Union Army Balloon Corps | |
---|---|
Croquis du ballon de Lowe, avec l'armée du Potomac de George McClellan, représentée dans le Harper's Weekly. | |
| |
Période | Octobre 1861 – Août 1863 |
Pays | États-Unis |
Allégeance | Union |
Branche | Armée de l'Union |
Type | Aviation |
Rôle | Reconnaissance aérienne |
Taille | 8 (aéronautes) personnes |
Fait partie de | Ingénieurs topographiques (contrat civil) |
Garnison | Fort Corcoran, Virginie |
Équipement | 7 aérostats avec des générateurs de gaz hydrogène |
Guerres | Guerre de Sécession |
Batailles | Bull Run, Yorktown, Fair Oaks, Vicksburg |
Commandant | Thaddeus S. C. Lowe (aéronaute en chef) |
modifier |
Pendant la Guerre de Sécession, l'Union Army Balloon Corps est une branche de l'Armée de l'Union, créée grâce à Thaddeus S. C. Lowe. Le Corps est organisé comme une opération civile, qui emploie un groupe d'aéronautes et sept aérostats spécialement construits pour les besoins de l'Union en matière de reconnaissance aérienne.
Thaddeus Lowe est un aéronaute vétéran qui, parmi d'autres dans le pays, travaille alors sur une tentative de traversée de l'océan Atlantique en ballon. Son projet est interrompu par le déclenchement de la guerre, qui éclate juste une semaine avant l'un de ses vols d'essai les plus importants. Il offre ensuite son expérience de la navigation aérienne à l'armée, pour utiliser le ciel à des fins de reconnaissance, en employant des montgolfières. Lowe rencontre le président Abraham Lincoln le 11 juillet 1861 et propose une démonstration avec son propre ballon, l’Enterprise, sur la pelouse de la Maison Blanche. À une altitude de 150 mètres, il télégraphie un message au sol décrivant le panorama de Washington qui s'offre à lui. Il est ensuite nommé aéronaute en chef de l’Union Army Balloon Corps, nouvellement créé.
Le Balloon Corps et son équipe d'experts en aéronautique participent aux affrontements de Yorktown, Seven Pines, Antietam, Fredericksburg et à d'autres batailles majeures le long du Potomac et de la Péninsule de Virginie. Le Balloon Corps sert l'armée de l'Union d'octobre 1861 jusqu'à l'été 1863, où il est démantelé, suite à la démission de Lowe.
La première utilisation de ballons comme engins de guerre a lieu lors de la bataille de Fleurus en 1794 : les aérostats permettent aux Français d'observer les mouvements ennemis. Pourtant, l'expérience n'est pas poursuivie par Napoléon. En 1849, les Autrichiens, lors du siège de Venise, utilisent des montgolfières pour lâcher des bombes sur la ville.
Le président américain Abraham Lincoln, quant à lui, s'y intéresse à des fins de reconnaissance. Cela mène à la rédaction d'une note aux départements de la Guerre et du Trésor mentionnant la nécessité de créer une sorte d'unité aérienne de ballons, dirigée par un « aéronaute en chef » (Chief Aeronaut). Un certain nombre d'aéronautes américains réputés se rendent alors à Washington, en vue d'obtenir le poste. Cependant, aucune précision n'est donnée quant à la création de cette section, et le statut civil ou militaire qu'elle doit revêtir. Il n'y a pas non plus de procédure prédéfinie pour sélectionner le chef aéronaute, mais au contraire le choix est laissé à chacun de décider comment attirer l'attention du gouvernement ou des autorités militaires sur sa personne. Sur le terrain, l'utilisation des ballons est laissée à la discrétion des officiers de haut rang, qui opèrent de manière empirique, apprenant au fur et à mesure de leurs erreurs et grâce aux conseils des experts aéronautes. Finalement, sur l'ensemble des postulants, seuls deux seront retenus pour effectuer les reconnaissances aériennes : le professeur Thaddeus Lowe et John LaMountain.
Le professeur Thaddeus Lowe fait partie des aéronautes américains qui briguent le poste de chef aéronaute de l'armée de l'Union. Parmi les autres postulants, on trouve le professeur John Wise, le professeur John LaMountain et les frères Ezra et James Allen. Tous sont très qualifiés, mais Lowe sort du lot, grâce à son projet presque abouti de traversée de l'Atlantique en ballon. Son passé scientifique lui vaut d'être tenu en haute estime par ses collègues de l'époque, dont le professeur Joseph Henry de la Smithsonian Institution, qui devient son plus grand soutien.
