Les noms des grands nombres (supérieurs au trillion) ne sont pratiquement jamais utilisés, du moins dans un contexte de communication normale. De nombreux systèmes ont été proposés pour nommer des grands nombres, mais aucun ne semble avoir eu d'utilité pratique.
Quelques grands nombres ont réellement un sens pour l'homme, et sont d'un usage relativement courant jusqu'au trillion. Au delà, les noms de grands nombres n'ont plus guère qu'une existence artificielle, dans les définitions mathématiques, et il n'y pas d'occurrence de ces mots dans le langage courant.
Dans l'usage courant, ces grands nombres sont exprimés avec la notation scientifique. Avec cette notation, qui existe depuis les années 1800, les grands nombres sont exprimés par un dix et un nombre en exposant. On dira par exemple : « L'émission en rayons X de cette radio-galaxie est de 1,3·1045 erg ». Le nombre 1045 se lit simplement « dix puissance quarante-cinq » : c'est facile à lire, facile à comprendre, et beaucoup plus parlant que « quattuordécillion » (qui présente de plus l'inconvénient de signifier deux choses différentes, suivant que la convention utilisée est l'échelle longue ou courte).
Quand c'est une quantité physique qui doit être désignée, ce sont les préfixes du système international qui sont préférentiellement utilisés. Tout le monde comprendra ce qu'est une « femtoseconde », alors qu'un « billiardième de seconde » sera difficile à comprendre.
Ce n'est donc pas pour leur utilité pratique que les grands nombres sont nommés, mais ils ont de tous temps fasciné ceux qui se sont penchés sur eux en essayant d'appréhender ce que « grand nombre » pouvait bien signifier.
Nicolas Chuquet écrivit un livre, Triparty en la science des nombres, où l'on trouve le premier exposé de l'usage moderne de grouper les grands nombres par paquets de six chiffres, qu'il séparait par des points (on remarquera que les noms employés par Chuquet ne sont pas tout à fait les noms modernes).
Ou qui veut le premier point peult signiffier million Le second point byllion Le tiers poit tryllion Le quart quadrillion Le cinqe quyllion Le sixe sixlion Le sept.e septyllion Le huyte ottyllion Le neufe nonyllion et ainsi des ault's se plus oultre on vouloit preceder. Item lon doit savoir que ung million vault mille milliers de unitez, et ung byllion vault mille milliers de millions, et [ung] tryllion vault mille milliers de byllions, et ung quadrillion vault mille milliers de tryllions et ainsi des aultres : Et de ce en est pose ung exemple nombre divise et punctoye ainsi que devant est dit, tout lequel nombre monte 7 quadrillions 453248 tryllions 043000 byllions 700023 millions 654321. Exemple : 7'453248'043000'700023'654321.
Cependant, l'ouvrage de Chuquet ne fut pas publié de son vivant. Une bonne partie en fut copiée par Estienne de La Roche dans un ouvrage qu'il publia en 1520, L'arismetique.
Cette description est celle qui correspond au système dit de l'échelle longue, où les préfixes correspondent aux puissances du million. Le bymillion de Adam (byllion pour Chuquet) correspond donc à 1012, et le trimillion / tryllion vaut 1018.
C'est à Chuquet que l'on attribue l'invention du système, mais les premiers termes existaient avant lui. Les mots bymillion et trimillion apparaissent en 1475 dans un manuscrit de en:Jehan Adam.
Chuquet ne précisa que les dix premiers préfixes; l'extension de son système aux nombres supérieurs a toujours provoqué des variantes dans les solutions retenues pour adapter les noms latins au suffixe -llion.
Le système de Nicolas Chuquet consiste à faire suivre les préfixes bi-, tri-,... du suffixe -llion, pour former les noms d'unité successifs. Dans le système original, qui correspond à l'échelle longue, chaque unité vaut 106 fois l'unité précédente. On a donc, de manière régulière :
Rang | Désignation | Valeur | Déduction |
---|---|---|---|
1 | mi-llion | 106 | = 1 000 000 1 |
2 | bi-llion | 1012 | = 1 000 000 2 |
3 | tri-llion | 1018 | = 1 000 000 3 |
4 | quadri-llion | 1024 | = 1 000 000 4 |
5 | quinti-llion | 1030 | = 1 000 000 5 |
6 | sexti-llion | 1036 | = 1 000 000 6 |
7 | septi-llion | 1042 | = 1 000 000 7 |
8 | octi-llion | 1048 | = 1 000 000 8 |
9 | noni-llion | 1054 | = 1 000 000 9 |
10 | deci-llion | 1060 | = 1 000 00010 |
Ces dix unités permettent d'atteindre 1060, ce qui suffit largement aux usages physiques normaux. C'est le système recommandé en 1948 par la neuvième conférence générale des poids et mesures (et rendu légal en France par le décret 61-501 du 3 mai 1961). Ce système régulier est celui dit de l'échelle longue. Les pays anglo-saxons tendent à utiliser un système irrégulier, l'échelle courte, où un billion vaut 109 et un trillion 1012 (les autres unités étant sans applications pratiques).
Les billiards, trilliards,... d'utilisation moins fréquente, se forment régulièrement sur les préfixes précédents: de manière régulière, un X-illiard vaut mille X-illions.
Au delà de dix, les noms sont régulièrement composés en utilisant comme préfixe le terme latin désignant le rang. La difficulté est alors de savoir compter en latin, et les termes correspondants souffrent souvent d'une orthographe mal stabilisée. Ainsi, on peut noter que le décret français introduit l'orthographe quatrillion au lieu du quadrillion traditionnel, sans que l'on puisse savoir si c'est un changement délibéré ou une simple erreur typographique.
Proposé par John Horton Conway et Allan Wechsler, ce système régularise et prolonge celui de Nicolas Chuquet. La première étape de son système consiste à normaliser l'écriture des préfixes latins, de 1 à 999 (dans le tableau qui suit, les tirets ne sont destinés qu'à faciliter la lecture, et ne font pas partie du nom de nombre).
N° | Unité isolée | Unité préfixe | Dizaine | Centaine |
---|---|---|---|---|
1 | mi- | un- | (n)déci- | (n)(x)centi- |
2 | bi- | duo- | (n)vinginti- | (n)du-centi- |
3 | tri- | tre(s)- | (n)(s)tri-ginta- | (n)(s)tre-centi- |
4 | quadri- | quattuor- | (n)(s)quadra-ginta- | (n)(s)quadri-ngenti- |
5 | quinti- | quinqua- | (n)(s)quinqua-ginta- | (n)(s)qui-ngenti- |
6 | sexti- | se(x)(s)- | (n)sexa-ginta- | (n)ses-centi- |
7 | septi- | septe(m)(n)- | (n)septua-ginta- | (n)septi-ngenti- |
8 | octi- | octo- | (m)(x)octo-ginta- | (m)(x)octi-ngenti- |
9 | noni- | nove(m)(n)- | nona-ginta- | no-ngenti- |
Les radicaux des unités peuvent prendre ou perdre des consonnes de liaisons:
Les chiffres sont énoncés dans l'ordre unité, dizaine, centaine; et quand le chiffre est un zéro, le terme correspondant est simplement omis.
Avec cette construction, un 421-llion s'appelle un un-vinginti-quadringenti-llion.
Dans la même publication, Conway propose de construire les radicaux latins pour les nombres supérieurs à mille de la manière suivante :
Ainsi, avec cette méthode, un 3_000_102-llion s'appelle un tri-lli-ni-lli-duo-centi-lli-on.