Les polybromodiphényléther (PBDE) sont une suite de 209 produits chimiques bromés différents, dont certains sont ou ont été utilisés pour ignifuger les produits plastiques et les textiles. Ils ont aussi été utilisés à haute dose dans les années 1970 et 1980 pour l'extraction pétrolière.
Plusieurs de leurs propriétés physiques rendent les composés de cette famille dangereux.
La faible pression de vapeur les rend volatils (plus ou moins selon leur degré de bromation. Certains sont facilement aéroportés à longues distances. Ils peuvent affecter les écosystèmes loin des centres de production. A titre d'exemple, la quantité de PBDE a augmenté dans l’Arctique depuis les dix dernières années. D'autres études envisagent que le transport des différentes zones de production vers les zones de dépôts s’effectue par sauts selon les saisons, la température, etc.. La fonte des neiges favorise ce phénomène. Ce mécanisme se produit jusqu’à l’émergence du feuillage.
Leur coefficient de partage octanol/eau (Kow) élevé les rend faiblement solubles dans l’eau, mais confère aux PBDE une grande affinité avec la matière organique, ce qui explique leur bioaccumulation.
Leur liposolubilité (soluble dans le gras).
Leur coefficient air/eau (Kaw) varie beaucoup selon les PBDE. Sans donc généraliser pour cette famille de composés, on peut à partir de ce coefficient, déterminer pour chacun des composés où ce dernier serait susceptible de se retrouver, sous sa forme aqueuse ou gazeuse, ce qui donnera des indices de sa facilité de déplacement dans l’environnement.
le coefficient air/octanol (Kao) permet de déterminer la répartition entre la phase gazeuse qui amène le phénomène de la grande dispersion des PBDE à la surface du globe et dans les sols. Selon les données obtenues, à 25 °C, environ 80 % des PBDE sont gazeux, tandis qu’à 0 °C, seulement 10 % sont sous la forme gazeuse.
Ces trois coefficients permettent de prédire les lieux où risquent de s'accumuler ces produits : d'abord les sédiments, puis les sols, puis l'eau et enfin l'air.
Devenir environnemental
Cette famille de composés contamine l’environnement dès leur fabrication, puis surtout lors de l’élimination, de l’usure et de la destruction des produits contenants ce type de composé, les PBDE. Par contre, les concentrations varient beaucoup selon la région, l’environnement ambiant, etc. (exemples ci-dessous)
Dans l’air extérieur
Les taux trouvés dans l'air de la région des Grands Lacs étaient sont similaires à ceux des BPC, et certaines mesures faites dans le Grand Nord étaient assez élevées pour être potentiellement dangereuse. Les concentrations maximum ont été mesurées au cours des mois estivaux.
Dans les boues d’épuration
Dans la région du lac Michigan, en 1999, ces boues (riche en matière organique) en contenait de 30 à 50 fois plus que des BPC. Les taux observés en Amérique du Nord sont plus élevés qu'en Europe, pour les boues d’épuration comparées.
Dans les eaux de surface
Les concentrations étant inférieures aux limites de détection des appareils employés dans les années 1990 pour les analyses, elles n'étaient pas connues. Leur « faible » présence apparente dans l'eau concorde avec les propriétés hydrophobes des PBDE.
Une étude québécoise récente a recherché 24 congénères de PBDE dans 58 échantillons d'eau (il pourrait potentiellement y en avoir plus d'une centaine).
Les taux variaient fortement (de moins que la limite de détection pour tous les congénères analysés à 10.700 pg/l de PBDE totaux).
Des taux très élevés de PBDE ont été détectés, par exemple dans la rivière Yamaska Nord en aval de Granby (Québec), avec un taux médian de 2.530 pg/l pour les PBDE totaux) 10 fois supérieure à ceux mesurés en amont. Ici, c'est l'industrie des plastiques et textiles qui semble responsables.
Les médianes par site allaient de 14 pg/l à 2.530 pg/l. Dans 3 cas (Terrebonne, Lavaltrie et aval de Granby), la concentration médiane pour le total des congénères tétraBDE, pentaBDE et hexaBDE dépassait 300 pg/l, dose conduisant à une contamination excessive des animaux terrestres piscivores via la bioaccumulation trophique.
13 échantillons sur 58 dépassaient les 1.000 pg/l (taux élevés en comparaison de ceux cités par la littérature scientifique
Selon le MDDEP, Le règlement fédéral québécois de juin 2008 pourrait diminuer les apports de PBDE, mais il ne les réglemente pas tous, et il ne suffira peut-être pas à « protéger la faune terrestre piscivore »
Étant surtout soluble dans le gras, il est théoriquement facile à traiter dans les stations de traitement d’eau potable (Au Québec, celles de Lavaltrie et de Terrebonne le suppriment à 93 % de l'eau, mais celle-ci en contient in fine quand même encore de 11 pg/l à 177 pg/l (pour 498 pg/l à 4 010 pg/l dans l'eau non traité au même moment). Les congénères 47 et 99 constituent la presque totalité des PBDE trouvés dans l'eau traitée. Le décaBDEn présent dans l'eau brute en amont semble lui totalement éliminé.
