Le diagnostic de CIV est possible pendant la grossesse, mais reste encore relativement rarement posé quand la communication est petite et de siège membraneux ou musculaire, ce qui n'est pas très grave puisque ces CIV n'ont pas de conséquence sur la grossesse ou l'accouchement et ne sont pas particulièrement associées à une anomalie chromosomique. Certains échographistes ne les recherchent d'ailleurs pas, et ce volontairement, estimant que ce diagnostic est une source inutile d'inquiétude parentale.
En soi, la découverte d'une CIV lors d'une échographie fœtale ne modifie ni le cours de la grossesse, ni les modalités d'accouchement et ne s'accompagne habituellement d'aucun retentissement sur la croissance du fœtus. Elle implique par contre :
CIV et amniocentèse : Rappelons en préambule de ce paragraphe que la décision finale de réaliser ou non cet examen relève des parents et d'eux seuls. Les médecins proposent, les parents disposent. Faire cet examen peut être considéré comme inutilement dangereux (même si les risques sont faibles, inférieurs à 1%) si d'emblée les parents savent qu'ils ne pourraient se résoudre à demander une interruption médicale de grossesse en cas d'anomalie chromosomique. Le seul intérêt serait alors de permettre à la famille de se préparer à accueillir un enfant « anormal » (par exemple porteur d'une Trisomie 21) plutôt que d'affronter brutalement cette réalité dans les minutes qui suivent l'accouchement.
L'attitude médicale de proposer ou non une amniocentèse après la découverte d'une CIV ne fait pas encore l'objet d'un consensus parfait :
CIV et interruption médicale de grossesse : Une CIV isolée n'amène pas à discuter d'une interruption médicale de grossesse (IMG), quelle que soit sa taille ou sa localisation, car il s'agit d'une malformation parfaitement curable. Une IMG ne pourrait être envisagée qu'en fonction d'autres anomalies associées, en particulier génétiques.
Cette attitude est d'autant plus fondée qu'il faut savoir qu'une CIV peut se fermer ou au moins se réduire spontanément pendant la grossesse elle-même. Ainsi, « il est urgent d'attendre » lorsqu'une CIV, même volumineuse, est découverte lors d'une échographie précoce, entre 12 et 18 semaines d'aménorrhée. Les bonnes surprises ne sont pas rares.
En l'absence de diagnostic antenatal, c'est habituellement la perception d'un souffle cardiaque à l'auscultation qui révèle l'existence d'une CIV.
Ce souffle est souvent absent lors des tout premiers jours de vie, en particulier quand le pédiatre examine le nouveau-né en salle de travail ou le lendemain de l'accouchement. Ceci est lié au fait que les pressions pulmonaires sont encore élevées et qu'il n'y a pas de shunt significatif au travers de la communication.
Le diagnostic de CIV est donc souvent retardé sans qu'il y ait eu d'erreur ou insuffisance médicale.
Quand le souffle est découvert, il est habituellement de faible intensité et reste isolé chez un enfant parfaitement bien portant par ailleurs, et ceci quelle que soit la taille de la communication. La réelle gravité ne pourra donc être appréciée que par la réalisation d'une échocardiographie, précisant la taille et la localisation de la communication.
En fonction des résultats de l'échographie, on pourra distinguer :
La présentation clinique dépend de la taille et de la position de la CIV. Elle est donc très variable, allant du nourrisson parfaitement asymptomatique en dehors d'un souffle cardiaque isolé au tableau de grande insuffisance cardiaque.
L'auscultation cardiaque note habituellement un souffle systolique diffus (« en rayons de roue ») dont l’intensité est inversement proportionnelle à la taille de la communication. L'intensité du souffle ne reflète donc absolument pas la gravité de la CIV (on pourrait même écrire au contraire...). C'est en prêtant attention aux bruits qui entourent ce souffle que le cardiologue pourra se faire une idée de l'importance de la CIV :
Dans une certaine mesure, les caractéristiques du souffle peuvent orienter vers le type anatomique de la CIV responsable :
Le nourrisson présente parfois des signes d' insuffisance cardiaque. se traduisant par des sueurs, en particulier sur le front et le cuir chevelu, très inhabituelles chez un nourrisson (cela peut aller d'un front un peu moite à des cheveux trempés comme à la sortie du bain) et une respiration rapide (polypnée) lors d’efforts tels que les pleurs ou la prise du biberon. Celle-ci est lente, entrecoupée de pauses et laisse des restes plus ou moins importants à chaque tétée. Ces difficultés d'alimentation s'accompagnent rapidement de troubles de la croissance.
