Cure psychanalytique - Définition

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Analyse

La cure psychanalytique s'avère complexe puisqu'elle réunit des objectifs divers, que son cours peut varier, qu'elle passe par plusieurs étapes et repose sur diverses méthodes. Il faut passer en revue ces différents aspects.

Objectifs

L'objectif premier sera de retrouver les associations inconscientes de l'analysant. Le refoulement doit être levé, le passé sera reconstruit et mis en relation avec le présent. Ceci passe notamment par l'analyse de la dynamique « transféro-contre-transférentielle ».

La cure peut déboucher sur plusieurs modifications, dont la plus souhaitable selon Freud est l'amélioration de la capacité de sublimation. L'objectif de l'analyse n'est pas forcément la suppression de symptômes, ce qui distingue l'analyse, par exemple, de la psychiatrie. Voir plus bas fin de l'analyse.

Cette question de l'objectif de la psychanalyse prête à débat. Débat à l'extérieur de l'analyse, contestation de son efficacité : voir critiques de la psychanalyse. Mais critiques également au sein de la psychanalyse, quant au « véritable but » :

  • Freud s'appuie en partie sur le modèle de la « régression ». Pour lui, la levée du refoulement fait cesser la régression. Ainsi, l'analyse rend l'individu capable d'accéder à une sexualité psychique plus élaborée. L'analysant deviendra capable de « choix amoureux » et de « choix professionnels » débouchant sur une satisfaction réelle, dans le long terme, là où le symptôme ne propose qu'une satisfaction immédiate et détournée. Freud dit que l'analyse est terminée quand « le patient est repris par la vie, c'est-à-dire qu'il peut travailler et avoir une sexualité épanouie » (dans cet ordre).
  • L'ego-psychology reprend ce modèle pour en faire un idéal adaptatif. Le Moi doit être renforcé, devenir capable de composer avec la situation dans laquelle il se trouve, aussi bien dans le réel que dans la réalité psychique.
  • Pour Jacques Lacan, la cure doit déboucher sur une parole pleine, celle qui reconnait la place que le sujet a occupé dans le désir parental, (s'il a été ou non un enfant désiré, et avec quels mots ce désir s'est manifesté). Cette parole doit franchir le leurre d'une relation de moi à autre moi, et permettre une relation du sujet à l'Autre.

Interprétation des rêves

Si une telle interprétation constitue une voie royale menant vers l'inconscient, il faut l'entendre ici comme investigation clinique. La cure se fonde donc en partie sur l'analyse des rêves, le patient associant librement. L'analyste propose des interprétations, dont la nature et la fréquence varient selon l'école, puisque ces interprétations s'opposent au laisser aller d'un transfert qui se doit de s'établir afin que la cure progresse.

Élaboration, perlaboration

L'élaboration est un travail psychique spontané : les excitations que reçoit l'appareil psychique ne sont pas seulement subies, mais élaborées et donc associées à des représentations. L'élaboration figure un travail imaginaire et symbolique. Elle désigne finalement une tendance spontanée, tendance à la construction psychique.

Si Rome, abritant des monuments récents (figurant la conscience) et des monuments de l'antiquité (figurant l'inconscient dans sa dimension infantile), l'élaboration se compare à la construction de monuments, qu'ils soient infantiles ou non.

Dans la cure, la perlaboration en est une extension ; il s'agit cette fois d'une élaboration allant à l'encontre du symptôme - on pourrait simplement dire un surcroît d'élaboration. Le trouble psychique est dû à un manque d'élaboration et la cure doit apporter une « surface » adaptée à un regain de travail psychique, travail associatif, travail de reconstruction : le patient « établit des liens », il se remémore, donne du sens aux événements de sa vie.

Transfert et Contre-transfert

transfert

Le transfert est la réédition de relations infantiles, éprouvées cette fois envers l'analyste. L'analysant prête à l'analyste des caractéristiques qu'il n'a pas, qui sont celles de personnes de son entourage infantile. Les différentes écoles lui ont donné une valeur inégale. Pour certains, le transfert est encore vu avant tout et uniquement comme une résistance. Pour d'autres, les kleiniens particulièrement, il constitue le moteur de la cure et la cible de toutes les interprétations. Pour les lacaniens, il est une brisure dans les déroulement du discours qu'il faut contourner et évacuer.