Dans les sols et sédiments
Ce sont les milieux les plus probablement contaminés car fixant bien ces molécules. Plusieurs études ont trouvé dans les sédiments de 1100 à 2290 μg/kg de PBDE, pour 0.4 à 30 μg/kg dans les sols.
Les organismes vivants auraient absorbé plus de 72 % du Déca-BDE utilisé en Amérique du Nord (où on a utilisé le plus de PBDE), et plus de 82 % du Déca-BDE utilisé dans le monde.
Cette famille de composés est fortement et rapidement bioamplifiable.
Les organismes aquatiques en contiennent nettement plus que les autres, avec une bioaccumulation importante ;
La chair des grands dauphins étudiés sur les côtes des États-Unis en contenait 200 μg/kg chez les femelles pour les tétra-, penta- et hexa-BDE). Les mâles étaient bien plus contaminés (15 fois plus, avec 3100 μg/kg). Des PBDE sont trouvés jusque chez les mammifères marins pélagiques qui se nourrissent de plancton et petits poissons dans les eaux profondes au large (baleines à fanons), ce qui montre que ces composés sont transportés jusqu'en eau profonde.
Chez les carpes étudiées dans la rivière Buffalo (Etat de New York), 95 % environ des PBDE était du tétra-BDE, avec de petites quantités de penta- et d’hexa-BDE. Les plus hautes concentrations observées proviennent de sites proches de villes. Par contre, lors de l’étude, en 1991, les PBDE étaient 10 fois moins concentrés que les BPC et le DDT.
Le gras du meunier noir de la rivière Yamaska Nord contient 40 fois plus de PBDE que le seuil considéré par Environnement Canada comme sécuritaire pour la faune terrestre piscivore (8,4 ng/g) alors qu’en amont de cette ville industrielle, le taux avoisine ce seuil
En Mer du Nord, plusieurs types d’espèces ont été répertoriés pour mieux comprendre la distribution de ces polluants. Chez les invertébrés, une espèce d'étoile de mer, le bernard-l’hermite et le buccin (Buccinum undatum) en contenaient de 2.6 à 118 μg/kg dans leurs tissus gras. Chez les poissons, les foies de hareng atlantique, de merlan et morue en contenaient de 7.6 à 309 μg/kg. Enfin les mammifères marins étudiés (phoque commun et marsouin commun en contenaient de 57 à 9.250 μg/kg dans leurs tissus gras.
Dans l'Estuaire du Saint-Laurent, chez les phoques et les bélugas étudiés, les taux variaient de 0.2 à plus de 500 μg/kg ; le composé majoritaire étant le déca-BDE. Un plus ample échantillon est représenté dans le tableau 1.
Tableau 1. Concentration et quantité retrouvée dans les graisses de différents mammifères marins
Chez les espèces terrestres non aquatiques, les concentrations varient beaucoup selon divers facteurs.
Les oiseaux sont diversement contaminés, selon l’écosystème qu’ils habitent et leur nourriture, ainsi que leurs rang dans la chaîne alimentaire. Par exemple, le Cormoran d’Angleterre et du pays de Galles (situés dans le haut de la chaîne alimentaire de cette région) présentent des taux de 24 à 140 μg/kg. De plus, 14 composés différents de PBDE ont été retrouvés dans ces oiseaux. Chez des oiseaux du reste de l’Europe et leurs œufs, les concentrations dans les tissus musculaires étaient très basses pour les espèces des écosystèmes terrestres, comparables à celle des mammifères herbivores de ces mêmes écosystèmes. Le faucon pèlerin et ses oeufs, selon plusieurs études présentent des concentration en PBDE toujours très élevées, et les faucons sauvages sont plus contaminés que les faucons nourris en captivités (souvent à partir de poussins). Les œufs du faucon pèlerin sont cependant moins contaminés que ceux du guillemot de la mer Baltique, ce qui semble confirmer que les espèces marines sont plus exposées que celles des autres écosystèmes. Pour les espèces nord américaines, chez le goéland argenté de la région des Grands Lacs, on a mesuré jusqu'à 16.500 μg/kg !
Même s'ils en contiennent bien moins, les amphibiens ne sont pas épargnés, même en Scandinavie où plus de 90 % des individus analysés contenaient de 123 ± 100 et 26 ± 10 ng/kg.