Flot (mathématiques) - Définition

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Sensibilité à la condition initiale

Résumé

Dans sa version élémentaire, le théorème de Cauchy-Lipschitz montre l'existence et l'unicité d'une courbe intégrale maximale, cependant aucune information ne concerne la sensibilité à la condition initiale. Il est possible de pallier cette faiblesse :

  • Le domaine de définition ainsi que le flot global αt0 est unique et il est continu, de classe C1 par rapport à la première variable et localement lipschitzien. Le domaine de définition est ouvert.
  • Si la fonction f est de classe Cp, il en est de même du flot global αt0.

L'unicité du flot s'entend avec la condition de Cauchy αt0(t0, x) = x pour tout x tel que (t0, x) soit élément du domaine de définition du flot global. Modifier la valeur de t0 correspond à définir un nouveau flot. Cependant ce nouveau flot n'apporte pas d'information supplémentaire, il correspond au précédent, à une translation de la première variable près.

Pour certaines études, comme celles analysant des singularités de courbes intégrales, il est utile d'ajouter un paramètre à l'équation, qui prend la forme : x' = f(t, x, λ). Le flot global dépend alors du paramètre λ, choisi dans un Banach F. La question est celle de la régularité du flot global en fonction du paramètre. Le théorème décrivant cette situation est parfois dénommé théorème de Cauchy-Lipschitz : cas non autonome avec paramètre. Si la fonction f est de classe Cp, le flot, considéré comme une application d'un ouvert de RxExF est aussi de classe Cp.

Continuité du flot local

Dans un premier temps, on étudie le cas de l'équation (1), c'est-à-dire celui d'une équation différentielle autonome. L'objectif est d'établir la continuité locale d'un flot, c'est-à-dire d'analyser ce qui se passe si la condition de Cauchy est peu modifiée. On souhaite définir une fonction β sur un voisinage d'un couple (0, x0), avec x0 élément de Ω, telle que l'application qui à t associe β(t, x) soit une solution de l'équation (1) vérifiant la condition de Cauchy β(t, x) = x.

Soit a un réel strictement positif et B la boule fermée de centre x0 et de rayon a. La valeur a est choisie telle que la boule fermée de centre x0 et de rayon 2.a soit incluse dans Ω et telle que la restriction à cette boule de la fonction f soit k-lipschitzienne, avec k strictement supérieur à 0. Soit m un majorant strictement positif de la norme de f sur la zone considérée, qui existe car f est lipschitzienne sur cette zone. Soit enfin b un réel strictement positif, strictement plus petit que a/m et que m/((1 + m)k). Ce réel b permet de définir un espace de fonctions G sur lequel on construit une application Ψ satisfaisant au théorème du point fixe. Soit G l'ensemble des fonctions définies sur [-b, b]xB, à valeurs dans la boule fermée de centre x0 et de rayon 2.a, continues, m+1-lipschitziennes par rapport à la deuxième variable et telles que l'image d'un point (0, x) soit égal à x, si x est un élément de B.

  • Lemme 1 : Muni de la norme de la convergence uniforme, G est un espace complet.

On considère une application Ψ, qui à une fonction u de G associe la fonction Ψu, définie par :

\forall (t,x) \in [-b,b]\times B\quad \Psi_u (t,x) = x + \int_0^t f(u(\tau,x)) \mathrm d \tau

Dire qu'une fonction β est un flot sur [-b, b]xB est équivalent à dire que β est un point fixe de Ψ.

  • Lemme 2 : L'application Ψ est à valeurs dans G et est contractante.

