Anneau factoriel - Définition

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Exemples et contre-exemples

  • L'anneau Z est un exemple simple d'anneau factoriel. Un autre exemple est l'anneau de Gauss Z[i] des complexes s'écrivant sous la forme a + ib où a et b sont des entiers relatifs.
  • Si K est un corps alors l'ensemble K[X] des polynômes à coefficient dans K est un anneau factoriel, ainsi que K[X1, X2, ...,Xn]. Plus généralement, dès que A est factoriel, il en est de même de A[X].
  • On démontre que tout anneau principal (à plus forte raison tout anneau euclidien) est aussi factoriel
  • Le contre-exemple le plus célèbre est l'anneau non-factoriel \mathbb Z[i\sqrt 3] dans lequel on trouve deux décompositions différentes de 4 : 4 = 2 \times 2 = (1 + i\sqrt{3})(1 - i\sqrt{3}) . Propriété qui donna l'occasion à Leonhard Euler de présenter une démonstration fausse du dernier théorème de Fermat pour n = 3 (Algebra 1770). Pour pallier cette difficulté, la méthode la plus simple est d'utiliser les entiers d'Eisenstein. La configuration générale d'une situation de cette nature est étudiée dans l'article sur les entiers quadratiques. Pour trouver une solution très générale à cette difficulté Ernst Kummer crée des nombres idéaux, maintenant formalisé par les travaux de Richard Dedekind à travers le concept d'anneau de Dedekind.
  • Un contre-exemple "géométrique" est celui du quotient de K[X,Y,Z] par l'idéal engendré par X2YZ.

Soit p l'application de passage au quotient. p(X2) admet deux décompositions distinctes en facteurs irréductibles : on a p(X2) = p(X)p(X) mais aussi p(X2) = p(Y)p(Z)

Motivation

L'arithmétique dans l'anneau des entiers relatifs permet la démonstration de nombreux théorèmes. Les démonstrations utilisent le fait que cet anneau est euclidien donc principal. En revanche, de nombreux anneaux ne le sont pas, par exemple celui des polynômes à coefficients dans les entiers relatifs ou encore les polynômes en plusieurs indéterminées sur un corps commutatif.

Ce dernier exemple est important, les variétés algébriques sont définies comme les racines d'un idéal de polynômes à plusieurs variables. Ainsi la sphère réelle est définie comme les racines communes des polynômes à trois indéterminées multiples de X2 + Y2 + Z2 - 1. L'anneau des fonctions polynomiales définies sur la sphère n'est ni euclidien ni principal. En revanche, il est factoriel.

Sur un anneau factoriel, certains théorèmes fondamentaux des anneaux principaux restent vrais. Ainsi, le lemme d'Euclide, les propriétés des plus petits communs multiples et des plus grands communs diviseur ou encore le théorème fondamental de l'arithmétique restent valables (ce dernier est vérifié par définition).

Tous ne s'appliquent plus, ainsi un idéal premier n'est pas toujours maximal. Dans Z[X], l'anneau des polynômes à coefficients dans l'anneau Z des entiers relatifs, l'idéal 2Z[X] n'est pas maximal et Z[X] / 2Z[X] n'est pas un corps car la classe de X n'est pas inversible. L'identité de Bézout n'est pas toujours vérifiée : dans Z[X] les éléments 2 et X n'ont pas de facteur commun, pourtant l'idéal engendré par 2 et X n'est pas l'anneau tout entier.

Propriétés

Premières propriétés

  • Un anneau commutatif unitaire et intègre est factoriel si et seulement s'il vérifie les deux propriétés suivantes :
(1) Toute suite croissante d'idéaux principaux est stationnaire.
(2) Tout idéal engendré par un élément irréductible est premier.

Cette caractéristique est parfois plus simple pour établir le caractère factoriel d'un anneau. La proposition suivante en est un exemple :

  • Tout anneau principal est factoriel.

En effet, un anneau principal est noethérien, la première propriété est ainsi vérifiée. De plus si p est irréductible, l'idéal des multiples de p est premier et maximal. Ces propriétés sont démontrées dans l'article Anneau principal.

  • Tout anneau factoriel est intégralement clos.

La démonstration est identique à celle présentée dans l'article Anneau principal. Rappelons que A est dit intégralement clos si les seuls éléments de son corps des fractions qui sont entiers sur A (c'est-à-dire racines d'un polynôme unitaire à coefficients dans A) sont les éléments de A.

  • Soit π un élément irréductible de A ; si π divise le produit de deux éléments a et b, alors il divise a ou b.

Ce résultat est connu sous le nom de lemme d'Euclide ou parfois lemme de Gauss. Il est la conséquence directe de l'unicité de la décomposition de a.b en facteurs irréductibles.

Diviseur et multiple communs

Soit (an) une famille d'éléments non nuls de A.

