Propulsion par fragments de fission - Définition

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Introduction

La propulsion par fragments de fission est une méthode de propulsion spatiale nucléaire exploitant directement l'énergie cinétique des noyaux fissionnés.

La fission nucléaire offre une densité énergétique de 8.1013 J/kg, très supérieure au réactions chimiques au mieux à 1.107 J/kg. Cette densité rend la fission attractive pour la propulsion spatiale. Cependant, la plupart des méthodes de propulsion nucléaire sont basées sur le chauffage d'un fluide propulsif éjecté ensuite par une tuyère. La résistance des matériaux du moteur limite alors la température de fonctionnement et donc l'impulsion spécifique à 7 000 s. D'autre part, cette température est la température moyenne de l'ensemble du combustible nucléaire, qui n'est pas en train de réagir en totalité au même instant (heureusement). En fait, la température des nucléides issus d'une fission est de millions de degrés, elle se dilue dans le milieu ambiant inerte et il en résulte une température globale de milliers de degrés.

La propulsion par fragments de fission permet aux nucléides produits par la fission (noyaux et particules α) de s'échapper du réacteur. Comme ces noyaux sont fortement ionisés, ils peuvent être canalisés par un champ magnétique et engendrer une poussée. La masse propulsive est ainsi composée uniquement de ces nucléides se déplaçant à des vitesses parfois relativistes, permettant d'envisager des impulsions spécifiques dépassant 1 000 000 s.

Ce type de propulsion ne peut être utilisée qu'en dehors de l'atmosphère car en plus des considérations environnementales, l'efficacité serait très affaiblie du fait que les fragments de fissions n'ont une pénétration que de 2 cm (sous 1 atm).

Deux déclinaisons de ce principe sont connues : la fusée à fragments de fission et la voile à fission.

Fusée à fragments de fission

Pour permettre aux nucléides de s'échapper sans interagir avec le reste du matériel combustible, il faut ne faire réagir que les atomes superficiels du combustible, sachant que des atomes chauds sont plus à même de fissionner que les froids. Il suffit donc que le combustible soit froid et exposé peu de temps à l'intérieur d'un réacteur rendant sa masse critique, ainsi la fission surviendra essentiellement à la surface chauffée de l'élément combustible, bouillant littéralement de nucléides ionisés qu'il ne reste qu'à canaliser par un champ magnétique.

Un avantage non négligeable de cette technologie est qu'une partie de l'énergie cinétique des fragments peut être récupérée par induction pour produire très efficacement la puissance électrique nécessaire au moteur et à la mission.

Schéma d'un propulseur à fragments de fission
a filaments fissiles, b disques en rotation, c cœur du réacteur, d fragments éjectés

Ce principe fut étudié par le Laboratoire national de l'Idaho et le Laboratoire national de Lawrence Livermore. Dans la conception attribuée à George Chapline, des brins de carbone sont revêtus d'une couche de 2 micromètres de combustible 242mAm ou curium et arrangés en faisceaux de masses sous-critiques. Ces faisceaux sont montés radialement sur des roues et l'empilement de ces roues tourne de telle sorte qu'il y ait toujours des faisceaux de passage dans un réacteur où la présence d'autre combustible déclenche la criticité des faisceaux présents. Le combustible superficiel des brins fissionne dégageant des nucléides capturés magnétiquement, puis la rotation de la roue fait sortir le faisceau du réacteur où il est refroidi avant son prochain passage.

L'efficacité de ce système est bonne, permettant une impulsion spécifique très élevée de plus de 100 000 s, mais cette performance est grevée par le poids du réacteur et des autres équipements. Néanmoins, le système pourrait rendre possible le précurseur d'une mission interstellaire bien que cette technique requiert une large infrastructure dédiée à la production d'un carburant à faible durée de vie.

Une conception plus récente, proposée par Rodney A. Clark et Robert B. Sheldon, pourrait théoriquement améliorer l'efficacité et réduire la complexité d'un tel moteur. Les faiblesses de la conception précédente sont son important taux de fragments n'arrivant pas à s'échapper du réacteur et son système de refroidissement du combustible qui impose un mécanisme de rotation à travers des ouvertures dans le réacteur. Leur idée est d'utiliser des nanoparticules de matière fissile de diamètre inférieur à 100 nm, assurant à la fois une forte probabilité d'échappement des fragments de fission et un refroidissement continu très efficace grâce un important rapport surface/volume.

Réacteur à plasma de poussière
A éjection des fragments pour la propulsion
B cœur du réacteur
C fragments décélérés pour production d'électricité
d modérateur, e générateur de confinement, f bobine d'induction RF

Les nanoparticules sont placées dans une chambre sous vide constituée de matériaux modérateur de neutrons, soumise à un champ magnétique axial agissant comme un piège à Miroirs Magnétiques et à un champ électrique externe. Elles sont ionisées par induction RF, se retrouvent en suspension au centre de la chambre par répulsion électrostatique et constituent alors ce qui est appelé un plasma de poussières. Le piège magnétique doit être suffisamment faible pour ne pas "tasser" le nuage de particule sur lui-même (et le rendre opaque aux fragments) et suffisamment fort pour pouvoir canaliser les fragments très énergétiques vers l'extérieur (à travers une zone affaiblie du miroir). Comme les nanoparticules et les fragments de fission ont des rapports masse/charge très différents, cet équilibre est facile à obtenir.

Le moteur proposé sur ce principe éjecterait 46 % des fragments de fission à 0,05 c et aurait une masse sèche de 9 t (dont 6 pour la seule chambre cylindrique en LiH modérateur). Il permettrait d'amener une mission de 1 t au foyer de la lentille gravitationnelle solaire à 550 ua en 10 ans avec 180 kg de combustible.

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