L'église Saint-Jean-de-Malte, à l'angle de la rue d'Italie et de la rue Cardinale, à Aix-en-Provence est la première église gothique de Provence. Elle se situe à l'extrémité est de la rue Cardinale. Elle a été construite sur l'emplacement d'une première chapelle érigée par les Hospitaliers à leur installation à Aix, au XIIe siècle. Ses travaux de construction se seraient étalés de 1272 à 1277, même si ces dates ne sont pas avérées. Le clocher de l'église s'élève à 67 mètres. C'est le point le plus élevé de la ville d'Aix-en-Provence. Aujourd'hui Saint-Jean-de-Malte est une église paroissiale confiée à la Fraternité des Moines apostoliques. Grâce aux offices monastiques, elle est fréquemment ouverte et peut être visitée. Elle surprend par sa luminosité intérieure, la couleur de la pierre, sa sobriété, son orgue contemporain construit par Daniel Kern et ses nombreux tableaux.
Cette église fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis 1840.
Le premier bâtiment religieux bâti sur le site est une chapelle que les Hospitaliers érigent à leur installation à Aix, au XIIe siècle, sur le chemin d'Italie, à l'emplacement actuel de l'abside. C'est parce que les comtes de Provence de la maison de Barcelone Alphonse II et son fils Raymond-Bérenger IV décident d'y élire leur sépulture qu'est entreprise la construction d'un bâtiment beaucoup plus imposant. C'est ainsi que, sur les instructions du testament de la comtesse Béatrice de Provence, fille de Raymond-Bérenger, l'église Saint-Jean-de-Malte aurait été construite entre 1272 et 1277, dans un style gothique provençal, à nef unique et chapelles entre les contreforts, hors des murs de la ville, ce qui en fait le plus ancien monument gothique de Provence. Mais des problèmes de datation rendent les estimations incertaines.
Il semble quasiment certain que, sur les fondations de Saint-Jean-de-Malte se trouvait auparavant un autre bâtiment. Certains historiens affirment qu'il s'agit d'un temple à Minerve. Cette assertion provient de ce qu'un autel à Minerve a été mis au jour lors de la construction de la fortification de l'église avant 1593. La plus ancienne date attestée concernant un édifice religieux à cet emplacement est un acte de 1192 dans lequel est évoquée à Aix une maison des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem dont le commandeur est Pierre de Naisa. Les historiens estiment que la construction de cette commanderie est à situer entre 1180 et 1192.
La construction de l'église quant à elle ne peut être datée précisément. S'il semble acquis que c'est au cours du XIIIe siècle, il est difficile de lui donner une date précise. Si une édifice religieux a bien été consacré à Aix le 3 mai 1251 par le cardinal Pierre de Colmieu, on ignore duquel il s'agit, mais certains considèrent que cet édifice peut être l'église Saint-Jean-de-Malte, ou du moins l'édifice qui a précédé l'église Saint-Jean-de-Malte. En effet, en 1256, Alphonse II, comte de Provence, et son fils Raimond Bérenger IV y ont leur sépulture. En 1272, Charles Ier d'Anjou demande l'agrandissement de l'église pour y accueillir le tombeau de Béatrice de Provence, son épouse. Il est envisageable que c'est alors le chœur et les transepts qui sont ajoutés puisque, d'ordinaire, les église de l'Ordre de Malte n'ont pas de transept, alors qu'ils sont censés accueillir les tombeaux. Chœur et transepts sont achevés au plus tard en 1277, même si les chapelles latérales seront construites ultérieurement.
Au moment de sa construction, l'église Saint-Jean-de-Malte s'élève à travers champs, loin de son enfermement actuel dans la rue Cardinale. La création du quartier Mazarin d'Aix au XVIIe siècle a été l'occasion de circonscrire le bâtiment à une extrémité de la nouvelle ville pour en faire une place forte. Du coup, de nombreux aménagements extérieurs se trouvent masqués par des constructions, surtout à partir du XVIIe siècle.
Le musée Granet présente une gravure de 1593 de l'église au milieu des champs, relativement éloignée de zones peuplées à une époque où les remparts de la ville sont plus au nord. Il s'agit donc pour Saint-Jean-de-Malte d'un isolement dangereux, car l'église ne possède pas de réelles protections, étant située en dehors des remparts. Trois hautes tours sont donc érigées entre la fin du XIIIe siècle et le début du XIVe siècle, dont l'une, transformée en habitation au XVIIe siècle se situe entre le chevet et le bras nord du transept et est visible au numéro 20 de la rue d'Italie. Au XVIe siècle, il est sérieusement envisagé de démolir l'église dont les parties fortes peuvent constituer un point d'appui pour les ennemis qui veulent attaquer les remparts sud d'Aix. Mais elle échappe à la démolition sur l'intervention du capitaine Denis Brueys. La ville s'engage en outre à procéder à des travaux de fortifications et notamment à la construction d'une courtine, gardée chaque soir par un soldat. Mais ces efforts coûtent beaucoup à la commune et les plans pour intégrer l'église dans le rempart de la ville sont rejetés par les habitants.
En 1645, le cardinal Michel Mazarin, frère du premier ministre de Louis XIV Jules Mazarin, devient archevêque d'Aix. À son arrivée, il demande au roi Louis XIV l'autorisation d'abattre le rempart sud de la ville entre la porte des Augustins et la Plateforme pour y bâtir un nouveau quartier, évoquant des raisons d'ordre démographique et esthétique, mais aussi des impératifs de sécurité. La faveur lui est accordée par lettres patentes enregistrées par le Parlement d'Aix le 15 février 1646. Il organise alors, avec l'aide du promoteur Henri Hervard d’Hevinquem, la vente de lots de terrain à un prix que seuls les bourgeois de la ville sont en mesure de payer. Sous la direction de l'architecte Jean Lombard, nommé par Mazarin, les hôtels particuliers vont commencer à fleurir, faisant du quartier Mazarin un remarquable exemple d'architecture des XVIIe et XVIIIe siècles, en forme de damier. L'église Saint-Jean-de-Malte se trouve de fait englobée à ce quartier et pourra désormais bénéficier de la protection de nouveaux remparts.
Des chapelles sont ajoutées au XIVe siècle, mais c'est surtout le prieur Jean-Claude Viany qui réalise les apports architecturaux les plus conséquents, en ajoutant notamment de nouvelles chapelles qu'il finance en vendant des terrains libres contigus à l'église. Ces importants travaux de restauration sont réalisés entre 1670 et 1695, même si l'essentiel des travaux couvre les trois années entre 1692 et 1694. L'entrée latérale est, elle, refaite en 1683. Son linteau est alors décoré de palmes et un médaillon de marbre réalisé en 1694 par Félix Veyrier y est apposé. Celui-ci représente la décollation de saint Jean-Baptiste, conforme à l'iconographie de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem.
Il est inutile de rechercher aujourd'hui le tombeau authentique des comtes de Provence, puisque celui-ci a été détruit en 1794. Celui que l'on voit dans le bras nord du transept est une copie réalisée en 1828 grâce à une souscription publique à laquelle a notamment participé Charles X. Le tombeau de Béatrice de Provence, lui, n'a pas été reconstitué. En 1902 ont été retrouvé des morceaux du monument détruit, dont la tête de Raymond-Bérenger et celle de Béatrice. Ces pièces ont été déposées au musée Granet.