Un Arithmomètre est une machine à calculer à addition et soustraction directes et qui permet de multiplier et de diviser rapidement grâce à une platine de résultat mobile. Inventé en France par Thomas de Colmar en 1820, il fut commercialisé de 1851 à 1915. Il acquit une grande réputation de fiabilité et de robustesse et est considéré comme le premier calculateur de bureau, préfigurant les futures calculatrices manuelles, électriques et électroniques du siècle suivant.
Sa commercialisation lança l'industrie des machines à calculer. Pendant près de quarante ans, de 1851 à 1887, il fut le seul type de machine à calculer en production industrielle et il était vendu dans le monde entier. C'est vers la fin de cette période que ses deux premières compagnies de clones apparaissent; il s'agit de Burkhardt, une compagnie allemande (1878) et de Layton, une compagnie anglaise (1883). Par la suite, une vingtaine de compagnies européennes construisirent des clones de l'arithmométre, souvent en le perfectionnant, jusqu'au début de la seconde guerre mondiale.
A une époque ou les calculateurs étaient humains, l'invention de l'arithmomètre en 1820 fut «...rangée au nombre de ces découvertes qui font honneur à ceux qui les conçoivent et sont glorieuses pour l'époque qui les produit». L'adaptation du design de la machine aux moyens de production de 1851 et «...la simplicité de la composition des organes élémentaires qui la constituent; la facilité de la réaliser en machines capables d'opérer sur des nombres formés d'autant de chiffres significatifs que l'ont veut; la certitude et l'exactitude des résultats qu'elle fournit et le temps précieux qu'elle peut économiser aux calculateurs...» en assurèrent son succès commercial.
Les premiers arithmomètres possédaient un multiplicateur à un chiffre qui permettait de multiplier le nombre inscrit sur les curseurs par le simple fait de tirer sur un ruban latéral (rapidement remplacé par une manivelle). Très peu de machines furent construites pendant cette période et elles étaient souvent différentes, de plus, il n'y aura pas de machine construite entre 1822 et 1844. Il est intéressant de noter que ce hiatus de 22 ans englobe complètement et presque parfaitement la période pendant laquelle le gouvernement anglais finança le développement d'une machine à calculer qui aurait dû être 10 fois plus sophistiquée que l'arithmomètre mais dont la construction fut à peine commencée: la machine à différences de Charles Babbage (le parlement anglais donna initialement £1 500 en 1822 et retira son support officiellement en 1842 après avoir dépenser £17 470 ce qui représentait 1 million de livres sterling en 2004).
En 1844 Thomas réintroduit son arithmomètre à l'exposition des produits de l'industrie française dans la toute nouvelle catégorie de Mesures diverses, compteurs et machines à calculer mais il n'y reçoit qu'une mention honorable.
En 1848 il reprend activement le développement de la machine. Aux alentours de 1850 il construit des machines qu'il dote de boites somptueuses et il les offre aux têtes couronnées d'Europe. Deux brevets, chacun augmenté d'un certificat d'addition, seront déposés entre 1849 et 1851.
Le multiplicateur est abandonné. Cette simplification permet la commercialisation de l'Arithmomètre car il est enfin adapté aux moyens de production de l'époque. Chaque machine est dotée d'un numéro de série et des notices d'instructions sont publiées.
L'utilisation constante de certaines des machines de production permet d'exposer deux faiblesses du design: l'organe de retenue qui pouvait lever la platine mobile dans certaines circonstances avec une première solution adéquate implémentée dés 1856 et une tendance aux cylindres de Leibniz de tourner un peu plus quand la manivelle est tournée trop rapidement qui fut résolut par l'introduction d'une croix de malte. Un brevet décrivant ces perfectionnements est déposé en 1865.
C'est pendant cette période qu'il pénètre toutes les branches de l'industrie, du gouvernement et des finances. Vers 1873, pour la première fois dans l'histoire des machines à calculer, les ateliers de production d'Arithmomètre dépassent la barre des 1 000 machines construites. En 1880, vingt ans avant la compétition, un système de déplacement automatique du chariot est implémenté, et des machines en sont dotées, mais cette innovation n'est pas intégrée à la production.
Sous la direction de Louis Payen, et plus tard de sa femme Veuve L. Payen, l'Arithmomètre évolue rapidement avec une mécanique plus fiable, des effaceurs plus maniables, un système d'inclinaison des boites, des curseurs plus faciles à lire et même, sur certaines machines, un couvercle amovible. Le nombre de fabricants de clones se multiplie surtout en Allemagne et en Angleterre (une vingtaine de compagnies au total).
Cependant vers 1900, après avoir été le leader indisputé de l'industrie des machines à calculer de bureau pendant cinquante ans, il commence à être dépassé en volume de production par quatre machines, plus faciles à construire, moins encombrantes et moins chères. Ce sont deux machines à clavier aux États-Unis, le Comptomètre et la machine de Burroughs et deux arithmomètres à roues à nombre variable de dents en Europe avec l'Arithmomètre d'Odhner en Russie et la Brunsviga en Allemagne.
La construction de l'arithmomètre s'arrêta au milieu de la première guerre mondiale. Les difficultés économiques et le manque de main d'oeuvre spécialisée de l'après guerre empêchèrent Alphonse Darras, qui avait acheté la compagnie en 1915, d'en reprendre la production mettant un point d'arrêt à une épopée qui aura durée presque cent ans.