L'ossature moderne est en place, issue des voies stratégiques de Rome, en partie conservées suivant les endroits. Victime d'un lent abandon aux Xe et XIe siècles, succédant à deux phases de maintien sans grande innovation, elle comprend souvent une série de voies que l'on pourrait qualifier de «voies médiévales», parallèles quelquefois à la voirie ordinaire. De nos jours, on pense que le Moyen Âge a créé ses propres chemins, aussi bien pour le commerce que pour le passage des troupeaux, les gués, les cols, «zones routières» spécifiques en plaine comme en montagne : dans les Alpes, le Mont-Cenis est très tôt traversé. Le Massif central n'a pas été délaissé.
Selon Robert-Henri Bautier, au-delà de l’idée traditionnelle du couloir rhodanien comme principal passage entre la Méditerranée et les foires de Champagne, s'est créée une ossature de différents types de routes mentionnés par les textes, fabliaux, contes et poèmes. Au Moyen Âge, on peut aller pratiquement partout, cette multitude de chemins locaux convenant à une époque où la vie lointaine est pratiquement inexistante, sinon par un système de relais comme dans le cas des relations de Toulouse avec les pays de langue d'oïl : ce sont les «pays de transition», Massif central et ses abords, le Quercy notamment, qui fournissent les caravanes et leur équipement.
La tendance actuelle revient à nuancer l'opinion de Jacques Heers : «Les transports terrestres n'ont pratiquement pas connu d'amélioration pendant le Moyen Âge». Il n'y a pas «un» Moyen Âge, mais «des» Moyen Âges qui couvrent un certain nombre de siècles, comme il y a des «régions» à l'identité bien définie. Des améliorations non spectaculaires mais efficaces ont été apportées dans les conditions de la traction animale. La montée des villes a engendré des besoins nouveaux, suscité des initiatives. Dans son étude sur « Commerces et marchands de Toulouse (vers 1350-vers 1450)», P Wolff a montré l'importance des courants de circulation, des objets d'échange, des instruments et des techniques du commerce. Pour Jean Schneider, la ville de Metz, à la même époque, se présente comme « un État urbain dominé par un patriciat qui ramène à lui l'essentiel des activités politiques et économiques. État urbain qui, dans un rayon de vingt kilomètres, commande à plus de deux cents villages ». La réapparition du commerce nord-sud avait entraîné la mise en état des voies unissant les Flandres, Paris et les foires de Champagne, l'Italie.
Les premiers pavements de routes apparaissent, multipliés dans le Nord et dans l'Est, créant des voies, assimilées plus tard par certains chercheurs à de prétendues voies romaines. L'ouverture du Gothard a entraîné une redistribution des centres vitaux, en même temps que s'affirmaient la croissance urbaine et les débuts d'une organisation «administrative» de prévision, de régulation, d'entretien.
S'est développée ainsi une ébauche de «système» où s'introduisent des éléments juridiques et politiques. Une notion apparaît : celle de via publica ; l'autorité fait régner la paix et la sécurité, les ponts sont entretenus, les passages assurés. Un élément essentiel se fait jour, parallèle au développement du domaine, le «conduit royal», qui a assuré l'ouverture des foires de Champagne. Sur la via regalia, le roi fait respecter son «conduit», installe son péage, puis la maréchaussée.
À la base, reste la cellule rurale, le village, centre d'approvisionnement mais aussi, bien étudié par Robert Fossier et Mathieu Arnoux, centre d'artisanat, centre métallurgique parfois, où se rencontrent différents métiers - le charron, le forgeron, le menuisier - qui «font» et «maintiennent» la route, les véhicules, les conducteurs et les voyageurs. Le voyage devient, pour certains, un exploit sportif, prétexte à l'activité d'aubergistes qui, comme à Toulouse, sont à la fois courtiers des marchands et esquisse d'un service public.