Les fractales de Lyapunov (connues aussi sous le nom de Markus-Lyapunov) sont en mathématiques, des fractales obtenues grâce à une extension de la fonction logistique définissant l'évolution d'une population normalement définie comme:
La population varie entre 0 et 1.
On montre que cette suite converge vers une limite stable pour des valeurs de k inférieures à 3, et diverge pour des valeurs supérieures à 4 (où la suite ne peut plus être définie pour un nombre infini d’éléments car elle dépasserait son domaine de valeur). Pour la plupart des valeurs de k entre 3,57 (environ) et 4 (bornes exclues) la suite (qui représente l’évolution d'une population dans le temps) présente un comportement chaotique, indépendant de la valeur de départ (les autres valeurs de k résultent en une suite convergeant vers un cycle constant comprenant un nombre fini de valeurs). Le caractère chaotique est ce qui permet de tracer une figure fractale.
On montre que le critère chaotique de la suite est obtenu lorsque l’exposant de Lyapunov (qui représente le logarithme moyen de croissance de la population) calculé sur la suite est positif mais inférieur à 1. Lorsque cet exposant est négatif, la population décroît et converge vers 0. Lorsque l’exposant est supérieur à 1, la population croit infiniment.
Pour le calculer, on doit définir la fonction fk transformant un élément de la suite en l'élément suivant:
Le comportement chaotique peut être calculé aussi simplement en appliquant successivement la fonction logistique mais en alternant cycliquement les valeurs du degré k de la croissance de la population, dans un cycle n'utilisant que deux valeurs a et b, cette périodicité se nomme racine. Par exemple, pour la séquence racine (a, b) de périodicité 2, on obtient la suite :
en fixant arbitrairement les valeurs initiales P0 et P1 dans le domaine de valeur ]0,1[ où la suite n’est pas constante et nulle dès les premiers éléments.
Si on ne considère que la sous-suite des éléments d’indice pair (c'est-à-dire multiples de la période du cycle de constante), elle peut s'exprimer simplement à l’aide d’une fonction fa,b unique :
et le caractère chaotique ou non de la nouvelle suite se calcule de la même façon avec l’exposant de Lyapunov appliqué cette fois à la fonction fa,b caractéristique de la sous-suite (et de la suite P tout entière...). Il suffit que fa,b soit dérivable, ce qui est le cas car les fonctions fa (ou fb) sont dérivables pour toute valeur des constantes a ou b.
Pour dessiner la fractale, on définit un rectangle dont l’axe horizontal correspond au paramètre a et l’axe vertical au paramètre b. Pour chaque point (a, b), on calcule l’exposant de Lyapunov. On attribue une couleur à ce point en fonction du résultat (et une couleur distincte dans le cas ou l’évaluation de l’exposant de Lyapunov ne converge pas vers une valeur finie). On obtient une figure semblable à la première image fractale ci-dessus (où les couleurs des points sur la diagonale principale correspondent au développement fractal unidimensionnel de l'exposant de Lyapunov sur la suite logistique présentée précédemment).
La figure présente une relative symétrie de part et d'autre de la diagonale, mais cette symétrie n'est pas parfaite car l'ordre d'utilisation des constantes a et b dans la suite P est décalé d’une position, ce qui affecte la somme totale de l’exposant de Lyapunov (approché sur un nombre nécessairement fini d’éléments), les suites différant principalement par leur premier terme considéré.
Par contre, les images obtenues diffèrent peu dans leur structure suivant la valeur définie pour le premier élément P0 de la suite ; en pratique, on choisira souvent P0 = 0,5.
D’autres fractales similaires bi-dimensionnelles peuvent être obtenues en modifiant le motif du cycle racine, ou avec une périodicité supérieure (mais on augmente le degré du polynôme f, et donc le temps de calcul de l’image). Par exemple avec le cycle de période 5 (a, a, b, a, b) comme dans la seconde image fractale ci-dessus.
On peut également obtenir des fractales de dimension supérieure en augmentant le nombre de paramètres, par exemple avec le cycle (a, b, c), et dont on peut utiliser une projection dans un plan quelconque pour obtenir une image bidimensionnelle (par exemple en fixant c, ce qui permet une infinité d’images fractales en fonction de la valeur de c).
Ces types de fractales modélisent bien par exemple le développement d’organismes pluricellulaires ou la croissance de cristaux, soumis à des concentrations de nutriments ou des expositions thermiques ou lumineuses graduées, ou des champs de force variables en fonction de l’espace, et peuvent expliquer la formation de figures géométriques régulières et fractales.