L'analyste est investi, comme objet pulsionnel. L'analysant transfère des qualités et défauts tirées de ceux de ses imagos infantiles. L'analyste doit analyser ce mouvement pour permettre à l'analysant de nouer des rapports plus réalistes à ses objets pulsionnels et bien sûr à ses objets réels actuels.

Le transfert n'est pas que positif (transfert d'amour ou d'admiration) : quand l'analyste refuse d'adhérer à cette image et de se comporter de la manière qu'attend l'analysant, celui-ci retourne son sentiment positif en sentiment négatif, en un transfert négatif, voire haineux, en volonté de détruire l'analyste.

Freud distingue le transfert positif modéré, celui qui convient, des transferts positifs excessifs et des transferts hostiles. Mais ces deux-là sont inévitables, la cure ne peut se dérouler sans eux. Le transfert, comme répétition, s'oppose, en masquant le passé, à la remémoration. Depuis Freud, les idées sur le transfert ont encore beaucoup évolué notamment avec les apports de Heinrich Racker, Michel Neyraut, Horacio Etchegoyen, etc.

Contre-transfert

Le contre-transfert désigne l'éprouvé transférentiel de l'analyste envers l'analysant. Pour être utilisable dans la cure, le contre-transfert doit être une conséquence du transfert (On peut aussi définir comme contre-transférentiels les seuls mouvements psychiques issus du transfert.).

A partir de sa propre élaboration du contre-transfert en grande partie inconscient, l'analyste comprend ce qui se joue dans le transfert, ce qui lui permet de l'interpréter, cette interprétation du transfert se posant comme point essentiel de la cure analytique.

Les particularités clinico-théoriques de Lacan et ses élèves

Pour Lacan, la question du contre-transfert diverge de celle des approches freudienne ou kleinienne classiques. Il le voit avant tout comme une résistance personnelles du psychanalyste bloquant le travail de l'analysant. C'est pour cela qu'il abandonne ce terme pour celui de « désir du psychanalyste ». C'est à partir d'un texte de Lucie Tower qui a pour titre contretransfert qu'il élabore ce terme de l'algèbre lacanienne nommé comme tel : « désir du psychanalyste ». Dans ce texte, elle décrit comment à partir du repérage de ses propres positions œdipiennes, qu'elle avait remises en jeu dans l'analyse de son analysant, en se mettant en rivalité avec sa femme et en tentant de protéger son analysant des entreprises de sa femme pour entraver l'analyse, qu'elle a pu modifier quelque chose de ce qui se passait dans cette analyse. Elle lui avait en effet permis de se comporter comme un homme, de s'inscrire de ce côté-là de la fonction phallique, de « la plier à son désir ». Une fois ce repérage effectué, c'est là que Lacan parle du désir du psychanalyste, un désir maintenu en quelque sorte hors jeu par rapport à l'analysant, mais pourtant mis en jeu au cœur même de son analyse, en tant que « désir de l'Autre ». (références à noter)

Fin de l'analyse

La question de la fin de l'analyse est complexe. On considère généralement un noyau du refoulé, et l'analyse n'ira pas jusqu'à lever tout refoulement. Dans Analyse avec fin et analyse sans fin, Freud pose cette question en notant plusieurs points :

