La croissance exponentielle d'Internet s'accompagne d'un épuisement des adresses IPv4, c'est-à-dire de la saturation progressive de la quantité d'adresses IPv4 publiques disponibles. La saturation menace la croissance du réseau internet.
Une adresse IP comporte 32 bits, ce qui permet de créer jusqu'à 4 milliards de numéros. Certaines adresses ne sont cependant pas assignables à des ordinateurs parce qu'elles sont réservées à des usages particuliers (comme les adresses de groupe multicast ou le bloc 240.0.0.0/4).
D'autre part, la technique d'assignation aux utilisateurs ne permet pas d'utiliser toutes les adresses possibles, en raison de contraintes liées au découpage en sous-réseaux.
L'économie des adresses IP n'a pas été une préoccupation du début d'Internet. Certaines entreprises se sont vues attribuer des blocs /8 (soit 16 millions d'adresses) ou /16 (65536 adresses), soit bien plus que leur besoin réel. La notion de classe d'adresse IP, en vigueur dans les années 1980 et jusqu'au début des années 1990, a abouti à une sous-utilisation de l'espace disponible, certains sous-réseaux de quelques ordinateurs se voyant attribuer 256 adresses (Classe C) par exemple.
La multiplication des équipements mobiles et connectés en permanence a également augmenté la demande en adresses.
En 1994, le groupe Address Lifetime Expectations de l'IETF prévoit que l'épuisement des adresses IP se produira entre 2005 et 2011.
En août 2010, on estime que l'IANA devait assigner le dernier bloc /8 libre à un registre Internet régional (RIR) entre mars et juillet 2011. Les RIR commenceraient à manquer d'adresses disponibles à assigner aux registres Internet locaux (LIR) entre novembre 2011 et mars 2012.
Le 25 juin 2010, la Commission européenne et l'IANA ont indiqué que les blocs libres pourraient être épuisés dès la fin de l'année 2010, en raison de la demande élevée d'adresse IPv4 dans la zone Asie-Pacifique en 2010.
La demande pouvant varier fortement, et en particulier à l'approche de l'épuisement complet, il n'est pas certain que les modèles qui sont utilisés pour ces prévisions soient fiables.
L'effet de l'épuisement pour l'utilisateur final ne sera pas immédiat, un utilisateur qui dispose d'une adresse IPv4 continuera à pouvoir accéder à Internet en IPv4 comme auparavant. Cependant, au fur et à mesure que des blocs IPv6 seront assignés pour les nouvelles demande d'adresses, il pourrait ne plus avoir accès aux ordinateurs qui ne disposeraient que d'une adresse IPv6.
L'allocation du dernier bloc /8 par les RIR, dans une période appelée IPv4 endgame, fera l'objet d'une politique spéciale pour permettre une attribution équitable. Le RIPE NCC prévoit de n'attribuer qu'un seul /22 (soit 1024 adresses) à chaque registre Internet local et ce seulement pour autant qu'il ait déjà obtenu un bloc IPv6.
Plusieurs techniques ont été proposées pour résoudre le problème ou repousser l'échéance de l'épuisement complet des adresses IP :
Pour reporter l'échéance de l'épuisement, l'IANA a réutilisé des blocs autrefois réservés (comme 14.0.0.0/8).
Plusieurs propositions en vue de réutiliser le bloc 240.0.0.0/4 (autrefois désigné sous le nom de classe E) ont vu le jour. Ces propositions n'ont cependant pas abouti, de nombreux routeurs et système d'exploitation étant incompatibles avec celles-ci.
La RFC 1917 est un appel à retourner les blocs d'adresses inutilisés à l'IANA. L'université Stanford a ainsi retourné le bloc 36.0.0.0/8 à l'IANA en 2000.
On a estimé à 29 % la proportion d'adresses assignées mais qui ne sont pas routées sur Internet. Ceci ne signifie cependant pas nécessairement que ces adresses ne sont pas utilisées. La restitution de blocs d'adresses peut donc conduire à une renumérotation IP à l'intérieur du réseau.
Depuis la fin du XXe siècle, IPv6 est proposé comme solution pour faire face à la pénurie des adresses IPv4. Lors d'une première phase de transition (dite double pile ou dual stack), les ordinateurs disposent à la fois d'une adresse IPv4 et d'une adresse IPv6 et utilisent l'une ou l'autre adresse en fonction de la destination voulue. Ceci ne contribue pas à la diminution de la demande en adresse IPv4 mais permet aux ordinateurs qui ne disposent que d'une adresse IPv6 de continuer à accéder aux services disponibles sur Internet.
Certains fournisseurs d'accès à Internet fournissent une adresse IPv6 à leurs clients particuliers en plus de l'adresse IPv4 à partir de la passerelle chez le client. Dans ce cas, la connectivité IPv6 est fournie de façon transparente grâce à la configuration automatique d'IPv6 dans les systèmes d'exploitation.
Si la connectivité IPv6 n'est pas disponible dans le réseau local, on peut faire usage de tunnels IPv6 dans IPv4. Les méthodes 6to4, 6rd ou Teredo fournissent un moyen de configurer ces tunnels dynamiquement. Il existe également des fournisseurs de tunnel tels que SixXS, Freenet6, Hurricane Electric qui permettent de configurer un tunnel IPv6/IPv4 de façon explicite.
La communication d'ordinateurs ne disposant que d'une adresse IPv6 avec l'internet IPv4 représente un défi technique. Une solution proposée est de faire usage d'une passerelle applicative couplée au DNS, ce qui cause des problèmes opérationnels.
Pour assurer la continuité de l'accès à Internet en dépit de l'épuisement des adresses IPv4, les opérateurs envisagent le déploiement de traducteurs d'adresse à grande échelle (Large Scale NAT, Carrier-Grade NAT). Une adresse publique serait ainsi partagée par de nombreux clients simultanément. Certains protocoles et certaines applications, notamment p2p et les tunnels, pourraient ne plus fonctionner correctement.