La trigonométrie sphérique est un ensemble de relations analogues à celles de la trigonométrie euclidienne mais portant sur les angles et distances repérés sur une sphère.
Les règles habituelles de la trigonométrie euclidienne ne sont plus applicables ; par exemple la somme des angles d'un triangle situé sur une sphère est supérieure à 180 degrés et les segments de droites deviennent des arcs de grands cercles.
On considère trois points A, B et C sur une sphère comme représentés par la figure ci-contre, on note a la longueur (sur la surface de la sphère) du côté opposé au sommet A et α, parfois , l'angle (toujours sur la surface de la sphère) du triangle en ce sommet, et de façon analogue pour les autres sommets. Les longueurs a, b et c seront en fait considérées comme des angles dans ce qui suit, à savoir les angles sous-tendus au centre de la sphère par la partie de grand cercle correspondante (par exemple, l'angle de 2π est la circonférence de la sphère).
L'une des relations les plus importantes de la trigonométrie sphérique, donnée par François Viète en 1593 dans son De Varorium est la formule des cosinus, qui relie la longueur d'un côté à celles de deux autres côtés ainsi qu'à l'angle entre eux :
qu'il ne faut pas confondre avec la relation duale, obtenue en remplaçant dans cette relation tous les grands cercles par leurs points polaires :
La formule des cosinus se démontre de plusieurs façons. L'une d'elle consiste à exprimer de différentes manières le produit scalaire, dans l'espace euclidien ambiant, entre les vecteurs reliant le centre O de la sphère aux points A et B. Une autre est détaillée ci dessous.
Dans le cas particulier où le triangle est rectangle en C, on obtient
formule correspondant au théorème de Pythagore pour la trigonométrie sphérique. On remarque que si le triangle est suffisamment petit pour que l'on puisse remplacer les cosinus par leur développement limité au deuxième ordre, on retrouve effectivement le théorème de Pythagore.
La formule des cosinus permet notamment de calculer la distance entre deux points A et B sur la Terre en fonction de leurs latitudes et longitudes. Pour cela, on place C au pôle nord, de sorte que a est le complémentaire de la latitude de A, b le complémentaire de celle de B, et c la différence de longitude . On obtient directement
La relation peut également s'écrire sous la forme
Des expressions analogues pour cosα et cosβ on déduit la troisième formule fondamentale de la trigonométrie sphérique (les deux premières étant celles des cosinus et des sinus) :
La relation duale peut quant à elle s'écrire
On remarque que d'après la relation duale évoquée précédemment, un triangle sphérique est déterminé par ses trois angles, ce qui est très différent du cas du triangle euclidien (plan). Il y a une analogie parfaite (de dualité), dans le triangle sphérique, entre longueurs des côtés et angles aux sommets. La formule des sinus illustre cette analogie :
ou encore
ce qui doit se comprendre comme « les trois quantités de gauche sont dans les mêmes proportions que les trois quantités de droite (le rapport entre deux quelconques à gauche est le même que le rapport correspondant à droite) ».
a, b et c désignent les longueurs, A, B et C désignent les sommets, α, β et γ désignent les angles du triangle sphérique.
On note et avec
On prend alors
On en déduit
La formule du double produit vectoriel conduit à
De même,
Soit le demi-périmètre du triangle. Alors on a
et pour les formules duales, avec :
Ces formules qui, comme la relation fondamentale, lient un angle au centre aux trois côtés du triangle sphérique ne contiennent pas de somme. Elles étaient très utilisées pour les calculs pratiques à l'aide de tables de logarithmes.
On a et ainsi que et
On en déduit la loi des tangentes en trigonométrie sphérique :
Elles s'obtiennent en combinant deux à deux les formules de Gauss :
De façon remarquable, l'aire du triangle sphérique se calcule très simplement à partir de ses trois angles : elle est exactement égale à son « défaut d'euclidianité » (différence entre la somme des angles du triangle et π) multiplié par le carré du rayon R de la sphère. Soit :
Remarque:ε est un angle solide s'exprimant en stéradians (pour et exprimés en radians). Cette formule se montre de façon élémentaire.
a) Lorsqu'on découpe la sphère en 4 secteurs par deux plans diamétraux, l'aire d'un de ces secteurs ainsi découpé est proportionnelle à l'angle des deux plans.
Elle vaut donc
b) Les trois plans qui définissent un triangle sphérique coupent la sphère selon huit secteurs, et on voit aisément que la somme de leurs aires est celle de la sphère augmentée quatre fois de celle du triangle.
c) Autrement dit, on obtient : .
On en déduit alors :
Cette formule, découverte par Thomas Harriot, mais non publiée, fut donnée pour la première fois par Albert Girard vers 1625.
Cette formule est analogue à la formule de Héron qui calcule l'aire d'un triangle euclidien en fonction de ses côtés, et elle fait la même chose pour le triangle sphérique :
(on rappelle qu'on a appelé s=(a+b+c)/2 le demi-périmètre).