On en déduit l'existence et l'unicité d'un point fixe β c'est-à-dire d'un flot local au voisinage de (0, x). Comme le point fixe est élément de G, il est continu et lipschitzien par rapport à la deuxième variable. Le fait que β soit un point fixe montre que :

\forall (t,x) \in [-b,b]\times B\quad \beta(t,x) = x + \int_0^t f(\beta(\tau,x)) \mathrm d \tau

Les fonctions f et β étant continues, β est dérivable par rapport à t, ce qui montre que β est lipschitzienne et termine la démonstration de la proposition suivante :

  • Proposition : Soit x0 un élément de Ω, il existe un voisinage de (0, x0) tel qu'il existe un unique flot local associé à l'équation (1) et défini sur ce voisinage. Ce flot est continu, lipschitzien et dérivable par rapport à la première variable.

Équation différentielle non autonome

A l'aide d'un habile jeu d'écriture, il est possible de généraliser le cas particulier précédent aux équations dépendantes du temps. On considère maintenant l'équation (2) du théorème, associée à la condition de Cauchy C. Soit g, la fonction de Ω dans le Banach RxE, définie par :

\forall y \in \Omega \quad g(y) = (1, f(y))\quad\text{avec}\quad y = (t,x)

Si y0 désigne le point de Ω égal à (t0, x0), on considère l'équation différentielle et la condition de Cauchy suivante :

(4)\quad y' = g(y) \quad\text{avec la condition de Cauchy }C_2\quad y(0) = y_0 = (t_0, x_0)

La fonction g est localement lipschitzienne car f l'est. En effet, si y est un élément de Ω, il existe un voisinage V de y et un réel k strictement positif associée à f tel que, si les coordonnées d'un point y1 (resp. y2) de V, sont notées ((t1, x2) (resp. (t2, x2)), on a :

\|g(y_1) - g(y_2)\| = \|(1, f(y_1)) - (1, f(y_2))\| = \|f(t_1, x_1) - f(t_2, x_2)\| \le k\|(t_1-t_2,x_1-x_2)\|

L'équation (4) est bien une équation différentielle autonome, le paragraphe précédent assure l'existence et l'unicité d'un flot local. Soit βg(τ, y) la solution locale de l'équation (4) autour du point y0. On dispose des égalités, si β2 g désigne la deuxième coordonnée de βg :

\frac {\partial \beta_g}{\partial \tau}(\tau,y) = g(y) = (1, f(t,x))\quad\text{et}\quad t = \tau + t_0,\; \frac {\partial \beta_{2g}}{\partial \tau}(\tau,(t,x))=f(\tau + t_0,x)

Soit βt0 la fonction qui à (t, x) associe la valeur de la fonction β2 g au point (t - t0, (t0, x)). Les égalités suivantes montrent que β est bien le flot local de l'équation (2), défini sur un voisinage de (t0, x0), et contenant la courbe intégrale locale de l'équation (2) avec la condition de Cauchy C :

\frac {\partial \beta_{t_0}}{\partial t}(t,x) = f(t,x)\quad\text{et}\quad \beta_{t_0}(t_0,x) = x
  • Proposition : Soit (t0, x0) un élément de Ω, il existe un voisinage de (t0, x0) tel qu'il existe un unique flot local associé à l'équation (2) et défini sur ce voisinage. Ce flot est continu, lipschitzien et dérivable par rapport à la première variable.

Équation différentielle avec paramètre

On souhaite maintenant étudier le cas d'un flot local associé à l'équation :

(3)\quad \frac {\mathrm dx}{\mathrm dt} = f(t,\lambda, x)

Le paragraphe précédent montre que l'on peut se ramener au cas de l'équation différentielle autonome : x' = f(λ, x). On suppose maintenant que λ est élément d'un Banach F et Ω est un ouvert de FxE et f est une fonction localement lipschitzienne définie sur Ω. Le couple (λ0, x0) est un élément de Ω. La même astuce que celle du paragraphe précédent permet de montrer l'existence locale d'un flot dépendant maintenant de trois variables t, λ et x au voisinage de (0, λ0, x0). Ce flot local est lipschitzien et dérivable par rapport à la première variable. Soit g, la fonction de Ω dans le Banach FxE, définie par :

