Soient deux photons intriqués, polarisés perpendiculairement l'un par rapport à l'autre. Ces photons sont dans un état superposé, avec deux possibilités : 1) Le premier photon est polarisé verticalement et le second horizontalement 2) L'état inverse. Alors la mesure de la polarisation d'un photon implique nécessairement que le second photon sera polarisé perpendiculairement au premier, quel que soit l'état de polarisation mesuré pour un photon (que l'on ne peut prévoir).
En effet, selon la mécanique quantique, avant la mesure, la polarisation de ces photons est indéterminée. Les photons sont dans un état superposé entre les polarisations horizontale et verticale, c’est-à-dire qu'il y a une chance sur deux d'obtenir une polarisation horizontale lors de la mesure, et une chance sur deux d'obtenir une polarisation verticale.
Étant donné que l'état de polarisation de chaque photon semble aléatoirement déterminé au moment de la mesure, comment expliquer que les deux photons soient toujours perpendiculaires ? Deux interprétations sont possibles :
En 1964, John Stewart Bell produisit un théorème permettant de quantifier les implications du paradoxe EPR, ouvrant la voie à l'expérimentation : dès lors la résolution du paradoxe EPR pouvait devenir une question expérimentale, plutôt qu'un choix épistémologique.
La technologie de l'époque ne permettait pas de réaliser une expérience testant les inégalités de Bell, mais Alain Aspect a pu le réaliser en 1981, puis en 1982, à Orsay, confirmant la validité des prédictions de la mécanique quantique dans le cas du paradoxe EPR. Cette expérience d'Aspect procédait d'une idée qu'il avait publiée dès 1976 mais que personne n'avait reprise depuis.
En 1988-1989, d'autres expériences (Maryland, Rochester), encore plus perfectionnées, ont permis de tester les intrications à très grande distance et de combler des petites failles expérimentales laissées ouvertes par les expériences d'Orsay.
Toutefois, si ces expériences impliquent que l'on renonce à l'une des trois hypothèses (on s'est décidé pour la non-localité, la mécanique quantique devenant une théorie physique non-locale), elles ne permettent nullement la transmission d'un signal plus vite que la lumière (sans quoi d'ailleurs soit la causalité, soit la relativité serait violée).
Niels Bohr a répondu immédiatement en rejetant les variables cachées locales, et en insistant sur le fait que les états quantiques n'existent pas tant qu'ils n'ont pas été mesurés. Avant la mesure, on ne peut que prévoir des probabilités d'obtenir certaines valeurs pour un état quantique. Il n'y a de déterminisme dans le résultat d'une mesure (probabilité égale à 1 de trouver le résultat attendu de la mesure) que si une mesure précédente a déterminé l'état quantique dans lequel se trouve le système après la première mesure, et tant qu'une mesure incompatible avec la première (mesure de la position, après avoir déterminé la quantité de mouvement, par exemple - puisque, dans ce cas, les opérateurs associés aux observables ne commutent pas) n'a pas détruit l'état quantique qui avait été induit par la première mesure. Actuellement, beaucoup de physiciens pensent que la décohérence quantique pourrait expliquer rationnellement cette propriété étrange des états quantiques.
Albert Einstein n'a jamais accepté le concept d'influence instantanée à distance impliqué par l'interprétation de Copenhague de la mécanique quantique, concept qu'il qualifiait "d'action surnaturelle à distance". Le débat entre Einstein et Bohr sur ce paradoxe a duré 20 ans, jusqu'à la fin de leur vie.