La Guerre éternelle - Définition

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Autobiographie et guerre du Vietnam

Dans la préface à l'adaptation en bande dessinée de son roman, Joe Haldeman répond à la question « Pourquoi j'ai écrit La Guerre éternelle ». L'auteur y raconte sa conscription pour la Guerre du Vietnam, son arrivée sur le terrain en 1968 et son évacuation sanitaire par hélicoptère en septembre de la même année. Quelques deux cents blessures lui valent cinq mois d'hôpital, tandis que ses quatre compagnons sont morts au combat.

La Guerre éternelle est un roman qui s'inspire directement de l'expérience vécue de l'auteur pendant son année au Vietnam et la scène d'ouverture du roman donne immédiatement le ton. La séance d'instruction sur les « huit manières de tuer un homme silencieusement » est en effet directement tirée de la biographie de l'auteur qui assista à un cours similaire lors d'un stage d'entraînement dans le Missouri, juste avant de s'embarquer pour l'Asie. La guerre du Vietnam en tant qu'événement historique est d'ailleurs directement évoquée dans le roman, car la plupart des officiers-instructeurs du récit sont présentés comme des vétérans.

Il semble donc juste d'affirmer avec Jacques Sadoul que le roman de Joe Haldeman est une « allégorie de la guerre du Vietnam et de son horreur absurde ». Autre élément autobiographique marquant, Joe Haldeman a donné à l'un des personnages principaux de son roman le nom de jeune fille de son épouse, Marygay Potter.

Manipulations militaires

Si Joe Haldeman évoque au cours de son roman quelques grandes batailles de l'histoire militaire comme la Bataille de Điện Biên Phủ ou celle d'Hastings, des factions politiques comme le POUM de la Guerre d'Espagne ou les écrits théoriques de Carl von Clausewitz, son roman se focalise surtout sur le problème des manipulations militaires, ces méthodes employées par l'armée pour conditionner les individus et s'assurer qu'ils iront au bout de leur contrat. Joe Haldeman en propose une vision d'autant plus contrastée qu'il oppose la condition de soldat à la gigantesque machine militaire qui fonctionne au plus haut niveau de l'État. À cet égard, le roman prend parfois des accents de dystopie militaire.

Les manipulations militaires dénoncées dans le roman finissent par régir presque tous les domaines de la vie d'un soldat engagé :

  • domaine psychologique : présentation de l'ennemi sous un jour monstrueux et bestial, traitement hypnotique à l'insu des soldats, création subliminale réflexe conditionné de type pavlovien ;
  • domaine sexuel : liberté sexuelle imposée dans les dortoirs pour éviter les tensions au sein d'un groupe et rendre supportable la promiscuité ;
  • domaine financier : paiement d'une grosse solde en fin de contrat, mais les périodes de repos se font en général sur une planète de l'armée où la vie est très coûteuse et la solde vite dépensée ;
  • domaine social : pression sur les ANPE terriennes pour qu'elles empêchent les soldats en fin de contrat de trouver un emploi et ainsi les contraignent à se réengager ;
  • domaine militaire : promotions de grade basées sur les simples statistiques de survie des soldats concernés, manipulation des ordres de mission ;
  • domaine médiatique : censure militaire sur les interviews télévisées de soldats rentrés du front, manipulation de l'information.

Thème de la surpopulation

En abordant le thème de la surpopulation et de ses solutions eugénistes, Joe Haldeman s'inscrit dans une tradition littéraire propre à la science-fiction qui débute dans les années 1960, avec la nouvelle Soleil vert de Harry Harrison et Tous à Zanzibar de John Brunner et se poursuit dans les années 1970 avec Les Monades urbaines de Robert Silverberg ou L'Anneau-Monde de Larry Niven.

L'auteur apporte deux solutions au problème économique et social de la surpopulation en orientant sa réflexion à la fois sur les mœurs et sur la technologie. Alors qu'Harry Harrison transformait les personnes âgées en nourriture industrielle, que John Brunner imposait des lois génétiques strictes, que Robert Silverberg imaginait de gigantesques cités verticales et que Larry Niven proposait les loteries de la reproduction, Joe Haldeman impose aux citoyens du monde l'homosexualité universelle comme meilleur moyen naturel d'empêcher les naissances. Le système prévoit également de remplacer tout individu décédé par la « vivification » d'un nouvel individu grâce à des procédés artificiels. Sur ce dernier point, Joe Haldeman semble s'inspirer directement du roman d'Aldous Huxley, Le Meilleur des mondes, qu'il cite expressément au fil du roman.

Chocs du futur

Au cours du roman, Joe Haldeman reprend certaines thèses du sociologue et futurologue américain Alvin Toffler exposées dans Future Shock (Le Choc du futur) en 1970. Alvin Toffler décrit une société occidentale dont les individus sont confrontés - en des laps de temps très courts - à des changements sociétaux et technologiques si rapides qu'ils n'ont pas le temps de les assimiler. Le choc du futur, c'est ce décalage de plus en plus grand entre l'individu et son environnement culturel et technique.

Joe Haldeman intègre ces idées à son roman au niveau sociologique et technologique en les combinant aux effets d'accélération temporelle induits par les vitesses relativistes de ses engins spatiaux. Les vaisseaux qui sortent des collapsars sont confrontés à des engins ennemis dont la technologie a entre-temps progressé sur plusieurs centaines d'années. Ainsi, les soldats qui sont en permission sur la planète Terre ne se reconnaissent plus dans les mœurs totalement transformées d'une époque qui n'est plus la leur. Ce sentiment de décalage avec sa propre culture est lui-même tiré de l'expérience personnelle de Joe Haldeman à son retour du Vietnam, dans une Amérique transformée par la pensée de 1968.

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