La cyanose (coloration bleutée de la peau et des muqueuses) est normalement absente dans la CIV. Si une cyanose apparait, d'abord lors des colères puis de façon plus ou moins permanente, cela signifie :
Trois examens peuvent être utiles, la radiographie du thorax, l'électrocardiogramme et l'échocardiographie.
L'échocardiographie doppler : En pratique, cet examen, non douloureux et non irradiant suffit pour poser un diagnostic précis de la malformation et sauf exception pour apprécier son retentissement et sa gravité. L'image ci-contre nous montre une turbulence sanguine (en vert) traversant la parois inter ventriculaire (ligne verticale en gris), et allant d'un ventricule à l'autre (cavités ventriculaires en noir). Le doppler permet de quantifier le shunt (calcul du rapport du débit systémique sur débit pulmonaire). Cet examen permet également de détecter des anomalies cardiaques associées, d'évaluer le retentissement sur le ventricule droit et d'estimer les pressions des cavités cardiaques droites.
La radiographie du thorax : Obtenir un bon cliché (c'est-à-dire en inspiration forcée) chez le nouveau-né ou le nourrisson est une affaire délicate et tous les signes décrits ci-dessous peuvent être faussement présents sur un mauvais cliché.
L' électrocardiographie ou ECG : Cet examen reste normal dans les petites CIV. Lorsque le shunt est plus important, il peut montrer des signes d'hypertrophie (augmentation de la masse musculaire) du ventricule gauche, habituellement déjà bien objectivés par l'échocardiographie. L'ECG s'avère en fait utile essentiellement lorsque l'on veut s'assurer de l'absence d'hypertrophie du ventricule droit, moins bien analysée par l'échocardiographie et dont la présence témoignerait d'une élévation des pressions pulmonaires.
N.B : L'analyse de l'ECG pédiatrique diffère fortement de celle faite chez l'adulte. A ce titre, et sauf cas particulier, il ne faut pas tenir compte de l'interprétation automatique proposée par la plupart des appareillages actuels, source d'erreurs grossières.
De nombreuses classifications des CIV ont été proposées, essayant de traduire la diversité de leurs manifestations cliniques et de leurs conséquences. La plus usitée, bien que restant imparfaite est celle proposée par Nadas et Nouaille dont s'inspire fortement le tableau ci-dessous.
N.B: Les CIV type IV, non abordées dans cet article, correspondent à des CIV de taille variable associées à un rétrécissement situé entre la CIV et les artères pulmonaires (sténose médio-ventriculaire du VD, sténose infundibulaire, sténose valvulaire pulmonaire). Cet obstacle, en élevant les pressions dans le ventricule droit, diminue voire annule le shunt gauche-droit et « protège » la vascularisation pulmonaire comme le ferait un cerclage chirurgical de l'artère pulmonaire (voir plus bas).
symptôme | type Ia | type Ib | type IIa | type IIb | type III | type IV |
---|---|---|---|---|---|---|
dyspnée | absente | aux efforts intenses | permanente | aux efforts | variable | variable |
insuffisance cardiaque | absente | absente | présente ++ | présente + | absente | absente |
cyanose | absente | absente | absente | absente | présente | variable |
souffle systolique | intense + | intense + | intense | modéré | faible/absent | lié à l'obstacle |
rythme de galop | absent | absent | présent | absent/faible | absent | absent |
éclat du B2 pulmonaire | absent | absent | faible/modéré | modéré/fort | intense | absent |
vascularisation pulm. (Rx) | normale | faiblement augmentée | très augmentée | augmentée | diminuée, anormale | variable |
cardiomégalie (Rx) | non | faible | importante | moyenne | non | non (variable) |
taille de l'OG (écho) | normale | dilatation modérée | dilatation importante | dilatation importante | peu ou pas dilatée | peu ou pas dilatée |
diamètre du VG (écho) | normal | dilatation modérée | dilatation importante | dilatée, variable | normal | normal |
diamètre du VD (écho) | normal | normal | normal | normal | souvent augmenté | variable |
shunt Gauche-Droit | minime | moyen | important | moyen/important | minime/absent | minime/absent |
shunt Droit-Gauche | non | non | non | non | présent | variable |
pressions pulmonaires. | normales | faiblement augmentées | augmentées | très augmentées | très augmentées | normales/basses |
résistances pulmonaires. | normales | normales | peu augmentées | augmentées | très augmentées | normales |
indication chirurgicale | non | rarement | oui | oui, urgente | non | variable |
Abréviations : B2 : deuxième bruit du cœur - OG : oreillette gauche - VG : ventricule gauche - VD : ventricule droit.