Crise du logement - Définition

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Introduction

Un pays est en situation de « crise du logement » lorsqu’il apparait de façon brusque et intense, mais pendant une période limitée un déséquilibre entre la l'offre et la demande de logement. Cependant la durée prise en compte est souvent longue (la construction est une opération longue, de l'ordre de l'année ou plus, et pendant ce temps la demande peut augmenter plus vite que l'offre) et certains étendent très largement la notion de "crise" pour l'appliquer à toute situation qui leur apparait imparfaite et ainsi justifier une action importante.

Les raisons peuvent en être de plusieurs natures : facteurs exogènes (catastrophe naturelle ou guerre), démographiques (déplacement massif de population, tel qu'un fort exode rural par exemple), économiques (choc sur le marché immobilier, directement ou indirectement -- sur les entreprises de construction par exemple). Des évolutions relativement lentes, telles que l'accroissement naturel ou la réduction de la taille des ménages, peuvent aussi être invoqué, bien que cela nettement plus contestable.

Un facteur essentiel : le contrôle des loyers

Selon certains économistes le contrôle des loyers est le premier facteur de crise. Ils argumentent que le principe d'un marché est de fonctionner par référence aux prix, dont la hausse réduit la demande et augmente l'offre (construction nouvelle, transformation en logement de surface dont la destination était autre, offre d'une chambre ou d'une annexe dans un logement qu'on occupe pour dégager un revenu, ...). Pour eux, toute règlementation conduisant à la baisse du prix satisfait certes les gens logés, mais surtout elle augmente la demande et réduit l'offre pour les entrants sur le marché, conduisant à terme à une pénurie. Ils considèrent que le simple fait de laisser les loyers libres permet au marché du logement d'encaisser les destruction massives d'un tremblement de terre (cas observé à San Franscisco en 1906). Toutefois, en France , la crise du logement n'est pas due à des catastrophes naturelles, il est donc hasardeux d'utiliser ces études pour en comprendre les causes. En effet, au delà de la pénurie de logement, les montants de plus en plus élevés des loyers (qui sont librement fixés par le propriétaire, seule la hausse en cours de bail étant encadrée), comme des logements à vendre, excluent de fait toute une frange de la population de l'accès à un logement décent, voire à un logement tout court.

Autres solutions

Pour résoudre une crise du logement, il faut construire de façon à la fois importante et rapide. Les tenants d'une approche institutionnelle soulignent le rôle nécessaire de la puissance publique pour y parvenir. À l'inverse, les économistes libéraux suggèrent que les acteurs privés sont suffisants pour y parvenir.

Approche institutionnelle

Pour résoudre une crise du logement, il faut selon cette approche construire de façon à la fois importante et rapide. Les analystes de l'approche institutionnelle affirment que seule la puissance publique dispose des moyens d'impulsions et d'organisation nécessaires pour parvenir à cet but. Plusieurs solutions sont généralement envisagées :

  • La construction de grands ensembles. C'est la politique retenue en France à partir de 1955 pour résoudre la crise du logement du lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle est aussi massivement utilisée en Chine et dans plusieurs pays d'Asie ou en Europe orientale depuis 1991. Combinée à la construction de logements sociaux, cette politique est d'un usage délicat. Il est en effet nécessaire de l'éparpiller spatialement (ce qui n'a pas du tout été fait en France) et y doser une mixité sociale importante (classes populaires et classes moyennes, dans les mêmes bâtiments), pour éviter les mécanismes d'ostracisation étudiés par Loïc Wacquant. Au contraire, comme le montre le sociologue, les grands ensembles ont été marqués à partir des années 1970 par un double mouvement : un retrait de la présence de l'État, important aux États-Unis et partiel (en France et par l'évolution du capitalisme (transformant le prolétariat en précariat). Ces deux phénomènes, presque concomitants ont fragilisé les populations habitants les grands ensembles.
  • La construction d'habitats denses et stéréotypés mais à hauteur modérée. Cette politique a été plus particulièrement choisie par les Pays-Bas, qui dispose d'un des parcs de logements sociaux les plus importants à l'échelle européenne. Elle se retrouve dans les centre-villes de Grande-Bretagne.
  • La construction de villes nouvelles, en tentant de développer ainsi des agglomérations multipolaires, tant du point de vue de l'emploi, que du logement. En France, c'est Paul Delouvrier qui dans les années 1960 impulse la planification, puis la construction de villes nouvelles. La Chine, confrontée à un très fort exode rural a construit 246 villes nouvelles entre 1990 et 2008. Le Maroc tente également de suivre la même voie pour résoudre sa forte crise du logement.
  • Dans les pays anglo-saxons, l'État a soutenu le développement de constructions individuelles, par exemple par les Housing Act de 1924 (Royaume-Uni) ou 1934 (États-Unis). Des banlieues pavillonnaires ont ainsi été développées depuis l'entre-deux guerres. Les coûts sociaux (faiblesse des économies d'échelle en termes de transport et de service public par exemple), les coûts induits par les pertes (plus on s'éloigne du générateur et étend un réseau électrique, plus les pertes sont importantes, plus une ville s'étend et plus sa consommation énergétique est importante, etc.) et cachés (destruction accrue de biens publics environnementaux tels que terres arables, zones naturelles ou zones inondables, polarisation des zones urbaines (facteur de hausse du chômage et de criminalité) de cette politique d'étalement urbain en font une des plus critiquées à ce jour.

