Soit p l'application de passage au quotient. p(X2) admet deux décompositions distinctes en facteurs irréductibles : on a p(X2) = p(X)p(X) mais aussi p(X2) = p(Y)p(Z)
L'arithmétique dans l'anneau des entiers relatifs permet la démonstration de nombreux théorèmes. Les démonstrations utilisent le fait que cet anneau est euclidien donc principal. En revanche, de nombreux anneaux ne le sont pas, par exemple celui des polynômes à coefficients dans les entiers relatifs ou encore les polynômes en plusieurs indéterminées sur un corps commutatif.
Ce dernier exemple est important, les variétés algébriques sont définies comme les racines d'un idéal de polynômes à plusieurs variables. Ainsi la sphère réelle est définie comme les racines communes des polynômes à trois indéterminées multiples de X2 + Y2 + Z2 - 1. L'anneau des fonctions polynomiales définies sur la sphère n'est ni euclidien ni principal. En revanche, il est factoriel.
Sur un anneau factoriel, certains théorèmes fondamentaux des anneaux principaux restent vrais. Ainsi, le lemme d'Euclide, les propriétés des plus petits communs multiples et des plus grands communs diviseur ou encore le théorème fondamental de l'arithmétique restent valables (ce dernier est vérifié par définition).
Tous ne s'appliquent plus, ainsi un idéal premier n'est pas toujours maximal. Dans Z[X], l'anneau des polynômes à coefficients dans l'anneau Z des entiers relatifs, l'idéal 2Z[X] n'est pas maximal et Z[X] / 2Z[X] n'est pas un corps car la classe de X n'est pas inversible. L'identité de Bézout n'est pas toujours vérifiée : dans Z[X] les éléments 2 et X n'ont pas de facteur commun, pourtant l'idéal engendré par 2 et X n'est pas l'anneau tout entier.
Cette caractéristique est parfois plus simple pour établir le caractère factoriel d'un anneau. La proposition suivante en est un exemple :
En effet, un anneau principal est noethérien, la première propriété est ainsi vérifiée. De plus si p est irréductible, l'idéal des multiples de p est premier et maximal. Ces propriétés sont démontrées dans l'article Anneau principal.
La démonstration est identique à celle présentée dans l'article Anneau principal. Rappelons que A est dit intégralement clos si les seuls éléments de son corps des fractions qui sont entiers sur A (c'est-à-dire racines d'un polynôme unitaire à coefficients dans A) sont les éléments de A.
Ce résultat est connu sous le nom de lemme d'Euclide ou parfois lemme de Gauss. Il est la conséquence directe de l'unicité de la décomposition de a.b en facteurs irréductibles.
En vue de montrer cette implication, une décomposition de la démonstration est utile. Soient A un anneau vérifiant les hypothèses de la première définition et a un élément de A, non nul et non inversible.
On construit par récurrence une suite (an) de la manière suivante: a0 est égal à a, supposons la suite définie jusqu'à l'ordre n – 1; si an-1 est irréductible alors an est égal à an - 1, sinon an est un diviseur strict de an - 1. L'élément b de A est dit diviseur strict de an - 1 s'il n'est pas inversible et s'il existe un élément c de A non inversible tel que b.c soit égal à an - 1.
La suite des idéaux principaux (anA) est croissante, la première partie de la définition indique qu'elle est stationnaire à partir d'un certain rang, noté ici m. Le fait que la suite soit stationnaire montre que am est irréductible. Par construction, il divise a.
Si a est irréductible, la proposition est évidente : on prend n = 1 et p1 = a. Sinon, le résultat précédent montre l'existence d'un élément irréductible p1 et d'un élément u1 non inversible tels que a = p1.u1. Si u1 est irréductible, la proposition est démontrée ; s'il ne l'est pas, il existe un élément p2 irréductible et un élément u2 non inversible tels que a = p1.p2.u2. En réitérant le raisonnement on trouve soit un élément un irréductible et la proposition est démontrée, soit une suite infinie (ui). La suite des idéaux (uiA) est alors strictement croissante, ce qui est impossible. Cette impossibilité démontre la proposition.
On suppose l'existence de deux décompositions :
Montrons la proposition par récurrence sur n. Si n = 1 alors a est irréductible, m est aussi égal à 1 et la proposition est démontrée.
