René Louis Huchon, né le 26 août 1872 à Paris d'une famille normande, décédé le 25 juin 1940 à Thivars (Lot-et-Garonne), est un universitaire français, néogrammairien, angliciste, spécialiste de philologie anglaise (c'est-à-dire de l'étude diachronique des vieil- et moyen-anglais, à partir de l'indo-européen reconstitué, en passant par le germanique commun, tout en comparant les langues anciennes apparentées et attestées). Appelé à la Sorbonne en 1908, il y enseigne jusqu'à sa mort tragique le jour même de l'armistice de juin 1940.
C'est à la Sorbonne, en effet, que premier spécialiste en France de sa discipline, il en occupe en 1927 la première chaire, créée tout spécialement pour lui. À partir de 1928, il assure la direction de l'Institut d'anglais, poste qu'il occupe jusqu'à son suicide patriotique. Ses publications portent essentiellement sur l'histoire de la langue anglaise. Son enseignement est à l'origine d'une école de pensée qui perdure, après avoir été relayée et développée par Marguerite-Marie Dubois, André Crépin et Léo Carruthers.
De famille normande, René Louis Huchon effectue ses études secondaires à Lisieux et Rouen. Après son Baccalauréat, il obtient une bourse de licence puis d'agrégation à Lyon. Étudiant d'Émile Legouis, il obtient sa licence en 1893, est reçu premier au concours de l'agrégation en 1896 et devient Docteur es Lettres en 1906, avec une thèse principale sur Un poète réaliste anglais, Charles Crabbe, 1754-1832, et une thèse complémentaire sur Mrs Montagu and her friends, an Essay.
Professeur au lycée de garçons de Cherbourg de 1896 à 1899, il est nommé maître de conférences de langue et littérature anglaises à la Faculté des Lettres de l'Université de Nancy (Meurthe-et-Moselle) en 1899, puis est appelé fin 1908 par l'équipe d'anglicistes de la Faculté des Lettres de la Sorbonne. René Huchon se spécialise dans le domaine de la philologie germanique qui englobe l'étude historique de l'ostique (gotique), du nordique (scandinave) et du westique (anglais, allemand, frison, néerlandais). Il occupe la première chaire de philologie anglaise créée en France à partir du 1er octobre 1927. Pendant de longues années, il se tient en contact étroit avec le grammairien Karl Luick, professeur à l'Université de Vienne, alors l'un des chefs de file de la science allemande, dominante en ce domaine.
Après quatorze années d'enseignement en Sorbonne, il publie le premier tome de son Histoire de la langue anglaise. Le deuxième volume voit le jour en 1930. Le troisième demeure inachevé, interrompu par sa mort. Ces ouvrages sont utilisés par les candidats au certificat de philologie anglaise, discipline appelée de nos jours linguistique anglaise diachronique. En 1928, René Huchon est chargé de la direction des études d'anglais à la Sorbonne (Institut d'anglais, 5 rue de l'École de médecine, Paris VIe), au sein d'un aréopage comprenant Émile Legouis, peu avant son départ à la retraite, Louis Cazamian et Charles Cestre, auxquels s'ajouteront plus tard Floris Delattre et Edouard Guyot.
Témoin de la Première Guerre mondiale, René Huchon ne supporte pas les hostilités de 1939, l'anéantissement de la Pologne, l'invasion de la France, l'exode de 1940 et l'armistice du 25 juin 1940. Parti pour Bordeaux, puis pour Saint-Bazeilles dans le Lot-et-Garonne, il fausse compagnie à sa famille et se suicide à Thivars probablement le jour même de l'armistice. Son corps n'est retrouvé que le 25 octobre suivant.
Dans l'allocution qu'il prononce lors de l'hommage rendu à René Huchon le 6 février 1941, Floris Delattre le décrit comme un professeur à l'enseignement « volontairement austère », un examinateur « qui considérait comme un devoir de chiffrer strictement la valeur du candidat qui comparaissait devant lui, mais qui se préoccupait, plus qu'il n'eût voulu le reconnaître, de la personnalité même de ses élèves, des moyens directs de les servir sûrement ».
Après la mort de René Huchon, sa veuve Marthe Henriette Huchon (1888-1976), professeur agrégée d'anglais au Lycée de jeunes filles de Versailles, est nommée lectrice à la Sorbonne en 1941 et reprend brillamment son enseignement de thème anglais pour les étudiants de licence et d'agrégation.