Sur les recommandations de Henry et d'autres, Lowe est contacté par le Secrétaire au Trésor Salmon Chase, qui l'invite à Washington pour une entrevue avec le Secrétaire à la Guerre Simon Cameron et le Président Lincoln. Le 11 juin 1861, Lowe est reçu par Lincoln et on lui propose de faire une démonstration de son engin. Le samedi 16 juin, Lowe est à bord de son ballon, l'Enterprise, et monte à 150 mètres au-dessus de la Columbian Armory, avec un équipement de télégraphie et un câble relié à la Maison Blanche. De là-haut, il transmet le message suivant :
« Ballon Enterprise
Washington, D. C. Le 16 juin 1861
Au Président des États-Unis :
Ce point d'observation englobe une zone d'environ 50 miles de diamètre. La ville entourée de campements offre une vue superbe. J'ai le plaisir de vous envoyer le premier message jamais télégraphié depuis une station aérienne en reconnaissance de vos encouragements quant à l'opportunité de démontrer l'utilité de l'aéronautique pour le pays.
T. S. C. Lowe »
Pour sa première mission, Lowe est affecté au Corps des ingénieurs, qui se nomme alors le Corps of Topographical Engineers, où son ballon est utilisé pour la création de cartes. Il travaille ensuite avec le major-général Irvin McDowell qui l'accompagne durant ses vols ; ensemble, ils observent le champ de bataille de Bull Run. McDowell est impressionné par Lowe et son ballon et ses félicitations reviennent aux oreilles du président Lincoln qui recommande personnellement Lowe à Winfield Scott, alors Commanding General of the United States Army : « Général, voici mon ami le professeur Lowe qui organise actuellement un corps aéronautique qui est son idée. Je souhaite que vous facilitiez son entreprise de toutes les manières possibles. » Cette recommandation a évidemment un impact important sur la nomination de Lowe en tant qu'aéronaute en chef. Les détails de l'établissement du corps et de son fonctionnement sont laissés à l'initiative de Lowe. Pendant toute son existence, le quiproquo sur la nature civile ou non du Balloon Corps persiste et ni Lowe ni aucun de ses hommes n'obtiennent de commission militaire.
John Wise, un des pionniers américains du vol en montgolfière, naît en 1808. Bien qu'il fasse d'importantes contributions à la science naissante de l'aéronautique, il est plus un homme de spectacle qu'un aérostier. Ses tentatives de vol libre, en préparation d'une traversée transatlantique, sont peu fructueuses et il ne reçoit pas le même soutien financier, ni ne possède une crédibilité comparable à celle de Lowe.
Wise est cependant suffisamment pris au sérieux par les services topographiques de l'armée pour qu'ils lui demandent de leur construire un ballon. Il le fait gonfler à Washington et part pour le champ de bataille. Pendant le trajet, le ballon se prend dans des arbres et est définitivement endommagé. Wise perd donc le marché et Lowe est alors prêt à s'en saisir. L'historienne Mary Hoehling précise cependant que le capitaine Whipple des Topographical Engineers dit à Lowe que Wise est prêt à mettre à disposition son propre ballon, l’Atlantic. D'autres auteurs mentionnent que John LaMountain est devenu propriétaire de l’Atlantic après un accident lors d'un vol qu'il fit avec Wise en 1859. Lowe lui-même écrit que le capitaine Whipple lui a indiqué qu'ils avaient commandé à Wise un nouveau ballon. Il propose également à Lowe de piloter ce ballon, mais ce dernier refuse énergiquement de voler sur les aérostats à l'ancienne mode de Wise.
Les ingénieurs patientent jusqu'en juillet, attendant des nouvelles de Wise. Le 19 juillet 1861, le général McDowell réclame un ballon pour le front à Bull Run. Comme il est impossible de joindre Wise, Whipple envoie Lowe gonfler son appareil et partir pour Falls Church. Mary Hoehling indique qu'alors que Lowe est en train de gonfler son ballon, John Wise arrive avec l’Atlantic et lui demande d'arrêter et de le laisser gonfler le sien en lui présentant des papiers officiels l'autorisant à le faire. D'autres documents historiques indiquent que l’Atlantic se trouvait à Fort Monroe avec John LaMountain. Lowe décrit quant à lui l'incident dans son rapport officiel au Secrétaire à la Guerre de manière moins dramatique, disant que le directeur de l'usine à gaz lui a demandé d'interrompre le gonflage de son ballon afin d'en remplir un autre en premier. Lowe ne donne pas de nom, mais on ne peut imaginer qu'il s'agisse de quelqu'un d'autre que de Wise.