\forall y \in \Omega \quad g(y) = (0, f(y))\quad\text{avec}\quad y = (\lambda,x)

Avec le même raisonnement que le paragraphe précédent, on montre l'existence d'un flot local βg défini au voisinage du point (0, λ0, x0) et à valeurs dans FxE tel que :

\frac {\partial \beta_g}{\partial t}(t,y) = g(y) = (0, f(\lambda,x))\quad\text{et}\quad \beta_{1g}(t,(\lambda,x)) = \lambda,\; \frac {\partial \beta_{2g}}{\partial t}(t,(\lambda,x))=f(\lambda,x)

On définit de même le flot β qui à (t, λ, x) associe la valeur de la fonction β2 g au point (t, (λ, x)). Les égalités suivantes montrent que β est bien le flot local de l'équation du paragraphe, défini sur un voisinage de (0, λ0, x0), et contenant la courbe intégrale locale de l'équation considérée, avec la condition de Cauchy (0, x0)  :

\frac {\partial \beta}{\partial t}(t,\lambda,x) = f(\lambda,x)\quad\text{et}\quad \beta(0,\lambda,x) = x

Avec le paragraphe précédent, on en déduit la formulation générale :

  • Proposition : Soit f une fonction localement lipschitzienne définie sur Ω un ouvert de RxFxE et (t0, λ0, x0) un élément de Ω, il existe un voisinage de (t0, λ0, x0) tel qu'il existe un unique flot local associé à l'équation (3) et défini sur ce voisinage. Ce flot est continu, lipschitzien et dérivable par rapport à la première variable.

Régularité du flot local

Les démonstrations associées à la régularité du flot ont pendant longtemps étés un peu complexes. De manière indépendante Pugh et Robbin ont trouvé une démonstration élémentaire utilisant le théorème des fonctions implicites. Une fois encore, l'équation considérée est celle notée (1), c'est-à-dire que la paragraphe ne traite que d'une équation différentielle autonome. Les deux paragraphes précédents montre que traiter ce cas particulier implique le cas général de l'équation non autonome avec paramètre.

Soit x0 un élément de U, b un réel strictement positif tel qu'il existe un flot local β défini sur l'ensemble [-b, b]xU. Dans ce paragraphe, G désigne le Banach des fonctions continues de [-b, b] à valeurs dans E, la norme du Banach est celle de la convergence uniforme. Enfin, V est le sous-ensemble des fonctions de G dont l'image est incluse dans U. On remarque que V est un ouvert de E. En effet, si f est un élément de G, l'image de f, encore notée f([-b, b]), est un compact inclus dans U, la distance δ de ce compact au complémentaire de U dans E est un réel strictement positif et la boule de centre f et de rayon δ/2 est inclus dans V. Ceci montre que pour tout élément f de V, il existe une boule de centre f et de rayon strictement positif inclus dans V et, par voie de conséquence, que V est ouvert.

On considère l'application Tb de UxV dans G définie par :

\forall x \in U,\; \forall \sigma \in V,\; \forall t \in [-b,b]\quad T_b(x,\sigma)(t) = x + \int_0^t f(\sigma(\tau))\mathrm d \tau - \sigma(t)

Dire qu'un couple (x, σ) est un zéro de la fonction Tb revient à dire que σ est une solution locale de l'équation (1) avec la condition de Cauchy σ(0) = x.

On dispose du lemme suivant :

  • Lemme 1 : Il existe un réel b strictement positif tel que la fonction Tb soit de classe C1 et satisfasse les hypothèses du théorème des fonctions implicites.

Cela signifie que la fonction implicite, donnée par l'équation Tb(x, σ) = 0 est définie localement. Or un élément du graphe de cette fonction implicite possède pour deuxième coordonnée, une solution locale σ de l'équation (1) avec la condition de Cauchy σ(0) = x et définie sur le domaine domaine [-b, b]. Autrement dit, la fonction qui à x associe β(., x) est de classe C1, ce qui permet de déduire un premier résultat :

  • Lemme 2 : Si la fonction f est de classe C1, le flot local β l'est aussi.