Supposons la proposition démontrée à l'ordre n – 1, et montrons-la à l'ordre n. L'élément pn divise le produit q1 …qm, on en déduit que l'idéal pnA contient q1 …qm. Comme cet idéal est premier, il contient l'un des qk ; ce q k est donc un multiple de pn. Comme l'élément q k est irréductible, il existe un élément inversible u tel que pn = u.q k.
L'égalité suivante et l'hypothèse de récurrence permettent de conclure :
Soit σ la fonction de A – {0} dans l'ensemble N des entiers naturels qui à a associe le nombre de facteurs non inversibles dans la décomposition en facteurs irréductibles de a. L'unicité de la décomposition dans un anneau factoriel montre que la fonction σ est bien définie.
Soit a et b deux éléments non nuls de A. L'unicité de la décomposition montre aussi que σ(a.b) = σ(a) + σ(b). Ainsi si c divise strictement a, alors σ(a) est strictement plus grand que σ(c).
Soit (anA) une suite croissante d'idéaux principaux. Si la suite des (an) est constante égal à zéro, la suite est stationnaire. Sinon, quitte à réindexer la suite, supposons que a1 ne soit pas nul. Dire que l'idéal an + 1A contient strictement l'idéal anA signifie que an + 1 divise strictement an. Cela ne peut arriver que pour un nombre fini (inférieur ou égal à σ(a1)) d'entiers n, ce qui montre que la suite est constante à partir d'un certain rang, c'est-à-dire stationnaire.
Soient a et b deux éléments de A tels que ab est élément de pA. Alors ab étant un multiple de p, la décomposition en facteurs irréductibles de ab contient nécessairement p à un facteur inversible près. En conséquence soit la décomposition de a soit celle de b contient p, à un facteur inversible près. Ce qui montre que soit a soit b est élément de l'idéal pA. Cette propriété traduit le fait que l'idéal est premier et termine la démonstration.
Soit (an) une famille d'éléments non nuls de A.
Ces définitions généralisent les notions de plus petit commun multiple et plus grand commun diviseur. Dans ce contexte, certaines des propriétés vraies sur un anneau principal s'appliquent encore, d'autres non. La relation d'ordre partiel utilisée ici (ou plus exactement : de préordre partiel) est la divisibilité : a est plus petit que b si c'est un diviseur de b. Elle se traduit en termes d'idéaux par l'ordre inverse de l'inclusion : a est plus petit que b si l'idéal engendré par a contient l'idéal engendré par b.
Soient (an) une famille d'éléments non nuls de A et a, b deux éléments non nuls de A.
En effet, il suffit de remarquer qu'un idéal principal, engendré par un élément d, contient tous les an si et seulement si d divise tous les an, c'est-à-dire divise leur plus grand commun diviseur, autrement dit si cet idéal contient celui engendré par le plus grand commun diviseur. Ce plus petit idéal principal contenant tous les an contient l'idéal engendré par la famille, mais lorsque ce dernier n'est pas principal, l'inclusion est stricte. Ainsi dans Z[X], l'idéal engendré par 2 et X est l'ensemble des polynômes dont le terme constant est pair, mais le plus petit idéal principal le contenant est l'anneau entier. Dans un anneau principal, les deux idéaux sont égaux. Ce résultat est connu sous le nom de théorème de Bachet-Bézout.
Les anneaux de polynômes représentent la première motivation historique pour les anneaux factoriels. Si les coefficients sont choisi dans un corps commutatif, l'anneau dispose d'une division euclidienne, dans le cas contraire une autre arithmétique apparaît. En 1801 Carl Friedrich Gauss publie un traité dans lequel il montre que l'anneau des polynômes à coefficients entiers possède un propriété qui se traduit, en terme moderne, par le fait que cet anneau est factoriel. Une présentation moins générale est proposée dans l'article lemme de Gauss.
Dans ce paragraphe A désigne un anneau factoriel et K son corps des fractions. Il est utile, pour étudier les polynômes à coefficients dans A, d'expliciter deux définitions :
Parmi les propriétés suivantes, les deux premières donnent un sens à cette définition du contenu :
Le résultat suivant est connu sous le nom de lemme de Gauss dans le cas où A est l'anneau Z des entiers relatifs :
On en déduit le corollaire suivant :
Si P est à coefficients dans A, il suffit de poser cont(P) = le pgcd de ses coefficients : le quotient de P par cet élément de A sera bien primitif. Si maintenant les coefficients de P sont seulement dans K, c'est-à-dire sont des fractions d'éléments de A, on se ramène au cas précédent en réduisant ces fractions à un dénominateur commun b (par exemple le produit de leurs dénominateurs respectifs) : P s'écrit R / b avec b élément non nul de A et R polynôme à coefficients dans A, auquel le début du raisonnement s'applique. De R = cont(R)Q avec Q primitif on déduit ainsi P = (cont(R) / b)Q, ce qui montre la proposition.
