José Manuel Rodriguez Delgado, (né en 1915 à Ronda en Espagne) est un neuro-physiologiste, pionnier dans la technique des puces cérébrales.
Il étudie la médecine à Madrid. Il rejoint université Yale en 1950 dans le laboratoire de John Fulton qui travaillait alors sur la lobotomie. Il y expérimente chez l'animal, puis chez l'homme, l'implantation d'électrodes dans certaines parties du cerveau. Dans un premier temps, elles sont reliées par un fil à un circuit électrique stimulant, puis il invente un système radio commandé: le "stimoceiver". Il écrit en 1952 son premier article sur le sujet. Delgado affirma que "le transmetteur peut rester dans la tête d'une personne durant toute sa vie. L'énergie pour le faire fonctionner est transmise par les ondes radio", il faisait peut-être référence à une batterie rechargeable par induction électromagnétique.
En stimulant ainsi différents sites du cerveau, il parvient à plusieurs effets, soit sur la motricité, soit sur les émotions et l'humeur.
Delgado pouvait contrôler des animaux comme des "jouets électriques", en pressant le bon bouton, il pouvait ainsi faire ouvrir et fermer les yeux à un singe, lui faire tourner la tête, bouger la langue et les lèvres, le faire éternuer, bailler, augmenter ou diminuer fortement la quantité de nourriture consommée, faire tomber en sommeil profond ou maintenir éveillé, il pouvait également forcer un chat à se lécher y compris durant son sommeil. Avec des stimulations dans l'hypothalamus, il pouvait controler la dilatation des pupilles "aussi facilement qu'un objectif d'appareil photo".
Delgado fit également des expériences sur des humains, et réussit à forcer quelqu'un à plier les doigts, le signal électrique envoyé dans le cerveau étant supérieur à la volonté du patient(cobaye) de garder les doigts tendus.
En stimulant différentes régions du système limbique, il pouvait provoquer de la peur, de la très forte nervosité, de la convoitise, de l'hilarité, du bavardage, et d'autres réactions. En stimulant la région limbique appelée septum, il pouvait provoquer de l'euphorie, dans certains cas suffisamment forte pour contrer une dépression ou une douleur physique. D'après Delgado dans une publication, la stimulation de différents points de l'amygdale et de l'hippocampe pouvait provoquer des sensations agréables, de l'exaltation, un état de réflexion, de la concentration, des sentiments bizzares, une forte relaxation, des visions colorées, et autres réactions.
Chez un chimpanzé équipé d'un stimoceiver, il parvint en quelques jours à réduire de 99% la fréquence des signaux cérébraux nommés "spindle", qui sont spontanément émits par l'amygdale, en stimulant la substance grise périaqueducale pour provoquer une réaction d'aversion à chaque fois que le stimoceiver détectait un spindle. Durant cette expérience, le chimpanzé s'est montré plus calme, moins attentif et moins motivé.
En 1963, il fit une démonstration spectaculaire durant laquelle il parvint à stopper l'élan d'un taureau en stimulant son noyau caudé, grâce à un transmetteur radio qu'il tenait dans la main; il parvint également à contrôler chaque action de l'animal.
Parmi ses expériences sur des patients humains, on peut citer une jeune femme épileptique de 21 ans qui jouait calmement de la guitare et qu'il fit violemment enrager grâce au stimoceiver qu'il lui avait implanté, au point qu'elle casse la guitare contre le mur. On peut également citer le cas d'une patiente de 30 ans qui, lorsqu'elle était stimulée à un point particulier du lobe temporal, avouait au thérapeute son intérêt pour lui et lui embrassait les mains, lorsque la stimulation était terminée, elle redevenait aussi distante que d'habitude.
Enthousiaste sur sa technique, il a souvent minimisé les risques de dérive de cette dernière, même s'il en reconnaît le caractère imparfait. Cependant, en 1966, Delgado affirma que ses travaux "amènent à la conclusion déplaisante que les mouvements, les émotions, et l'humeur, peuvent être contrôlés par des signaux électriques et que les humains peuvent être contrôlés comme des robots en appuyant sur des boutons". Vers 1969, il parle de dérive Orwellienne de ses travaux qui pourraient servir à réduire en esclavage des êtres humains. En 1970, un article du New York Times décrit certains de ses travaux et découvertes.
Il se fait vivement critiquer dans les années 70. Il est d'abord pris dans un scandale provoqué par deux scientifiques avec qui il avait brièvement collaboré et qui ont suggéré que la chirurgie et la stimulation électrique du cerveau pourraient "réprimer les tendances violentes des noirs faisant des émeutes". Ensuite, il fut critiqué par des médecins opposés aux implants cérébraux, comme Peter Breggin, qui, en 1972, accusa Delgado, certains de ses collaborateurs, et les partisans de la lobotomie, d'essayer de créer une société où tous ceux qui dévient de la norme seront chirurgicalement mutilés. En 1973, Elliot Valenstein, dans son livre "Brain Control", a présenté une critique des travaux de Delgado sur les implants cérébraux, soutenant que les résultats de la stimulation électrique sont moins précis et avec moins de bénéfice thérapeutique que les solutions les plus généralement proposées. De plus, certaines personnes ont prétendu que Delgado leur avait secrètement implanté un stimoceiver, l'une d'elle engagea des poursuites judiciaires, demandant 1 million de dollar, contre Delgado et l'université Yale.
Vers 1973, il fut invité par Villar Palasi, ministre du dictateur espagnol Franco, pour aider à organiser une nouvelle école de médecine à l'Université Autonome de Madrid. Delgado précise qu'il n'y eut avec le ministre aucun problème concernant la controverse au sujet des ses travaux sur les implants cérébraux, l'offre faite par le ministre était "trop intéressante pour être refusée", Delgado demanda "Pourrais-je avoir les mêmes avantages qu'à Yale ?" et le ministre répondit "Oh, non, vous aurez bien mieux".
En 1974, il retourne donc en Espagne. A Madrid, il teste des casques transmettant des impulsions électromagnétiques au cerveau. Par la suite, son influence diminue notablement dans le milieu de la recherche et les expériences de stimulation cérébrale par électrodes sont progressivement abandonnées. Cependant, ses travaux sur les implants cérébraux furent à nouveau l'objet d'attention vers le milieu des années 80, un article du magazine Omni et des documentaires de la BBC et CNN, citent ses travaux comme une évidence que les Etats-Unis et l'Union Sovietique pourraient avoir développé en secrêt des méthodes de contrôle des pensées. Delgado arrête toute recherche au début des années 90.