La deuxième différentielle partielle de β vérifie une équation différentielle non autonome. Le paragraphe traitant de ce type d'équation montre qu'elle peut se ramener à une équation autonome, ce qui permet de montrer que la différentielle de β est aussi de classe C1, puis par récurrence, on montre que si f est de classe Cp. Le paragraphe sur les équations différentielles avec paramètres montre que ce résultat se généralise aux équations de type (3) :

  • Proposition : Si une fonction f définissant une équation différentielle non nécessairement autonome et à paramètre est de classe Cp, il existe un ouvert contenant (t0, λ0, x0) et le flot local défini sur cet ouvert est de classe Cp.

Régularité du flot global

Un flot discontinu ne peut pas se produire si le champ de vecteurs le définissant est continu et défini sur un ouvert.

Pour généraliser les propriétés au flot global, il reste encore un peu de travail. Il s'agit surtout de montrer que la configuration de droite ne peut pas se produire. En reprenant la métaphore de l'introduction, on suppose que l'étang contient un rocher. Sur la zone rouge, le flot contourne le rocher, sur la zone bleu il passe tout droit. Le flot possède alors des points de discontinuité. Pour s'en rendre compte, on considère l'évolution d'un voisinage d'un point symbolisé par une zone grise circulaire à un instant 0, sur la figure de droite. Ce point est situé à la frontière des deux zones. À l'instant t0, ce voisinage est découpé en deux parties éloignées l'une de l'autre. Cette configuration peut se produire, par exemple si Ω n'est pas un ouvert. En revanche, dans les hypothèses étudiées, cette configuration est impossible.

Certaines propriétés sont plus simples à démontrer que la continuité. Le théorème de Cauchy-Lipschitz, sous sa forme élémentaire garantit à la fois l'existence et l'unicité du flot global α et de son domaine de définition. Il assure aussi que le flot global est dérivable par rapport à la première variable et que la dérivée partielle, considérée comme une fonction de t, est continue. Le paragraphe précédent apporte aussi des informations. Il établit que si t est proche de 0 et si t et x varient peu, le flot est de classe Cp, si f l'est. En revanche, la continuité du flot global α suppose aussi que l'expression α(t, x) soit continue en x, même si t n'est pas proche de 0. On a supposé ici que (t, x) est un point du domaine de définition de α.

Une remarque est utile, valable uniquement pour les équation autonomes. Le point β(s, x) désigne la position, à l'instant s, du point qui était en x à l'instant 0. Le point β(t, β(s, x)) désigne la position à l'instant t, du point qui était en β(s, x), à l'instant 0. Il désigne aussi la position à l'instant s + t du point qui était en position x à l'instant s. Ce qui signifie, si les différentes valeurs sont dans les bons domaines de définitions :

\beta(t,\beta(s,x)) = \beta(t+s,x)\;

Ainsi, si les domaines de définitions s'y prêtent, il est possible de combiner les flots locaux, pour en construire un plus vaste. Cette technique permet de munir les flots locaux d'une structure de semi-groupe. Si le flot global est toujours défini sur R, les solutions intégrales maximales partageant une portion de domaine de définition, forment une structure de groupe, image de R par un morphisme de groupes. Cette remarque et utilisée afin de montrer le résultat suivant :

  • Lemme 1 : Le flot global d'une équation différentielle autonome existe et est unique, il est défini sur un ouvert, continue, dérivable par rapport à la première variable et localement lipschitzien par rapport à la deuxième.

Une fois ce résultat établi, il est simple de le généraliser :

  • Théorème : Le flot global d'une équation différentielle à paramètre existe et est unique. Il est défini sur un ouvert. Si le champ de vecteurs f est de classe Cp le flot global l'est aussi.
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