Le site de la Bucaille est un ancien parc de 73 hectares situé à la sortie du village d'Aincourt, dont la situation, en pleine campagne du Vexin, répondait parfaitement aux impératifs sanitaires d'isolement et de salubrité de l'air, tout en restant facilement accessible de l'agglomération parisienne.
Afin d'améliorer la qualité de l'air, on planta une véritable forêt de pins des Vosges sur la colline de la Bucaille devant recréer des conditions climatiques proches de celles de la moyenne montagne. En effet, la cure d'air frais et le repos constituaient le principal axe thérapeutique alors en vigueur, à une époque où les antibiotiques n'existaient pas. Ce fait conditionna le parti pris architectural des trois pavillons de cure : le Pavillon des Hommes (Pavillon Adrien Bonnefoy-Sibour dit "Pavillon des Tamaris"), le Pavillon des Femmes (Pavillon du Docteur Vian dit "Pavillon des Peupliers") et le Pavillon des Enfants, dit "Pavillon des Cèdres" (actuel Centre Hospitalier du Vexin ).
Situé en pleine zone de conflit armé, le sanatorium d'Aincourt dut, en juin 1940, évacuer les malades qui furent répartis dans différents centres de cure provinciaux protégés, en Bretagne notamment.
En octobre 1940, le Pavillon Bonnefoy-Sibour fut alors réquisitionné par les autorités militaires d'occupation pour devenir le premier « Camp d'Internement Administratif de la Zone Nord ». Des prisonniers "suspects" arrêtés pour fait de résistance, commencèrent à arriver le 5 octobre. Un peloton de gendarmes surveillait l'ancien sanatorium, devenu « Centre de Séjour Surveillé ». Initialement prévu pour 150 prisonniers, le camp en comptait plus de 667 en mai 1941. En tout, environ 1500 prisonniers, hommes et femmes, furent détenus à Aincourt, dont le député communiste Fernand Grenier. Des centaines furent déportés vers les camps nazis d'Auschwitz, Buchenwald et Sachsenhausen, d'où peu revinrent. Le Camp d'Internement d'Aincourt ferma ses portes le 15 septembre 1942 pour être remplacé par un centre d'entraînement de miliciens des Groupes Mobiles de Réserve (GMR).
Les premiers miliciens arrivèrent à Aincourt dès le mois de novembre 1942. Le 31 mars 1943 eut lieu la cérémonie de remise des fanions des GMR en présence de René Bousquet, Secrétaire Général à la Police du gouvernement de Vichy. Le camp des GMR fut dissous le 13 septembre de la même année.
Une stèle commémorative fut érigée sur le site en 1994. Elle stipule qu'Aincourt est considéré comme un camp de concentration. Chaque année, une cérémonie a lieu le premier samedi d'octobre, en mémoire des déportés qui furent internés là entre 1940 et 1942.
Le gros œuvre est en béton armé recouvert initialement d'un crépi. Les sols étaient revêtus d'un décor de granito. La construction est très soignée et fut réalisée sans grue, à l'aide d'échafaudages. On fit appel aux meilleurs spécialistes et ouvriers pour la mise en œuvre de techniques de pointe, pour l'époque. Des ouvriers cimentiers spécialisés, originaires de Vénétie, contribuèrent également à l'édification de cet ensemble qui fit la fierté de tous ceux qui y participèrent (ceux de la "Boucaille"), même des décennies après la fin des travaux.
En dehors des trois grands pavillons de cure, on construisit des bâtiments de service (buanderie, école), des bâtiments administratifs ainsi qu'un dépositoire/funérarium et des logements destinés au personnel médical. Une station d'épuration des eaux et même un château d'eau complétèrent cet ensemble d'une envergure exceptionnelle.
L'architecture élégante et sobre est représentative du style international en vigueur dans les années 1920-1930. Mais rarement un complexe hospitalier de cet envergure, conçu et réalisé en un temps record aura été aussi réussi. Les architectes ont su allier fonctionnalité avec souplesse des lignes, rompant avec la massivité et la monotonie traditionnelle pour ce type d'édifices. L'usage de la courbe vient ainsi tempérer les grandes lignes horizontales imposées par l'ampleur et la nature même du programme, les sanatoriums d'Etat développant souvent des proportions gigantesques, compte tenu des ravages que la tuberculose occasionnait dans la population, la maladie figurant au premier rang des priorités sanitaires de cette époque.
Le chantier du sanatorium d'Aincourt suscita un tel engouement dans l'opinion publique que des photos des différents stades de la construction furent commercialisées en cartes postales, dans les années 1930, par l'éditeur Thévenin.
En 1936, le sanatorium, alors au faîte de son fonctionnement, accueillait 430 tuberculeux.