  • Le plus grand commun diviseur de ces éléments est, parmi les diviseurs communs aux an, celui qui est multiple de tous les autres. Il est unique à produit près par un inversible : c'est le produit de tous les irréductibles pi présents dans la décomposition en facteurs irréductibles de chaque an, affectés chacun d'un exposant égal au plus petit de ses ordres de multiplicité dans les an.
  • Le plus petit commun multiple des an est, parmi les multiples communs (s'il en existe) à ces éléments, celui qui est diviseur de tous les autres. Il est unique à produit près par un inversible s'il existe (ce qui est toujours le cas si l'ensemble des an est fini) : c'est le produit des facteurs pi présents dans la décomposition en facteurs irréductibles d'au moins l'un des an, affectés chacun d'un exposant égal au plus grand de ses ordres de multiplicité dans les an.
  • Les an sont dits premiers entre eux, ou premiers entre eux dans leur ensemble, si leur plus grand diviseur commun est égal à un. Ils sont dits premiers entre eux deux à deux si pour toute paire {m,n} d'indices, am et an sont premiers entre eux.

Ces définitions généralisent les notions de plus petit commun multiple et plus grand commun diviseur. Dans ce contexte, certaines des propriétés vraies sur un anneau principal s'appliquent encore, d'autres non. La relation d'ordre partiel utilisée ici (ou plus exactement : de préordre partiel) est la divisibilité : a est plus petit que b si c'est un diviseur de b. Elle se traduit en termes d'idéaux par l'ordre inverse de l'inclusion : a est plus petit que b si l'idéal engendré par a contient l'idéal engendré par b.

Soient (an) une famille d'éléments non nuls de A et a, b deux éléments non nuls de A.

  • Il existe un élément inversible u tel que
\text{pgcd} (b\cdot a_n)=u\cdot b \cdot\text{pgcd} (a_n)\;
  • Si la famille (an) est finie, il existe un élément inversible u tel que
\text{ppcm} (b\cdot a_n)=u\cdot b \cdot\text{ppcm} (a_n)\;
  • Si la famille (an) est finie et si les an sont premiers entre eux deux à deux, il existe un élément inversible u tel que
\text{ppcm} (a_n)=u\cdot \prod_n a_n\;
  • Il existe un élément inversible u tel que
a\cdot b = u\cdot \text{ppcm} (a,b)\cdot \text{pgcd} (a,b)\;
  • Le plus petit idéal principal contenant tous les an est l'idéal engendré par le plus grand commun diviseur des an.

En effet, il suffit de remarquer qu'un idéal principal, engendré par un élément d, contient tous les an si et seulement si d divise tous les an, c'est-à-dire divise leur plus grand commun diviseur, autrement dit si cet idéal contient celui engendré par le plus grand commun diviseur. Ce plus petit idéal principal contenant tous les an contient l'idéal engendré par la famille, mais lorsque ce dernier n'est pas principal, l'inclusion est stricte. Ainsi dans Z[X], l'idéal engendré par 2 et X est l'ensemble des polynômes dont le terme constant est pair, mais le plus petit idéal principal le contenant est l'anneau entier. Dans un anneau principal, les deux idéaux sont égaux. Ce résultat est connu sous le nom de théorème de Bachet-Bézout.

  • Si les an admettent un plus petit commun multiple, l'intersection des idéaux engendrés par les an est l'idéal principal engendré par ce plus petit commun multiple.
  • Si R désigne la relation d'équivalence d'association définie dans le paragraphe Définitions et A* l'ensemble des éléments non nuls de l'anneau, alors l'ensemble quotient A*/R des classes d'association, muni des opérateurs pgcd et ppcm, forme un treillis.

Anneau des polynômes

Les anneaux de polynômes représentent la première motivation historique pour les anneaux factoriels. Si les coefficients sont choisi dans un corps commutatif, l'anneau dispose d'une division euclidienne, dans le cas contraire une autre arithmétique apparaît. En 1801 Carl Friedrich Gauss publie un traité dans lequel il montre que l'anneau des polynômes à coefficients entiers possède un propriété qui se traduit, en terme moderne, par le fait que cet anneau est factoriel. Une présentation moins générale est proposée dans l'article lemme de Gauss.

Dans ce paragraphe A désigne un anneau factoriel et K son corps des fractions. Il est utile, pour étudier les polynômes à coefficients dans A, d'expliciter deux définitions :

  • Un polynôme de A[X] est dit primitif si et seulement si les coefficients du polynôme sont premiers entre eux dans leur ensemble.
  • Le contenu d'un polynôme P non nul à coefficients dans K est un élément a de K tel qu'il existe un polynôme primitif Q de A[X] tel que aQ soit égal à P. Dans cet article, on note cont(P) le contenu de P:
P = \text{cont}(P)\cdot Q,\quad \text{cont}(P)\in K,\quad Q\in A[X],\quad Q\ \text{primitif}

Parmi les propriétés suivantes, les deux premières donnent un sens à cette définition du contenu :

  • Tout polynôme non nul à coefficients dans A (resp. K) possède un contenu appartenant à A (resp. K).
  • Le contenu d'un polynôme est unique à produit près par un élément inversible de A.
  • Soient P et Q deux polynômes non nuls à coefficients dans K, l'égalité suivante est vérifiée, à produit près par un élément inversible de A :
\text{cont}(P\cdot Q) = \text{cont}(P)\cdot \text{cont}(Q)\;

Le résultat suivant est connu sous le nom de lemme de Gauss dans le cas où A est l'anneau Z des entiers relatifs :

  • Un polynôme non constant à coefficients dans A est irréductible dans A[X] si et seulement s'il est primitif dans A[X] et irréductible dans K[X].

On en déduit le corollaire suivant :

  • Pour tout entier naturel n, l'anneau de polynômes en n indéterminées A[X1, ..., Xn] est factoriel.
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