Approche libérale

Les économistes libéraux insistent généralement sur les freins mis par l'État à l'accroissement de l'offre de logement et défendent donc une politique visant à les réduire. L'Institut économique de Montréal résume la situation : « Si la crise se poursuit, c'est parce que les gouvernements n'ont toujours pas enclenché les réformes nécessaires pour permettre au marché privé du logement de répondre à la demande accrue des consommateurs. »

Déréglementer

La règlementation publique peut également jouer un rôle important. De façon temporaire, l'évolution des normes de l'habitat peuvent avoir un effet sur le nombre de biens disponibles (interdiction de louer en dessous d'une certaine surface par exemple) ou sur leur prix (obligation de présence d'un certain nombre d'équipements, interdiction de matériau ou modes de construction, ...).

Pour certains analystes, la protection excessive des locataires par la règlementation peut jouer également un rôle néfaste pour les plus faibles : dans le cas français, l'économiste Étienne Wasmer affirme ainsi : « Un locataire et un propriétaire signant un bail s'engagent par un contrat lequel définit droits et obligations. Or, le non-respect des droits par l'une ou l'autre des parties est une difficulté transactionnelle majeure. Et en la matière, ce serait faire preuve d'angélisme que de faire porter le poids des dysfonctionnements du marché locatif sur les propriétaires. ». Selon lui, la restauration d'une plus grande liberté contractuelle entre les différents agents permettrait de résorber les « crises du logement ».

Supprimer le contrôle des loyers

Parmi les explications souvent avancées pour expliquer la naissance d'une crise du logement, figure le contrôle des loyers. Ceux qui défendent le fait de subventionner la demande préfèrent des subventions visant directement les bénéficiaires, par un chèque-logement par exemple.

Les économistes Milton Friedman et George Stigler par exemple ont attaqué le contrôle des loyers : en se fondant sur la comparaison entre la résolution d'une crise du logement par le mécanisme des prix libres et par le contrôle des prix, ils écrivent que la libre fluctuation des prix est la solution la plus efficace pour offrir à tous un logement décent. Ce système a pour eux l'avantage de la simplicité, de la clarté et surtout de l'efficacité, en particulier car « les loyers élevés agissent comme un fort stimulant en faveur de nouvelles constructions ». À l'inverse, dans un système de contrôle des loyers, les amis du pouvoir profiteraient de ce contrôle, le contrôle des loyers n'étant in fine pour eux qu'un « rationnement par la chance et le favoritisme ».

À cela les auteurs ajoutent le défaut que les constructeurs n'ont plus le moindre intérêt à investir si les prix sont bloqués, et donc que la pénurie de logements, loin d'être réduite, sera amplifiée par le contrôle des loyers. Henry Hazlitt va dans le même sens qu'eux, écrivant ainsi : « [À cause du contrôle des loyers], on ne construit pas de nouveaux logements, parce qu'il n'y a plus de bonnes raisons de les construire ».

L'économiste péruvien Hernando de Soto applique cette même analyse au marché immobilier des pays en développement.

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