Pendant la période où le palladianisme connaissait un regain de popularité en Irlande, même les demeures modestes étaient construites sur le modèle néo-palladien. En Irlande, le style architectural palladien se différencie subtilement des réalisations anglaises. En adhérant comme les autres pays aux principes idéels de Palladio, il était souvent plus conforme à l’original. Peut-être parce que les architectes venaient directement du continent et n’étaient donc pas influencés par le palladianisme développé au Royaume-Uni. On peut aussi considérer[évasif] que l’Irlande était plus provinciale et la mode changeait plus lentement.
L’un des pionniers de l’architecture irlandaise Sir Edward Lovett Pearce, neveu de John Vanbrugh devint un fervent avocat du palladianisme en Irlande. Il était à l’origine l'élève de son oncle, mais rejetant le baroque, il partit trois ans étudier en France et en Italie, avant de retourner en Irlande. L’œuvre de sa vie fut la conception des anciennes Chambres du Parlement Irlandais à Dublin. C’était un architecte prolifique qui créa aussi la façade sud de la Drumcondra House en 1727 et le Cashel Palace en 1728.
L’un des exemples les plus notables du palladianisme en Irlande est Castletown House près de Dublin. Conçu par l’architecte italien Alessandro Galilei (1691-1737), c’est peut-être le seul édifice construit selon les proportions de Palladio.
Russborough House est aussi un autre brillant exemple palladien conçu par Richard Cassels, architecte d’origine allemande. Il créa également le Rotunda Hospital à Dublin et Florence Court dans le Comté de Fermanagh. Les maisons de campagne irlandaises de style palladien ont souvent de solides décors en plâtre de style rococo, dont nombre d’entre eux furent exécutés par les frères Lafranchini. Une grande partie de Dublin fut construite au XVIIIe siècle ce qui lui vaut la forte empreinte géorgienne. Le style géorgien est largement inspiré par le palladianisme. Cependant, à cause du piètre aménagement du territoire de la cité et de la pauvreté, Dublin comptait parmi les quelques villes ayant des logis insalubres au XVIIIe siècle. Ailleurs en Irlande après 1922, le plomb fut retiré des toits de propriétés palladiennes pour sa valeur marchande. Les demeures furent abandonnées en raison des taxes exorbitantes. Quelques édifices palladiens sans toit peuvent encore être trouvés dans la campagne dépeuplée d’Irlande.
Le style baroque, très répandu sur le continent européen, ne fut jamais vraiment au goût de l’Angleterre. Il fut rapidement remplacé pendant le premier quart du XVIIIe siècle lorsque quatre livres publiés au Royaume-Uni mettaient l’accent sur la simplicité, et la pureté de l’architecture classique :
Le livre en quatre volumes Vitruvius Britannicus de Colen Campbell eut un franc succès. Campbell était un architecte doublé d’un éditeur. Le livre était essentiellement un ouvrage comprenant quatre volumes et contenant des plans architecturaux d’édifices britanniques qui furent inspirés par les grands bâtisseurs de Vitruve à Palladio ; au début, principalement ceux de Inigo Jones, et plus tard, les tomes suivants contenaient dessins et plans de Campbell et autres architectes du XVIIIe siècle. Ces quatre livres contribuèrent au retour du palladianisme enraciné en Grande-Bretagne durant ce siècle. Leurs trois auteurs devinrent les plus chics et convoités pendant cette période. Grâce à son livre Vitruvius Britannicus, Colen Campbell fut choisi comme architecte pour concevoir la Stourhead House pour le banquier Henry Hoare I, un chef-d'œuvre qui devint une source d’inspiration pour des dizaines de demeures à travers l’Angleterre.
À la tête de la nouvelle école stylistique se trouvait l’aristocrate Richard Boyle 3e comte de Burlington, qui voyait dans le baroque un symbole de l’absolutisme étranger. En 1729, Lord Burlington, avec William Kent, conçut la Chiswick House. Cette maison était une réinterprétation de la Villa Rotonda de Palladio purifiée de ses éléments et ornements du XVIe siècle. L’absence d’ornementation allait être la caractéristique du style néo-palladien. En 1734, William Kent et Lord Burlington créèrent l’un des plus fins exemples du néo-palladianisme avec la Holkham Hall dans le comté de Norfolk. La demeure est décrite, par l’écrivain Nigel Nicolson, comme ayant le « plus bel intérieur palladien d’Angleterre ». Le bâtiment principal de la demeure suit les préceptes de Palladio. Cependant, les ailes gagnèrent en importance par rapport aux constructions de l’architecte italien. Kent les rattacha à la partie principale, leur donna presque la même importance que celle-ci, mais la ferme animale n’y avait plus sa place. Souvent, ces ailes étaient parées de portiques et frontons devenant presque des maisons de campagne à part entière, comme pour la Kedleston Hall. C’est le développement de ces flancs qui engagea le style palladien anglais dans une réelle évolution et non un simple pastiche de l’œuvre architecturale de Palladio.
Les styles architecturaux évoluent et changent pour convenir aux exigences de de chaque client. Lorsqu’en 1746, le Duc de Bedford, John Russell décida de reconstruire Woburn Abbey, il choisit le style néo-palladien, le plus en vogue à l’époque. Il choisit l’architecte Henry Flitcroft, un protégé de Burlington. Le style de l’architecte anglais, bien que palladien dans son essence, n’aurait pas été reconnu par Palladio lui-même. Le bloc central est petit ; seulement trois baies, le portique est tout juste suggéré. Deux importantes ailes prolongent ce bâtiment et contiennent une vaste suite de pièces qui remplacent les colonnades de l’architecte italien. Les bâtiments de ferme y sont reliés et élevés à hauteur du bloc central terminé par des fenêtres palladiennes pour garantir le style palladien. Ce développement du palladianisme fut répété un nombre incalculable de fois pour des demeures et des mairies du Royaume-Uni pendant une centaine d’années. Tombé en désuétude à l’Époque victorienne avec l'essor du néogothique, le style palladien connaît un nouveau regain de popularité grâce à Sir Aston Webb pour le ravalement de Buckingham Palace en 1913.
Les demeures anglaises de style palladien n’étaient plus conçues comme les simples maisons de campagne que l'on pouvait trouver en Italie. Elles n’étaient plus simplement des villas, mais des « maisons de pouvoir » selon John Summerson. Elles étaient les centres symboliques du pouvoir des Whigs qui gouvernaient le Royaume à cette époque.
Façade sud de la Stourhead House, conçue par Colen Campbell et réalisée de 1720 à 1724 par Nathaniel Ireson. Le plan de celle-ci est basé sur celui de la Villa Emo de Palladio. |