Si P est à coefficients dans A, son contenu ne peut être que le pgcd de ses coefficients. Il est donc déterminé de façon unique à produit près par un inversible. Si maintenant P = R / b avec les mêmes notations que précédemment, de P = cont(P)Q on déduit R = b.cont(P)Q donc cont(R) = b.cont(P), si bien que le contenu de P, égal au quotient par b de celui de R, est, comme lui, déterminé de façon unique à produit près par un inversible.
Par définition du contenu, il suffit de montrer l'égalité pour deux polynômes à coefficients dans A et primitifs. Pour cela raisonnons par contraposée : montrons que si P.Q n'est pas primitif alors P ou Q n'est pas primitif. Si P.Q n'est pas primitif, il existe un élément irréductible p qui divise chacun des coefficients. Soit J un idéal maximal contenant p et φ le morphisme canonique de l'anneau A[X] dans (A / pA)[X]. Par hypothèse p divise chacun des coefficients de P.Q, on en déduit que φ(P.Q) est nul, autrement dit, que φ(P).φ(Q) est nul. Comme A / pA est un corps, φ(P), ou φ(Q) est nul, ce qui revient à dire que p divise le contenu de P ou de Q. La contraposée indique que si P et Q sont primitifs, alors P.Q l'est aussi.
Il s'agit de prouver que si P est irréductible dans A[X] alors il est primitif, et que si P est primitif alors son irréductibilité (ou sa réductibilité) dans A[X] équivaut à celle dans K[X].
Supposons P irréductible dans A[X] et observons la décomposition P = cont(P)Q : les deux facteurs sont dans A[X], donc l'un des deux doit être inversible, or ce ne peut pas être Q (qui est de même degré que P). Par conséquent cont(P) est inversible dans A[X] donc dans A, si bien que P est primitif.
Supposons maintenant P primitif et montrons qu'il est réductible dans K[X] si et seulement s'il l'est dans A[X]. Si P est réductible dans K[X] alors il existe deux polynômes B et C dans K[X], non nuls et non inversibles, donc non constants, tels que P = B.C. La proposition précédente montre l'existence dans A[X] de deux polynômes Q et R de mêmes degrés respectifs que B et C, donc non inversibles, tels que :
La méthode usuelle, pour démontrer l'existence et l'"unicité" (à permutation et association près) de la décomposition d'un élément non nul P de A[X] en produit d'irréductibles, consiste à utiliser sa décomposition dans l'anneau K[X], dont on sait qu'il est factoriel (et même euclidien).
Soit P = P1 ... Pm une décomposition de P en produit d'éléments irréductibles Pi de K[X]. Pour chaque indice i, notons ci "le" contenu (à produit près par une unité de A) de Pi, et Qi le polynôme primitif Pi / ci. D'après la proposition précédente, les Qi sont irréductibles dans A[X]. Or P = c Q1 ... Qm, en notant c le produit des ci. Cet élément c est égal au contenu de P, donc il appartient à A. Notons alors c = p1 ... pn "sa" décomposition en irréductibles dans A. On obtient une décomposition de P en produit d'irréductibles de A[X] : P = p1 ... pnQ1 ... Qm.
Si P = r1 ... rn'S1 ... Sm' en est une autre (en distinguant de même parmi les facteurs, par des notations différentes, polynômes constants et non constants) alors, par "unicité" de la décomposition de P dans K[X], m' = m et (quitte à réordonner les Si) Si = uiQi où ui est a priori dans K, mais est en fait égal au contenu de Si, donc est un élément inversible de A. Par élimination, les deux produits p1 ... pn et r1 ... rn' sont donc associés dans A. Par factorialité de A, ils ont alors (même nombre de facteurs, n' = n et) mêmes facteurs (à permutation et association près), ce qui termine la preuve d'unicité de la décomposition de P dans A[X].
Cette proposition (immédiate pour n = 0 puisqu'il s'agit alors de l'anneau A) se déduit de la précédente par récurrence sur le nombre n d'indéterminées, en utilisant l'isomorphisme naturel d'anneaux entre A[X1, ..., Xn - 1][Xn] et A[X1, ..., Xn].