Produit de fission - Définition

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Introduction

Les produits de fission sont des corps chimiques résultant de la fission d'un élément (un noyau) fissile : chaque noyau de matière fissile subissant une fission nucléaire se casse en deux (exceptionnellement trois) morceaux, qui se stabilisent sous forme de nouveaux atomes.
Ce sont les « cendres » de la réaction nucléaire, qui constituent des déchets nucléaires ultimes. Les produits de fission se forment suivant une distribution statistique (qui dépend faiblement du noyau fissile), et on y trouve des isotopes de pratiquement tous les éléments chimiques. Dans leur majorité, les produits de fission initialement formés sont des isotopes très instables : ils sont très fortement radioactifs, dégagent une forte chaleur, et des rayonnements gamma souvent très énergétiques (et donc dangereux).

Les produits de fission les plus radioactifs ont une période radioactive très faible, et disparaissent rapidement. La distribution des isotopes dans les produits de fission varie très fortement dans le temps, et la radioactivité initiale chute très rapidement.

Dans un réacteur nucléaire, la puissance dégagée par les produits de fission (de l'ordre de 5 % de la puissance thermique du réacteur immédiatement après l'arrêt) impose de maintenir un refroidissement pendant quelques jours après la mise à l'arrêt pour éviter une fusion du cœur. On appelle cette puissance thermique la puissance résiduelle du réacteur. Après quelques jours, la radioactivité a suffisamment diminué pour permettre le transfert du combustible en piscine. Après quelques années en piscine, la radioactivité a un niveau suffisamment faible pour que la matière puisse être évacuée ou retraitée. Après quelques centaines d'années, la radioactivité résiduelle des produits de fission devient moindre que celle des atomes fissiles dont ils sont issus.

La radioactivité des produits de fission rend nécessaire une radioprotection très importante pour la manipulation des combustibles nucléaires irradiés et tous les traitements de l'aval du cycle nucléaire : entreposage nucléaire, traitement du combustible nucléaire usé, et stockage définitif des déchets radioactifs.

Formation

Dans un réacteur nucléaire, lorsque un noyau d'uranium 235 fissionne par absorption d'un neutron, il se forme deux nouveaux noyaux instables :
les produits de fission (PF), ainsi que 2 ou 3 neutrons qui vont déclencher d’autres fissions par réaction nucléaire en chaîne. Le nombre total de nucléons est conservé dans la réaction mais la somme des masses des atomes et particules produit(e)s est toujours inférieure à celui de l'atome d'origine. Cela s'explique par le fait qu'une partie de la masse est transformée en énergie (voir E = mc2).

Voici une formule possible pour cette réaction :

{}^{235}_{92}U + {}^1_0 n \rarr {}^{93}_{36}Kr + {}^{140}_{56}Ba + 3 {}^1_0 n + Energie = 200 MeV (environ) = 3,2 \times 10^{-11} joule

Dans cet exemple, les deux produits de fission ont un excès de neutrons : Le krypton stable le plus lourd est Kr-86 (sept neutrons en excès), et le baryum stable le plus lourd est Ba-138 (deux neutrons en excès). Les chaines de désintégration correspondantes expulseront sept électrons (transformant autant de neutrons en protons) :

{}^{93}_{36}Kr \rightarrow (1,286 s, β-) \rightarrow{}^{93}_{37}Rb\rightarrow (5,84 s, β-) \rightarrow{}^{93}_{38}Sr\rightarrow (7,423 min, β-) \rightarrow{}^{93}_{39}Y\rightarrow (10,18 h, β-) \rightarrow{}^{93}_{40}Zr\rightarrow (1,53×106 a, β-) \rightarrow{}^{93}_{41}Nb\rightarrow (Stable)
{}^{140}_{56}Ba\rightarrow (12,7527 j, β-) \rightarrow{}^{140}_{57}La\rightarrow (1,67855 j, β-) \rightarrow{}^{140}_{58}Ce\rightarrow (Stable)

L’atome d’uranium fissionné et le neutron provoquant la fission comportent initialement 92 protons et 144 (143 + 1) neutrons, dont deux et demi (en moyenne) sont émis quasiment instantanément lors des fissions. Les deux atomes instables formés lors de la fission contiennent au total 92 protons et 141,5 neutrons (en moyenne), qui se répartissent entre les deux atomes instables formés. Chacun emporte en moyenne 46 protons et 71 neutrons, soit 117 nucléons (alors que le palladium, Z = 46, est stable pour 56 à 60 neutrons). On peut voir ainsi que les deux atomes instables formés contiennent un nombre excessif de neutrons par rapport aux isotopes stables des éléments concernés (entre trois et cinq neutrons « en excès » par rapport à la vallée de stabilité) : ils tendent à présenter une radioactivité β-, et quand le déficit en proton est plus important, à se désintégrer assez rapidement en expulsant un neutron, qui fera partie des « neutrons retardés » de la réaction.

Les numéros atomiques des produits de fission se répartissent statistiquement dans deux intervalles :

  • de 78 à 109 nucléons, autour de 90, pour la première partie (par exemple le strontium 94 ou le krypton 93) ;
  • de 125 à 155, autour de 140, pour l’autre partie (par exemple le xénon 140 ou le baryum 140).

La distribution statistique précise des produits de fission dépend de plusieurs facteurs : composition du combustible (enrichissement de l'uranium, teneur en plutonium), spectre et flux neutronique, etc. Pour un réacteur de puissance à eau pressurisée, de type REP, utilisant de l'uranium enrichi en isotope 235, 97 % des produits de fission se répartissent entre les intervalles :

  • de 84 à 105 nucléons pour la première partie ;
  • de 129 à 149 pour l’autre partie.

Également, les proportions des atomes de nombre de nucléons allant de 90 à 100 d'une part et de 133 à 144 d'autre part sont très voisines et toutes de l'ordre de 3 à 3,2 % environ (la courbe « en dos de chameau » donnée ci-dessus (en échelle logarithmique) présente donc ainsi 2 « quasi-plateaux ») pour environ (11 + 12) × 3,1 % = 71,3 % des atomes formés.

Les proportions diminuent fortement au-delà de ces deux plateaux et de façon grossièrement symétrique par rapport à ceux-ci :

  •   90 à   84 nucléons (~ 0,5 %)
  • 100 à 105 nucléons (~ 0,4 %)
  • 133 à 129 nucléons (~ 0,5 %)
  • 144 à 149 nucléons (~ 0,6 %).

Les autres nucléons formés le sont en proportion relative faible inférieure à 0,3 % ou très faible.

Après la fission et avant l'arrêt du réacteur, la distribution en nombre de nucléons des atomes formés est modifiée de façon assez marginale par réaction avec le flux neutronique qui peut conduire à des captures augmentant le nombre de nucléons. La distribution dépend ainsi de la durée d'incubation des produits de fission dans le réacteur (durée d'exposition aux neutrons). En outre durant ce laps de temps la décroissance radioactive en bêta et gamma se produit (sans changement du nombre de nucléons).

Par ailleurs, les fissions du plutonium 239 formé dans les réacteurs à partir de l'uranium 238 ne produisent pas exactement les mêmes proportions d'atomes des différents éléments que dans cas de l'uranium 235, même si les ordres de grandeurs sont en gros les mêmes.

Ces considérations expliquent pourquoi il est souvent très difficile d'évaluer simplement la nature et surtout les quantités de radionucléides formés par fission dans l'ensemble des réacteurs et pour toutes les énergies (ou usures) des combustibles utilisés. Pour le faire des modélisations assez complexes sont nécessaires.

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