John LaMountain, né en 1830, a acquis une certaine réputation dans le domaine de l'aéronautique. Il se joint à Wise pour une tentative de traversée transatlantique. Celle-ci échoue lamentablement, leur ballon (l’Atlantic) s'écrase, ce qui met fin à leur association. LaMountain conserve cependant leur ballon.
Les tentatives et réussites de LaMountain sont mineures. Cependant il attire l'attention du général Benjamin Butler à Fort Monroe. LaMountain opère, pendant un temps, avec son Atlantic tout cabossé, à Fort Monroe et est crédité de la première observation aérienne en temps de guerre. Il obtient un nouvel aéronef, le Saratoga, qui est bientôt perdu lors d'une tempête. LaMountain défend l'idée du vol libre pour les ballons de reconnaissance, alors que Lowe utilise des ballons captifs, que le personnel au sol peut toujours ramener à lui en cas de besoin.
Wise et LaMountain sont des détracteurs de longue date de Lowe, mais LaMountain poursuit une campagne au vitriole contre Lowe pour le discréditer et reprendre son poste de chef aéronaute. Il utilise la pression de l'opinion publique pour vilipender Lowe. Lorsque le général Butler est remplacé à Fort Monroe, LaMountain est assigné au Balloon Corps sous les ordres de Lowe. LaMountain continue cependant à critiquer publiquement son chef et à fomenter un mauvais état d'esprit au sein du Corps. Lowe rédige une plainte formelle adressée au général George B. McClellan et, en février 1862, LaMountain est licencié.
Un ballon peut opérer de deux manières : en mode captif ou en vol libre. Le vol libre permet au pilote de se déplacer librement en fonction de son altitude et du vent, aussi longtemps que son engin reste plus léger que l'air et qu'il conserve la possibilité de modifier son altitude. En mode captif, le ballon reste retenu au sol par un ou plusieurs câbles dont une équipe est chargée afin de régler son altitude, son déplacement et son atterrissage. Ce mode permet également d'installer un fil télégraphique entre l'aérostat et le sol. Les informations collectées par l'observateur peuvent être ainsi rapidement transmises au sol. On utilise à cette époque plusieurs moyens de communication : le télégraphe lorsque le ballon opère à haute altitude ; des signaux par fanions et même parfois un simple porte-voix lorsqu'il se trouve à basse altitude. De nuit, on préfère le télégraphe et les signaux lumineux.
LaMountain et Lowe se sont longtemps affrontés sur le thème : ballons captifs et vol libre. Lors des premières démonstrations de Lowe à Bull Run, il part en vol libre et se retrouve au-dessus des campements de l'Union dont les hommes peinent à l'identifier. En tant que civil, il ne porte aucun uniforme, ni insigne. Lors de chaque descente, il prend le risque que l'on ouvre le feu sur lui. Pendant l'un de ces vols, il se retrouve contraint de descendre derrière les lignes ennemies et doit attendre qu'on puisse venir le secourir pendant la nuit. Après cet incident, il ne travaille plus qu'en mode captif, ce qui permet à son équipe au sol de le ramener à chaque fois en toute sécurité ainsi que la pose d'un fil télégraphique le long du câble d'amarrage.
LaMountain, alors qu'il se trouve à Fort Monroe, ne pratique que le vol libre. Lorsqu'il rejoint le Balloon Corps, il revendique de faire ses reconnaissances comme il en a pris l'habitude. Lowe cependant le lui interdit. Finalement les deux hommes se mettent d'accord pour que LaMountain fasse une démonstration de vol libre. Cette reconnaissance est un succès, LaMountain démontre sa capacité à se déplacer comme il le désire. Cependant, lors du retour, son ballon est abattu par les troupes de l'Union qui n'ont pas pu l'identifier. LaMountain est même traité rudement par les soldats jusqu'à ce que son identité soit clairement établie.
Lowe considère cet incident comme un argument contre le vol libre. LaMountain insiste sur le fait que la reconnaissance est un succès, malgré le retour chaotique. Cette expérience n'éteint pas le conflit entre les deux hommes et la position de Lowe ne prévaut que grâce à son titre de chef aéronaute.