  • L'analyse se termine lorsque le refoulement a été suffisamment levé pour raisonnablement pouvoir penser que la névrose ne reprenne pas ses droits. Mais, note-t-il, ceci vaut pour des conditions normales, une situation traumatique pouvant par exemple tout de même compromettre la santé (Cf. Réaction thérapeutique négative).
  • Sándor Ferenczi s'étant plaint que dans sa cure l'analyse du transfert n'ait pas été jusqu'à son terme, le transfert négatif n'ayant pas été traité, Freud répond (sans mentionner qu'il s'agit de lui et de Ferenczi), que ce conflit n'était pas alors en vigueur. L'analyse ne peut traiter que les conflits au présent, conséquences de l'élaboration d'un traumatisme passé. Elle ne peut anticiper sur de futurs conflits qui ne s'étaient pas alors présentés. Si l'analyste les évoque, l'analysant ne l'entendra pas. Si l'analyste voulait provoquer ce conflit, ce qui poserait un large problème déontologique, alors le conflit ne serait pas traitable, puisque pas élaboré - et le moi dépenserait toute son énergie à travailler ce nouveau conflit plutôt qu'à l'analyse. Freud recommande donc de s'en tenir à la seconde règle fondamentale, quitte à ne pas analyser ce qui ne peut l'être.
  • L'analyse vise-t-elle la santé psychique, l'analysé accédant, par l'analyse, à ce que les autres ont élaboré sans aide, ou l'analyse vise-t-elle à former un analysé aux capacités d'introspection (insight supérieures à la normale ? Là encore il s'agirait d'une question en discussion.
  • Toute névrose possède également un noyau psychotique (Partie psychotique de la Personnalité), supposée par Freud inanalysable. Depuis Freud beaucoup de chemin a été parcouru sur le sujet, l'analyse strictement réservée aux « névrosés » est un credo qui s'est révélé par trop limitatif. Plusieurs des patients de Freud seraient d'ailleurs aujourd'hui regroupés sous l'appellation « cas limite » (Concept de limite (psychanalyse)) (L'Homme aux loups, Dora, etc.). La théorie kleinienne et celles de ses successeurs (Wilfred Bion, Herbert Rosenfeld, Hanna Segal et Donald Meltzer par exemple a montré que l'analyse devait aussi porter sur les aspects archaïques de la psyché avec des défenses comme la projection, l'identification projective, le clivage et le déni. Toute psychose recèle par ailleurs une partie que Bion appelait la Partie Névrotique de la Personnalité. La question des indications par diagnostic a été traitée par Horacio Etchegoyen dans son ouvrage sur les Fondements de la technique, elle reste encore largement débattue.

Analyse didactique et/ou "cure psychanalytique de formation"

La formation d'un analyste se déroule selon plusieurs modalités selon les courants théoriques (cf. l'article psychanalyste). Pour Freud, l'essentiel réside dans la propre cure, à l'époque relativement superficielle et courte, de l'analyste. Il refusait par ailleurs que la psychanalyse soit "récupérée" par la médecine notamment pour la question de la formation et il défendra aussi explicitement - et à plusieurs reprises - la pratique d'analystes non-médecins qui avaient été accusés de pratique illégale de la médecine, notamment aux États-Unis (cf. l'article l'analyse profane). Plus tard, particulièrement à l'instigation du groupe d'analystes berlinois et de Carl Gustav Jung, la formation et son pilier, l'analyse personnelle - que quelques-uns appelaient et appellent encore analyse didactique - se complexifiera. Les "analyses de formation" s'assimilèrent de plus en plus la cure psychanalytique avec en particulier un allongement de sa durée. Des instituts se sont créés autour de l'International Psychoanalytical Association et des sociétés nationales affiliées. Freud avait promu la création de l'IPA, qui devait entre autres régir la formation des analystes. Les diverses sociétés qui composent l'IPA ont des pratiques parfois assez différentes, certaines sélectionnent encore les futurs analystes avant qu'ils commencent leur propre cure alors que d'autres, estimant qu'une analyse ne peut être décrétée formatrice qu'après coup sélectionnent donc les candidats après qu'elle est terminée ou bien avancée.

Jacques Lacan, au prise avec les exigences de l'IPA qu'il critique, proposera la procédure de la passe qu'il abandonnera par la suite, la considérant comme un échec. Sa pratique repose sur l'idée extrêmement controversée que l'analyste s'autorise de lui-même.

Pour l'Organisation Psychanalytique de Langue Française, il y a « analyse quatrième » : d'abord l'analysant suit une analyse - deux personnes sont donc mises en jeu. Puis le nouvel analyste prend son premier patient, troisième personne impliquée. Enfin, le praticien débutant se fait superviser par un autre analyste et c'est là le quatrième protagoniste, d'où le nom d'analyse quatrième.

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