriques du jardin d’enfants. Désormais, les activités de jardinage, les jeux de mouvement, les matériels de jeu, imaginés par Fröbel deviennent des moyens au service de l’objectif qui consiste en l’établissement des relations du monde de la vie et de la pratique quotidienne, par exemple les relations avec la catégorie didactique de l’« objet du mois » de Schrader-Breymann.

De nos jours, on continue à associer dans le monde entier, l’institution du jardin d’enfants au nom de son créateur, mais elle a subi des influences diverses et, depuis l’effondrement du mouvement Fröbel en Allemagne, au moins depuis 1945, il s’agit davantage d’un établissement d’éveil pédagogique et d’éducation préscolaire avec des objectifs nettement orientés vers la psychologie de groupe et la pédagogie sociale. L’institution n’est donc plus gouvernée par la pédagogie du jardin d’enfants originellement conçue par Fröbel. Il n’en reste pas moins que ses méthodes d’éducation élémentaire dans le cadre du jardin d’enfants, fondées sur le jeu, demeurent à l’honneur dans l’éducation préscolaire, où l’on utilise encore aujourd’hui ses matériels de jeu, en particulier les « boîtes de construction » ("dons » 3 à 6). La manipulation constructive de ces matériels simples permet la concentration sur l’objet et l’acquisition d’une expérience diversifiée des propriétés des choses, par des activités en commun de construction et de création de formes qui favorisent également l’apprentissage social et répondent ainsi à l’exigence d’« unification » de la vie formulée par Fröbel.

Page générée en 0.119 seconde(s) - site hébergé chez Contabo
Ce site fait l'objet d'une déclaration à la CNIL sous le numéro de dossier 1037632
A propos - Informations légales
Version anglaise | Version allemande | Version espagnole | Version portugaise